[Étude] Les consommateurs français champions du boycott et du "buycott"
Une étude transnationale révèle les comportements des consommateurs français, américains, anglais et canadiens fondés sur des considérations politiques ou éthiques, à travers le boycott et le buycott et les façons dont les citoyens s'engagent.
Je m'abonneSi le vote est la principale forme de participation politique, la consommation est un autre outil puissant. Une étude transnationale de Shelley Boulianne (MacEwan University Canada), Karolina Koc-Michalska (Audencia Business School France), et Lauren Copeland (Baldwin Wallace University USA) a exploré le consumérisme politique, à travers le boycott et le buycott (acheter délibérément des produits ou services en raison des valeurs sociales ou politiques des entreprises qui les fournissent), et les façons dont les citoyens s'engagent.
D'un point de vue global, dans les quatre pays étudiés (France, Canada, Royaume-Uni et États-Unis), le boycott est aussi populaire que le buycott : 54% des répondants ont acheté ou refusé d'acheter des produits ou services sur la base des valeurs sociales ou politiques de l'entreprise. Néanmoins, les citoyens français semblent se comporter légèrement différemment des autres pays occidentaux impliqués dans l'étude.
Les Français sont n°1 du boycott et du buycott
Si le boycott et le buycott sont des pratiques populaires dans les 4 pays de l'étude, ce sont les Français qui sont les plus actifs : 59% des Français ont buycotté un produit ou service au cours des 12 derniers mois, devant le Canada (54%), suivi des USA (53%). Les Britanniques ferment la marche avec 52%. Même première place pour le boycott : 57% des Français, devant les USA (55%), suivis du Canada (53%). Les Britanniques conservent aussi leur dernière place avec 51%. Alors que la Grande-Bretagne est le seul pays où les femmes sont plus actives que les hommes dans les deux pratiques : les hommes sont davantage enclins au boycott en France (60%) et aux États-Unis (57%) que les femmes (respectivement 55% et 52%). La tendance est la même pour le buycott, avec tout de même un écart moins important entre hommes et femmes (61% d'hommes buycotters versus 56% de femmes en France, et 55% versus 52% aux États-Unis). Il est intéressant de noter qu'au Canada, les femmes et les hommes sont tout autant investis dans les pratiques de consumérisme politique.
En France, c'est 67% des 18-24 ans qui déclarent avoir boycotté un produit ou service dans l'année écoulée, suivis des 35 à 44 ans pour 64%. Mais c'est en Grande-Bretagne que les plus jeunes sont encore plus nombreux à le pratiquer (74% des 18-24 ans). Le buycott jouit d'une popularité quasi-identique dans les groupes d'âges de moins de 44 ans (63%), et décroit ensuite dans les groupes plus âgés.
Dans tous les pays également, les boycotteurs et buycotters sont majoritairement des personnes ayant fait des études supérieures (65% en France, contre 51% des personnes n'ayant pas poursuivi leurs études après le bac pour le boycott, et respectivement 67% et 52% pour le buycott).
Le rôle et l'impact des réseaux sociaux dans le boycott
L'étude démontre que dans les quatre pays, il est presque deux fois plus courant d'être invité à boycotter en ligne plutôt hors ligne (respectivement 32% des Français invités en ligne contre 18% hors ligne). Un résultat logique puisque les campagnes d'e-mailings et réseaux sociaux sont devenus des outils usuels pour ce type d'actions.
Si la population ciblée est bien la population plus diplômée (qui est en effet plus active), en revanche les 35-44 ans sont davantage invités à boycotter (40%) que les autres tranches d'âge ciblées (35% pour les 18-24 ans), alors que les résultats précédents montraient que les 18-24 ans étaient pourtant les Français les plus actifs en matière de boycott.
"L'engagement en matière de consumérisme politique est directement lié au fait d'être encouragé à effectuer une action, pointe Karolina Koc-Michalska, professeure à Audencia Business School. En moyenne, 15% des citoyens reçoivent des encouragements hors ligne et 29% en reçoivent en ligne. Cependant, la volonté de diffuser cet engagement n'est pas très forte, car seuls 9% des répondants ont déclaré avoir partagé des informations de boycott via les médias sociaux. Ces résultats sont similaires dans les quatre pays. La communication est donc davantage l'apanage des organisations incitant au boycott qu'une communication personnelle." Pour toutes ces actions en ligne, l'étude révèle une proportion plus importante d'hommes que de femmes, sauf pour la Grande-Bretagne, et de personnes plutôt jeunes dans l'ensemble des pays.
Méthodologie :
L'enquête transnationale pour examiner le consumérisme politique concernait 1 500 personnes au Canada, et la même proportion en France et au Royaume-Uni, ainsi que 1 700 personnes aux États-Unis. L'enquête a été menée à travers un panel en ligne correspondant au genre, à l'âge et à la composition éducative de chaque pays. Les données sont pondérées en fonction du genre, de l'âge et du niveau de scolarité pour tenir compte des variations entre les caractéristiques de la population et les attributs des répondants. L'étude a été inspirée, en partie, par une méta-analyse réalisée par Lauren Copeland (Baldwin Wallace University) et Shelley Boulianne (MacEwan University) sur 66 études sur le consumérisme politique.