Gare au piège de la conquête permanente !
En matière de fidélisation on line, les erreurs de stratégie sont plus fréquentes que les réussites. Jean-Marc Lehu, conseiller en marketing et communication, maître de conférence à l'université Paris I et auteur de nombreux livres sur ce sujet(1) en révèle les raisons.
Je m'abonneLa fidélisation est-elle correctement abordée par les entreprises du Web ?
Jean-Marc Lehu : Céder à la tentation de la
prospection à tout prix est une erreur que commettent bon nombre de sites, le
marché nourrit de telles tentation... Le mécanisme économique actuel pousse les
annonceurs à comptabiliser les clients acquis, pas les clients fidèles. Or, si
l'on prend l'exemple d'Amazon, ce qu'il faut regarder, ce ne sont pas ses 14
millions de clients, mais son taux de fidélisation qui atteint 60 % - 65 %.
Le prix peut-il être un argument de fidélisation ?
J-M.
L : Le prix est une variable très puissante. Mais il faut tenir compte des
possibilités du Web, de l'existence des agents comparateurs. Une heure après
votre promotion, votre concurrent proposera le même article 10 % moins cher. La
fidélisation classique par le prix n'est pas viable sur Internet, il faut
retenir le client par la satisfaction du service rendu. Si l'offre est
renouvelée, si je parviens à développer ce bouclier de confiance chez mes
clients, alors une fidélité naturelle et non forcée s'installe.
Quel est le lien entre la politique marketing et la fidélisation ?
J-M. L : Certaines start-up n'ont rien compris à la fidélisation
! Quand on recherche une clientèle de niche et plutôt haut de gamme, comme
boo.com, on ne fait pas de soldes quelques semaines plus tard. Car c'est le
meilleur moyen de mécontenter son coeur de cible. Quant aux entreprises
présentes sur le Web et dans le réel, elles souffrent de l'absence
d'intégration des nouvelles donnes marketing et d'un manque de cohérence entre
le marketing traditionnel et le e-marketing.
Les entreprises présentes uniquement sur le Net sont donc mieux placées pour fidéliser les clients ?
J-M. L : Sur certains points seulement. Car elles ont à
résoudre des problématiques qui leur sont propres, comme la nécessité de
convaincre l'internaute de la valeur de leur marque. Le consommateur aime les
entreprises qui ont un historique derrière elle et une identité forte.
La fidélisation est-elle selon vous un outil réservé au grand public ?
J-M. L : Non, je pense que la demande de fidélisation est
certainement plus importante aujourd'hui dans le commerce professionnel que
dans le domaine grand public. L'approche du commerce professionnel implique des
règles différentes en matière de sécurité, de présentation, d'ergonomie et de
technicité. Dans le B to B, on débouche plus vite sur le marketing individuel,
car le professionnel s'attend à trouver sur le site le même formulaire que
celui qu'il a l'habitude de remplir, avec les mêmes codes... (1) La
fidélisation client. Editions d'Organisation. 480 pages, 215 F.