Choix des prestataires : Gare au tout-en-un
Avec qui lancer son site de commerce électronique ? Doit-on opter pour des prestataires multiples ou bien le confier à une agence web ? Le choix est important car il n'est pas toujours sage de confier les clés d'une activité stratégique à un seul prestataire. Dans les deux cas, il faudra réfléchir à une organisation interne spécifique et au mode de rémunération des prestataires.
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La mise en place des sites de commerce électronique a engendré le
développement d'un grand nombre de prestataires de ce marché : les concepteurs
et développeurs des sites, les graphistes, les SSII, les hébergeurs, les
cabinets de conseil, les régies publicitaires spécialisées, les agences de
communication, etc. Parmi cette foule d'acteurs, apparaissent aujourd'hui bon
nombre de spécialistes à tout faire qui, sous l'appellation de "web agency",
prétendent assurer l'ensemble des prestations. Dans cette mouvance venue des
Etats-Unis, ce prestataire unique se propose de concevoir, de réaliser et
pourquoi pas d'héberger un site de commerce électronique pour son client. Il
prend également en charge, le cas échéant, la réflexion préalable, définit le
positionnement du site par rapport à la concurrence, ainsi que son intégration
dans les canaux de distribution de l'entreprise. Certains proposent même des
services de communication et de référencement. « Aujourd'hui, les agences web
rachètent des cabinets de conseil et tiennent un discours d'intégration de
toute la chaîne du commerce électronique. C'est le syndrome
Monsieur-Je-Fais-Tout : je développe votre site, je l'héberge, je redéfinis
votre stratégie, je crée votre politique commerciale et celle des ressources
humaines », explique Denis Gustin, consultant chez eMarket Stratégies et auteur
d'une étude sur le marché des prestataires du web-marketing (cf. encadré). Ces
pratiques sont-elles justifiées ? Les agences revendiquent en tout cas leur
savoir-faire. « Nous proposons des services sur trois axes : le conseil
stratégique, le design et la création, et enfin le développement informatique,
confie Gilles Réalé, directeur général de l'agence Orange Art. Une web agency
peut apporter son concours dans les domaines de fidélisation des clients, de la
vente, de l'optimisation des processus internes et, bien entendu, de la
communication. Orange Art est également en mesure d'intervenir dans le domaine
de la publicité, de la génération de trafic, de la mesure d'audience et du
back-office grâce à ses différentes filiales. » « Nous intervenons sur la
totalité de la problématique Web, afin de répondre aux interrogations suivantes
: Comment dois-je vendre ? A qui ? Comment convaincre ma cible d'acheter mes
produits ? Comment la fidéliser ?..., explique Nicolas Mialaret, consultant
chez Himalaya. Nous prenons en charge la réalisation du site, le marketing,
l'identité visuelle, le référencement, la communication et la promotion. Nous
assurons toute la chaîne des prestations, de la recommandation jusqu'à
l'hébergement. » Le concept d'agence interactive ne suffit donc plus à définir
le métier de ces nouveaux bâtisseurs du Net. « Nous sommes des architectes
interactifs. Nous concevons et intégrons tous les corps de métier : business,
communication, marketing et technique », avance Bruno Fontaine, directeur du
pôle conseil d'Imaginet.
Davantage de prestations pour plus de prestataires
Outre les agences, d'autres acteurs du marché
cherchent également à intégrer l'ensemble des métiers de l'Internet, au premier
rang desquels, on retrouve les grands cabinets de conseil. « Notre prestation
s'étend de la vision stratégique du commerce électronique jusqu'à l'élaboration
du modèle opérationnel et son implémentation, explique, par exemple, Yann
Castaignet, directeur associé chez CSC Peat Marwick. L'avantage d'un cabinet de
conseil réside dans sa capacité d'analyse. La force de nos recommandations
vient de notre capacité à observer ce qui se passe sur le marché et autour des
métiers connexes - types de services proposés, tarification, valeur ajoutée,
type de distribution, cible, géographie, etc. » Cette démarche correspond à une
certaine attente sur le marché. Le raisonnement typique du responsable d'une
entreprise confrontée aux défis de l'Internet est de se dire : "Je ne comprends
rien à Internet, mais je sais qu'il faut aller vite. Donc, j'externalise".
Denis Gustin met les chefs d'entreprises en garde contre cette tentation : « Le
Web prend une importance stratégique. Tout externaliser, c'est fragiliser sa
stratégie de développement car cela revient, dans certains cas, à remettre les
clés de son business à un tiers qui connaît moins bien le métier de
l'entreprise. Cette option est dangereuse car l'entreprise qui a confié la
totalité de la gestion de son projet de site de commerce électronique à un
prestataire n'a plus la capacité, en interne, de revenir en arrière ou
d'intervenir sur quoi que ce soit. Il est important de garder à l'esprit que
même si une web agency déclare posséder toutes les ressources nécessaires à la
bonne marche d'un site web, elle ne reste pas moins qu'un prestataire dont
l'objectif est de facturer un maximum de services. Les entreprises doivent se
garder de céder par soucis de facilité aux discours trop présomptueux de
certaines d'entre elles. »
Gare à ne pas tout confier à un seul prestataire
Georgy Kishtoo, directeur conseil chez Integra, émet
lui aussi quelques doutes sur la compétence universelle des web agencies : « Si
l'entreprise a déjà l'habitude de prendre des commandes à distance, le Web ne
sera qu'un flux supplémentaire. Mais, dans le cas contraire, elle aurait tort
de compter sur une agence web, car l'agence n'est pas capable de tout faire. Le
commerce électronique c'est aussi une comptabilité, une logistique, etc. C'est
encore plus vrai pour une start-up. Parmi ces nouveaux prestataires, beaucoup
sont immatures ou en tout cas ignorent la complexité des métiers impliqués. »
Pour Denis Gustin, la solution est toute trouvée : « Un projet internet n'est
pas différent d'un projet classique. Les règles économiques s'appliquent de la
même façon. Il est important de garder en interne la maîtrise de l'ouvrage et
les choix stratégiques. Cette maîtrise en in-terne n'est pas un coût, mais, au
contraire, un investissement, aussi bien sur le plan intellectuel que sur celui
des ressources humaines. Car il sera de toute façon rentable, l'Internet étant
parti pour durer. » Dans cette démarche réfléchie, l'entreprise doit commencer
par étudier l'organisation et les structures à mettre en place. Qui aura la
charge de correspondre avec les prestataires de services ? Comment organiser
les circuits d'informations ? « Peu de personnes dans les entreprises sont
capables de maîtriser à la fois les enjeux marketing et techniques, estime
Bruno Fontaine. Nous conseillons de former un comité de pilotage avec la
participation des responsables de l'entreprise, avec à sa tête un directeur de
mission qui vient de chez nous. Ce directeur de mission aura la responsabilité
de coordonner l'ensemble du projet. »
La méfiance des web agencies vis-à-vis des start-up
Et plus l'interlocuteur au sein de
l'entreprise est hiérarchiquement élevé, mieux c'est. « Notre correspondant
chez le client est le directeur général, parfois un autre cadre opérationnel,
ou le directeur de la communication », confirme Gilles Réalé. En revanche,
l'interlocuteur d'une régie publicitaire peut se situer à tous les niveaux, du
Dg au webmaster, en passant par le directeur marketing, car les enjeux sont de
moindre importance, puisque limités à la publicité. Il est intéressant de
remarquer que les start-up ne sont pas toujours les bienvenues chez les web
agencies. « Nous limitons exprès le nombre de budgets dont nous avons la charge
provenant de start-up car les conditions de travail avec elles sont très
difficiles, révèle Gilles Réalé. Elles cherchent, la plupart du temps, à
utiliser les technologies très récentes et parfois instables, à tout réaliser
dans des délais très courts, et enfin elles peuvent réévaluer complètement la
demande en cours du projet. » Pour Yann Castaignet, « les start-up n'ont pas
toujours conscience des implications du business sur leur modèle de
fonctionnement. Leurs fondateurs croient qu'ils sont d'accord sur ce qu'ils
veulent faire, mais, en réalité, ce n'est pas toujours le cas, ce qui provoque
des conflits d'intérêts et nuit au bon fonctionnement de la société. » La
rémunération des prestataires prend des formes classiques : honoraires, achat
des licences, facturation à la journée de développement... « Il n'y a pas
vraiment de règles établies en la matière, estime Bruno Fontaine. Nous sommes
rémunérés au forfait, et parfois de façon mixte à travers une formule
forfait-régie. Pour nous, le forfait est le moyen le plus sûr de respecter et
de protéger les engagements pris vis-à-vis du client : le temps, le volume de
travail, les résultats, etc. » Orange Art, par exemple, se fait rémunérer « au
forfait quand nous travaillons sur un cahier des charges précis, sinon à la
consultation journalière ». D'autres agences utilisent le même principe de
rémunération : forfaitaire pour une prestation définie, et en jours/hommes pour
des développements dont la configuration est susceptible de varier en cours de
route.
L'hébergement : des tarifs très disparates
Et
pour ce qui est des régies publicitaires ? « Elles sont rémunérées de façon
classique, au commissionnement, confie Lionel Segard, directeur commercial de
la régie 24/7 Média. Certaines louent aussi leur outil, comme AdServer, qui
permet de gérer l'inventaire, de paramétrer les campagnes sur la semaine, jour
par jour, d'envoyer des bandeaux, de comptabiliser le nombre de clics et les
événements suivants. » L'hébergement est un poste de dépenses où les tarifs
varient dans une fourchette très large, entre des prestataires comme RapidSite,
qui propose des services à bas prix pour les PME, jusqu'aux opérateurs de sites
complexes comme Integra. Chez ce dernier, la facture est composée de la partie
jours-hommes et du coût de location des ressources. Elle oscille entre 600 000
et 800 000 francs en moyenne pour la première année, sans hébergement. La
facture peut atteindre 1,2 million de francs avec l'hébergement du site. Mais
la moyenne de l'hébergement d'un site peut être estimée entre 1 000 et 2 000
francs mensuels. Les règles d'application sont, quant à elles, différentes d'un
prestataire à l'autre. L'agence Himalaya, par exemple, n'héberge que des sites
qu'elle a elle-même développés.
Ne pas chercher à être plus malin que le marché
« Ce qui est nouveau sur le marché, c'est
l'apparition d'acteurs qui cassent les prix dans le seul but de conquérir
rapidement des parts de marché, observe Denis Gustin. Certaines entreprises
peuvent être tentées par des offres à des prix défiant toute concurrence. Mais
si le prestataire ne gagne pas sa vie, s'il est obligé de faire appel à de
jeunes stagiaires plutôt qu'à des experts confirmés, la qualité de la
prestation en souffrira. L'opacité des prix aidant, les réponses à un appel
d'offres varient sur une échelle de un à cinq. Dans le choix du prestataire
pour l'hébergement du site, c'est le même conseil : ne cherchez pas à être plus
malin que le marché. Déterminez précisément le niveau requis pour un appel
d'offres et ne forcez pas le prestataire, sinon le projet se soldera par un
échec. » Denis Gustin soulève un autre sujet de discorde : le partenariat qui
peut exister entre les agences et les éditeurs. Pour lui, une agence qui a noué
des relations particulières avec un éditeur, et qui a formé ses équipes à son
logiciel, va nécessairement diriger le client vers ce produit. D'autant plus
qu'elle est parfois rémunérée sur la vente des licences. « Nous travaillons
avec les principaux éditeurs, comme BroadVision, OpenMarket ou Vignette, et
nous avons effectivement avec eux des partenariats de revente et d'intégration
de leurs solutions, et nous sommes rémunérés par les éditeurs pour la vente de
leurs logiciels », admet Nada Fayçal, directeur des opérations de Fluxus. Mais
toutes les agences ne se font pas payer sur les logiciels vendus. « Nous avons
quelques partenariats, comme avec BroadVision ou Vignette, mais nous ne sommes
pas revendeurs. Nos préconisations de logiciel se basent essentiellement sur le
type de marché visé par le client », affirme Nicolas Mialaret. « Nous vendons
de la ressource partagée, sous une forme proche de l'ASP. Ce sont des licences
qu'Intégra a achetées et qu'elle loue », affirme, pour sa part, Georgy
Kishtoo.
Entreprises et prestataires : vers des rapports nouveaux
« Un partenariat exhaustif avec les éditeurs nous paraît
impossible, résume Yann Castaignet. Il y a trop d'acteurs sur ce marché. Tous
les jours, il y a de nouveaux entrants ou de nouvelles versions de produits.
Nous ne pouvons évidemment pas former les gens à toutes les solutions offertes.
» Poursuivant l'analyse, Denis Gustin s'interroge aussi sur la légitimité d'une
agence : « D'habitude, des cabinets de conseil élaborent des solutions sans
participer à leur réalisation. Or une agence web prescrit une solution
qu'elle-même va construire. Elle est donc à la fois juge et partie. Il y a là
un problème évident d'indépendance et de déontologie. » Une accusation que les
prestataires rejettent en coeur. « Nous allons vers une prestation de plus en
plus globale dans laquelle nous assumons le rôle de juge et partie, nous
assumons nous-mêmes les recommandations que nous sommes amenés à faire au
client », estime Gilles Réalé. « Nous ne faisons pas de consulting sec, ajoute
Bruno Fontaine. Quand je donne des conseils, je veux aussi avancer avec mon
client. Et d'ailleurs, qui a la légitimité et la connaissance pour donner des
conseils sinon celui qui sait les réaliser ? » La situation du conseiller qui
réalise ses propres préconisations paraît aussi inévitable à Georgy Kishtoo : «
Dans quatre cas sur cinq, la réflexion préalable du client est insuffisante. Le
fossé est trop profond entre ses velléités et les réalités. Nous nous
retrouvons à repenser le business électronique pour le client, à motiver sa
réflexion sur le business modèle. » Cette promiscuité forcée entre l'entreprise
et son prestataire débouche aussi sur de rapports nouveaux que les acteurs,
comme Gilles Réalé, qualifient volontiers de partenariat : « Notre relation
avec le client s'étale sur plusieurs mois, parfois sur plusieurs années, avec
plusieurs projets pour le même client. Nous devenons donc forcément
partenaires. Nous ne voulons pas nous enfermer dans une logique
client-prestataire, car sur ces nouveaux marchés, nous avons nous-mêmes besoin
d'un enrichissement permanent en provenance des clients. » Bruno Fontaine
partage le même avis : « Nous intervenons sur la stratégie internet, et à
travers Internet sur la stratégie globale de nos clients. Nos rapports sont
naturellement de nature partenariale. »
L'hébergement en kit séduit par ses tarifs
Des offres d'hébergement en kit destinées aux PME viennent d'apparaître sur le marché. Comme celles proposées par Via Net Works : un espace d'hébergement de site illimité, un accès internet, un nom de domaine du type "société.com" et des adresses e-mail en nombre illimité. Baptiste Lepeudry, gérant de Deauville Net Création, a choisi les solutions de Via Net « avant tout pour ses tarifs. J'étais en train de monter un site sur le terroir normand, et j'ai demandé à plusieurs banques la liste des prestataires qu'elles pouvaient me conseiller. Après avoir interrogé ces différentes entreprises sur leurs tarifs d'hébergement illimité, j'ai fini par choisir Via, grâce au rapport qualité-prix qu'ils proposaient. Nous recherchions alors une offre d'hébergement pour un site de cinq pages, mais qui pouvait être amené à grandir, et Via nous offrait cette option sans supplément de prix ». Aujourd'hui, Baptiste Lepeudry a créé sa propre agence, qui compte parmi ses clients régionaux et nationaux des entreprises d'hôtellerie, des sociétés de sécurité, des agents immobiliers, etc. Deauville Net Création travaille exclusivement avec Via Net pour les services de dépôt de nom de domaine et d'hébergement. « Si, au départ, nous les avons choisis pour leurs tarifs, aujourd'hui, nous continuons avec eux pour la qualité et la rapidité de leurs prestations. Chez eux, j'ai toujours affaire à un interlocuteur commercial unique. C'est la même chose pour le support technique, un interlocuteur unique permet un suivi plus fin du dossier. Nous utilisons aussi leur logiciel de boutique, qui permet une création très simple et avec un sup-port technique rapide par téléphone ou par e-mail. »
Les acteurs du web-marketing à la loupe
Le cabinet eMarket Stratégies vient de publier une étude sur le marché des prestataires de web-marketing : agences spécialisées, sociétés de référencement, brokers de fichiers e-mail, gestionnaires de campagnes d'e-mailing, fournisseurs de contenu, relations publiques sur Internet, régies publicitaires on line, agences de recherche en noms de domaine, etc. L'étude comprend également une analyse des techniques les plus performantes du moment, des renseignements sur les prix moyens et les pratiques sur le marché du web-marketing. « Le e-marketing est le même métier que le marketing classique, commente Denis Gustin, consultant chez eMarket. Il comprend la gestion de la relation clients, du e-mailing, des lettres d'information, des bases de données clients, l'affiliation, la publicité, le référencement, les relations publiques, le centre d'appels sur le Web. Comment faire venir du trafic, augmenter le taux de transformation, fidéliser les clients, animer le site, démarcher de nouvelles cibles ? Jusque-là, c'était fait de manière assez artisanale. Maintenant, il y a des prestataires sur ce marché, comme des brokers de fichiers e-mail, par exemple, MessageMedia. Il y a des agences Web qui montent des départements marketing. Il y a aussi des spécialistes de e-marketing qui ne font que ça, comme Ebrand, qui crée des communautés sur mesure, ou encore NetBooster, qui fait du référencement. Nous avons recensé 92 prestataires dans notre guide, et cette liste n'est pas exhaustive. » Pour en savoir plus : www.emarketnewsletter.com