Recherche
Magazine E-commerce
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine

[Enquête] Le nouveau magasin à l'heure de l'omnicanal

Publié par le | Mis à jour le
[Enquête] Le nouveau magasin à l'heure de l'omnicanal

Le consommateur ne raisonne pas en canal : il commence son parcours sur le Web, le poursuit en boutique, finit par acheter sur son mobile et sollicite le centre de contact en cas de problème. Les boutiques doivent donc s'inscrire dans ce parcours et offrir une expérience fluide à leurs clients.

Je m'abonne
  • Imprimer

C'est un tout nouveau concept de point de vente qu'est en train de tester Decathlon, en lieu et place de son magasin historique, situé à Englos (59). Sur 1200 m2, la marque de sport présente l'ensemble de ses 22 500 références. Mais aucun de ces produits ne peut être emporté immédiatement, puisqu'il n'y a pas de stock sur place.

En revanche, grâce à son smartphone (ou à un téléphone prêté par le magasin), le consommateur peut ajouter les produits de son choix à son panier. Panier qu'il règle ensuite en caisse (grâce au moyen de paiement de son choix). Enfin, il choisit son mode de livraison (en magasin ou à domicile).

Ce magasin mêle les avantages du point de vente physique et du site e-commerce : le client peut toucher les produits, bénéficier des conseils des vendeurs (qui n'ont plus à consacrer de temps à la mise en rayon), payer en espèces... Mais également avoir accès à un catalogue plus élargi de produits et à un prix intéressant (les produits sont 10 % moins chers). À noter que la livraison du produit a lieu le jour même pour une commande passée avant 11 heures ou dès le lendemain matin sinon.

Supprimer les irritants

Les clients veulent avoir le choix du canal, du moment, de l'endroit de livraison, du moyen de paiement.

Ce point de vente s'adapte, ainsi, aux nouvelles attentes des consommateurs. "Ils veulent avoir le choix du canal, du moment, de l'endroit de livraison, du moyen de paiement...", observe Frank Ronsenthal, expert en marketing de commerce. Des attentes qui mêlent les différents canaux de contact avec la marque : Internet, mobile, centre de contact et surtout point de vente physique, qui reste primordial. En effet, "si deux tiers des shoppers commencent leur parcours sur le Web, 66% des consommateurs disent ne pas pouvoir se passer du conseil du vendeur", rappelle Thomas le Guyader, expert cross-canal chez Evoke. Au-delà du conseil, les Français restent attachés à leur expérience en magasin pour pouvoir toucher le produit et l'obtenir tout de suite (étude PwC, novembre 2014).

Un magasin que les consommateurs apprécient, donc, mais qu'ils trouvent perfectible. Une étude Miliboo.com-­Opinion Way (décembre 2014) mettait en exergue le besoin des clients en conseil et en efficacité: 65% des personnes interrogées estimaient que les vendeurs ne savaient pas donner de conseils personnalisés, 62% souhaitaient régler via des caisses mobiles et 75% appréciaient l'idée de se faire livrer chez soi un article disponible dans un autre magasin de l'enseigne. Face à ces exigences, les marques n'ont plus qu'une seule alternative : y répondre! Ce qui veut dire qu'il faut supprimer tous les irritants pour que le parcours soit le plus fluide possible. À l'heure de l'omnicanal, l'objectif est de donner envie aux clients de faire l'effort de venir en magasin, alors qu'ils pourraient rester tranquillement chez eux et commander sur Internet. "Les magasins doivent devenir aussi fluides qu'Amazon", lance Georges Duarte, associé chez UX In Situ, agence de retail design. Les clients doivent pouvoir régler leurs achats auprès des vendeurs grâce à des tablettes, se voir proposer une alternative si le produit qu'ils recherchent n'est pas disponible, venir en magasin s'ils rencontrent un problème avec une commande passée sur Internet, retirer facilement leur commande click and collect...

Comment lever les irritants en magasin?

Veiller à la fluidité

Concernant ce dernier point, notamment, la fluidité doit être de mise. Darty a fait de gros efforts sur ce point: "Dans les magasins où nous avons un gros volume de click and collect, il y avait une forte attente des clients sur la durée du retrait, raconte Olivier Godart, en charge du digital chez Darty. Nous avons donc mis en place des casiers dans lesquels les produits sont disponibles une heure après la commande". Il est important de rendre l'espace de retrait facilement repérable et faire en sorte que le produit soit disponible rapidement. "Les consommateurs viennent toujours en magasin, mais comme ils ont déjà effectué leurs recherches chez eux, ils attendent de l'échange humain: ils préfèrent préparer leur commande en amont, la retirer rapidement et facilement, puis consacrer le temps gagné à discuter avec les vendeurs pour obtenir des conseils", pense Thomas Le Guyader.

Du vendeur au conseiller : la mutation portée par le digital





Miser sur les vendeurs en les digitalisant

En gagnant en fluidité, les enseignes donnent un nouveau rôle à leurs vendeurs: un rôle de conseiller. À?condition de tout mettre en oeuvre pour qu'ils soient en mesure de répondre aux questions des consommateurs. De ce point de vue, la tablette apparaît incontournable, et de nombreuses enseignes l'ont déjà adoptée. Elle donne accès au vendeur à des informations produits plus détaillées, à l'ensemble des stocks, à des informations clients. "C'est un moyen d'établir une relation privilégiée avec le vendeur en l'alimentant sur l'historique du client afin de personnaliser l'expérience", souligne Sébastien Maréchal, senior manager au sein de MC2i Groupe. Une relation privilégiée grâce à laquelle, par le biais des informations clients disponibles, le client se voit prodiguer des conseils personnalisés en fonction des achats précédents ou des data qui ont pu être collectées ici ou là. Et un moyen, aussi, de ne pas traiter les clients VIP comme les autres afin de les faire accéder à des services exceptionnels. "Il s'agit de repenser les frontières du commerce pour créer une relation au-delà de la transaction, une relation de confiance sur la durée", indique Véronique Varlin, directrice de l'Observatoire Société et Consommation (ObSoCo).

La tablette donne accès au vendeur à des informations produits plus détaillées, à l'ensemble des stocks, à des informations clients.

Surtout, "on ne dit plus non au client", remarque Catherine Barba, experte du commerce électronique et de la transformation numérique. "Avec les tablettes vendeurs, le client peut acheter le produit même s'il n'est pas en stock, puisqu'il est possible de commander sur Internet pour une livraison à domicile ou en magasin: cela permet de satisfaire le client mais également de vendre davantage", continue Timothée Jonglez, directeur associé d'Altima°, qui vient d'équiper l'enseigne Petit Bateau de ces fameuses tablettes.

Un dispositif qui exige que les données clients de tous les canaux soient à la disposition des vendeurs sur cette tablette, mais aussi que ces derniers s'habituent à une nouvelle façon de faire leur métier. "Le support exige un changement de comportement du vendeur, qui doit être formé pour que la relation reste naturelle", note Laurent Thoumine, directeur retail d'Accenture France et Benelux.

Les conseillers clientèle vont surtout devoir faire preuve de souplesse: après les tablettes apparaîtront de nouveaux outils auxquels ils devront s'adapter. Commencent, d'ores et déjà, à émerger les cabines d'essayage digitales, qui formulent des propositions de tailles, de couleurs, d'accessoires... "Les vendeurs vont ensuite chercher les produits recommandés et les apportent aux clients directement dans la cabine d'essayage", complète Laurent Thoumine.

Clienteling : 12 initiatives qui favorisent l'expérience shopping

Être à armes égales avec Internet

Au-delà des données clients, les tablettes peuvent tout simplement délivrer des informations produits détaillées qui alimentent le client souhaitant en savoir plus. "Plus de la moitié des consommateurs se plaignent du manque d'informations dans les magasins, alors qu'ils bénéficient d'une profusion d'informations sur le Net", rapporte Laurent Thoumine, qui conseille de mettre à disposition des vendeurs une information identique à celle qu'on peut trouver sur le site de l'enseigne. "Il est possible de stocker différents contenus dans un outil de "digital asset management" que le distributeur peut venir puiser pour ses différents canaux, que ce soit pour le Web ou pour ses magasins. Cet outil établit une véritable cohérence entre tous les canaux", décrit Laurent Thoumine.

Il faut à tout prix utiliser les contenus du Web à travers des écrans sur les points de vente.

Ce contenu peut être diffusé dans les tablettes vendeurs mais également sur des écrans dans les magasins. Des écrans qui apportent des informations détaillées sur les produits, mais aussi présentent l'offre de manière à susciter le désir chez les consommateurs. "Il est souvent plus sympathique de découvrir une offre sur le Web, car il y a des tutoriels, des avis clients... Il faut à tout prix utiliser les contenus du Web à travers des écrans sur les points de vente. Les tutoriels web, par exemple, peuvent être diffusés en magasin", affirme Georges Duarte.

Car si on n'apporte pas assez de contenu au client venu en magasin, il y a de fortes chances qu'il le cherche par lui-même sur son smartphone, et qu'il finisse par acheter chez un concurrent. Cette pratique du showrooming, Véronique Varlin conseille de l'accepter... et de s'y adapter. C'est ce qu'a fait Darty, qui propose à ses clients une connexion wifi gratuite pour qu'ils puissent facilement se connecter à Internet via leur smartphone. "Nous nous sommes dit que nos bons prix et nos bons services ne nous faisaient pas courir de réels risques: nous avons préféré éviter toute frustration liée à une rupture dans le parcours du client", explique Olivier Godart.

Cette pratique du showrooming peut également être encadrée en offrant du contenu tellement riche sur mobile que le client n'aura pas envie de consulter d'autres sites. La Fnac a fait de nombreux efforts de ce point de vue-là avec son application mobile : le client peut vérifier en temps réel la disponibilité d'un produit dans le magasin le plus proche ou alentour et, grâce à un système de scan de codes-barres, QR codes et reconnaissance d'image, il accède instantanément aux fiches des articles en rayon, aux avis des ­internautes, aux vidéos, démos et autres caractéristiques des articles.

Pour 63% des consommateurs, la technologie encourage à revenir en magasin





Investir, se réorganiser et tester

"Toutes les solutions pour révolutionner le point de vente sont là. Le problème ne se pose pas de ce point de vue, mais du côté des investissements importants à réaliser pour réellement transformer l'enseigne", pense Rémy Malchirand, directeur général de Manhattan Associates France. Les outils ­informatiques doivent, en effet, être à la hauteur des ambitions. Ne serait-ce qu'à l'égard de l'infrastructure réseau, qui doit être d'une qualité irréprochable pour faire fonctionner les fameuses tablettes. Mais aussi au niveau du SI de l'entreprise qui doit faire remonter les informations de la logistique, du CRM... afin de les mettre à disposition des clients et des conseillers de clientèle. Pour que les différents SI puissent communiquer entre eux, Evoke a développé un "hub" dans lequel entrent les différents flux, qui sont alors transformés.

Il est impératif de réorganiser l'entreprise.

Au-delà du SI, ce sont aussi les différents services, qui doivent communiquer entre eux. Il faut réorganiser l'entreprise. "Réussir à casser les silos est une vue de l'esprit, tranche Catherine Barba. Mais il faut trouver des passerelles, des gens qui font les connecteurs." Revoir l'organisation, c'est aussi revoir le rôle que l'on souhaite donner aux vendeurs. "Est-ce que rémunérer les vendeurs, qui sont désormais des guides, sur le nombre de ventes en magasin a encore un sens?", questionne Catherine Barba. Elle donne l'exemple de la marque de cosmétiques Origins, dont les vendeurs sont rémunérés non pas individuellement sur les ventes réalisées mais de manière collective sur leur capacité à faire revenir les clients. "La tablette ne mène pas forcément à une vente; les vendeurs doivent acquérir de nouveaux réflexes", pense Timothée Jonglez. Chez Darty, par exemple, un client qui souhaite réfléchir après s'être entretenu avec un vendeur, est invité à laisser son adresse e-mail afin que lui soient envoyés les différents documents consultés avec le vendeur.

La boutique n'est pas morte mais doit être connectée

Faire les bons choix

N'étant qu'au début de cette révolution omnicanale, les start-up fourmillent d'idées pour digitaliser les points de vente. Certaines enseignes ont adopté le robot Nao, d'Aldebaran, par exemple. "Il s'agit d'un device complémentaire qui identifie la carte de fidélité du client, les codes-barres produits. Cela permet de constituer des paniers mais de manière plus ludique", raconte Bruno Menteaux, directeur communication et systèmes de Cylande. Il donne également l'exemple des vitrines interactives qui permettent d'acheter des produits même quand le magasin est fermé.

Du côté de Valtech, le casque de réalité augmentée Oculus Rift est utilisé pour un client américain qui commercialise des cuisines haut de gamme: équipé de ces lunettes magiques, le consommateur est immergé dans une émission de téléréalité qui lui donne à voir les cuisines en conditions réelles d'utilisation. Les possibilités offertes par les start-up sont infinies. Mais les moyens des enseignes ne le sont pas. "Elles doivent faire des choix, travailler sur certains scénarios en privilégiant le réseau physique", conseille Pasacal Malotti, directeur conseil chez Valtech France.

Et Catherine Barba de conclure: "Il faut expérimenter, tester en permanence pour voir ce qui marche ou pas. Et ce, en collaboration avec les start-up." Au risque, sinon, de se faire rafler des parts de marché par les enseignes qui ont l'audace d'investir.

Retail et e-commerce, la grande convergence

 
Je m'abonne

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

E-commerce

Small Business

Event

E-commerce Offres Commerciales

Good News by Netmedia Group

La rédaction vous recommande

Retour haut de page