DossierLes nouveaux enjeux de la logistique
Alors que les leaders de l'e-commerce font de la livraison un argument de conquête et de fidélisation, les acteurs du marché se mobilisent pour améliorer leur process et satisfaire leurs clients. Radioscopie d'un secteur qui monte en gamme.

Sommaire
- La rapidité, nerf de la guerre de la livraison
- Livraison ultrarapide
- Entrepôts de proximité
- Les retailers à l'épreuve de l'optimisation logistique
- Ship-from-Store
- Livraison à l'étage
- Les expressistes affûtent leurs armes
- Objectif J+1
- Outils innovants
- Les acteurs du dernier kilomètre passent au vert
- Une concurrence rude
- Les fabricants d'emballages font la chasse au gaspillage
- La fin de l'ère du vide
- Des retours soignés
- La livraison sur abonnement? Le haut du panier!
- Une formule cross-enseignes
1 La rapidité, nerf de la guerre de la livraison
En France, 88% des e-acheteurs se font livrer leurs colis à domicile ou sur leur lieu de travail, 86% en point relais, 38% en magasin (Fevad, 2018)... Ainsi, la logistique s'impose comme une clé du succès de l'e-commerce, à condition d'être flexible. Deux leitmotivs animent les acteurs du secteur: raccourcir les délais et réduire les coûts avec, en filigrane, le respect de l'environnement. "L'enjeu 2019, c'est l'omnicanal, qui exige de revisiter l'organisation des flux, d'intégrer les points de vente et de rapprocher les entrepôts des clients", affirme Jean-Michel Guarneri, président de l'Aslog. Mais, prévient-il, "définir la meilleure stratégie nécessite de trouver le bon mix entre le taux de service, d'une part, et la responsabilité environnementale et sociétale, d'autre part. Nous devrons, notamment, mener une réflexion sur la sécurité des coursiers".
2 Livraison ultrarapide
La course au délai n'a pas de limites. Les initiatives prises au cours des derniers mois en témoignent. Cdiscount teste, depuis juin 2018, On Demand, un service de livraison express en 30 minutes, mis au point par Chronopost et Stuart, qui a rejoint le Groupe La Poste en mars 2017. Six mois plus tard, Rémi Naudion, directeur transport supply chain de Cdiscount, s'en félicite: "L'enjeu permanent de Cdiscount est d'offrir un service de livraison basé sur la rapidité, la flexibilité et l'interactivité avec le client. On Demand en est la parfaite illustration, en laissant les consommateurs choisir un créneau de 30 minutes, au dernier moment, lorsqu'ils sont certains d'être chez eux. Ce système a vite remporté l'adhésion. Parmi ceux qui l'ont testé, 98% ont été satisfaits et 85% pensent renouveler l'expérience. La tendance est donc plutôt bonne". À date, Chronopost et Stuart n'ont pas déployé ce service pour d'autres enseignes, des ajustements étant nécessaires pour fluidifier l'information entre les deux partenaires.
À lire: L'e-logistique entre dans une démarche innovation
Par ailleurs, l'innovation, plutôt haut de gamme, ne convient pas à tous les modèles économiques, du moins dans sa mouture actuelle. Une autre enseigne du Groupe Casino, Franprix, s'est lancée dans la livraison ultrarapide avec la start-up Glovo. Les deux structures, qui travaillent ensemble depuis longtemps, expérimentent depuis novembre la livraison en 30 minutes à Paris et en proche banlieue. La préparation de commandes est assurée par le personnel du magasin qui remet le sac au coursier. "Depuis l'évolution de notre partenariat vers ce modèle opérationnel plus sûr et plus rapide, le nombre de commandes passées via Glovo a augmenté de 30%", commente Alexandre Nottin, responsable digital et e-commerce de Franprix.
3 Entrepôts de proximité
Dans le secteur alimentaire, Carrefour a inauguré, l'an dernier, sa nouvelle plateforme logistique e-commerce à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, destinée à alimenter ses Drive et Drive Piéton dans la capitale et en région parisienne. Un outil industriel de pointe, qui devrait être mécanisé cette année et sur lequel le distributeur compte bien s'appuyer pour gagner la bataille de l'e-commerce en centre-ville. Car la logistique porte littéralement l'expérience client et peut la transformer.
C'est pour cette raison que la place de marché de bricolage ManoMano y effectue ses premiers pas. "C'est le nerf de la guerre", lâche Christine de Wendel, directrice des opérations de l'enseigne, qui a ouvert son premier entrepôt via son partenaire Rhenus Logistics à Gretz, en Seine-et-Marne, et s'est doté d'une équipe logistique (10 personnes). "En termes d'expérience client, la tendance est positive, car plus de 90% des livraisons sont effectuées en 24 heures. Nous avons gagné un jour et demi; les marchands utilisateurs sont, eux aussi, satisfaits. Plus d'un million d'euros de volume d'affaires a déjà transité via cette offre. Les taux de transformation croissent, le taux de casse recule, l'offre monte en puissance", se réjouit Christine de Wendel. À plus long terme, ManoMano envisage d'absorber les flux logistiques de 50% des ventes. Un pari sur l'avenir.
En chiffres
- 6,8 milliards d'euros: c'est le revenu 2017 lié au colis express et hors express. Le CA des acteurs de l'express colis léger devrait progresser de 6% par an d'ici 2022 (Xerfi, 2018).
- 34% des e-acheteurs sont abonnés à un service de livraison (Fevad/CSA, 2018).
- 97% des entreprises déclarent que les modèles actuels de livraison du dernier kilomètre ne sont pas applicables durablement partout et à grande échelle (Capgemini Research Institute, 2019).
Alors que les attentes ne matière de rapidité et de réduction des coûts ne cessent de croître du côté des consommateurs, les e-commerçants multiplient les innovations au sein de leurs plateformes logistiques.
4 Les retailers à l'épreuve de l'optimisation logistique
Vu par le prisme des retailers, raccourcir les délais, c'est offrir une meilleure expérience client. En avril 2018, Fnac Darty a généralisé la livraison à J+1 des produits volumineux sur 80 % du territoire national et la totalité des références disponibles, en magasin ou sur Internet, le jour même dans les principales villes de France. Le groupe, qui a largement communiqué sur ce nouveau service à l'occasion de la Coupe du monde de football, dit avoir rencontré un grand succès auprès des consommateurs. "Il s'agit d'un projet majeur pour le groupe, qui a refondu l'ensemble de son organisation logistique afin de rendre possible cette prestation unique sur le marché français", indique un porte-parole.
À lire: Fnac Darty continue sur sa lancée
Depuis le lancement de son plan stratégique "Confiance +", Fnac Darty consacre entre 120 et 140 millions d'euros par an à la digitalisation des magasins, aux plateformes e-commerce et aux actifs logistiques. "À moyen et long terme, Fnac Darty s'est fixé pour objectif d'ouvrir sa plateforme industrielle à des tiers, en matière de logistique, de livraison ou de SAV. Il s'agit de nouer de nouveaux partenariats avec des marques vendues dans nos magasins, des marchands présents sur nos marketplaces, par exemple en assurant la livraison à domicile de produits volumineux ou en proposant le retrait dans nos magasins de produits dont nous n'assurerions pas le stockage", précise le groupe.
5 Ship-from-Store
L'optimisation logistique comme élément de différenciation, c'est aussi ce à quoi rêvent les équipes de Louis Pion, enseigne d'horlogerie, pour développer l'activité e-commerce de la marque. Avec 130 points de vente en France, Louis Pion, qui réalise 6% de son chiffre d'affaires global sur le Web -via un site e-commerce et la marketplace Galeries Lafayette- souhaite faire grimper ce taux à 10% d'ici 2020. "Les expéditions sont gérées par notre prestataire Logistique Galeries Lafayette (LGL) à partir de son entrepôt basé près de Lyon."
Depuis 2017, l'enseigne a mis en place le ship-from-store: "Les délais de livraison ont été divisés par trois. Aujourd'hui, 90% des commandes sont livrées à J+1 (contre J+2 à domicile), le magasin devient un complément de notre entrepôt", déclare Myriam Regnauld, directrice supply chain de Louis Pion. Un moyen de réconcilier le réseau physique et le digital, mais aussi d'écouler les produits éparpillés dans le réseau. "La qualité de la préparation des commandes s'est largement améliorée, car les vendeurs des magasins, formés à cette tâche, vérifient le produit", ajoute Myriam Regnauld. Seuls bémols, la gestion des commandes multiples, préparées depuis différents sites, qui engendrent l'expédition de plusieurs colis, et les réticences des centres commerciaux, qui, selon elle, ne voient pas toujours d'un bon oeil le trafic créé par l'expédition des colis. Ses prochains sujets: le web-in-store, ou catalogue élargi, et le lancement de Chrono Precise, l'offre de livraison sur rendez-vous de Chronopost.
6 Livraison à l'étage
En B to B, "les enseignes cherchent à proposer un service de livraison le plus proche possible du B to C et à apporter de la valeur aux acheteurs", affirme Grégoire Koudrine, directeur supply chain du groupe Manutan. Le spécialiste de la fourniture de bureau dispose de deux stocks centraux basés aux Pays-Bas et en France, en plus des stocks locaux installés dans différents pays, pour livrer dans toute l'Europe. Son principal enjeu? "La maîtrise des délais de livraison, répond Grégoire Koudrine, en respectant l'heure choisie par le destinataire et la précision dans le suivi colis." Manutan envisage d'aller plus loin avec la livraison à l'étage, l'organisation de rendez-vous hebdomadaires pour faciliter le travail des acheteurs, entre autres. Des projets qui nécessitent, bien sûr, une optimisation des flux et qui sont soutenus par des investissements, dans l'automatisation de la préparation de commandes, entre autres. Un nouvel axe de rentabilité.
Poids lourds ou marques plus confidentielles, commerçants du B to C et du B to B, tous se tournent vers une organisation omnicanale pour gagner en rapidité, mais également en qualité.
7 Les expressistes affûtent leurs armes
Avec plus d'un milliard d'envois selon une étude menée par Xerfi(1), le marché du colis en France, porté par l'e-commerce, continue d'exploser. Cet institut prévoit une croissance annuelle de +5% des revenus du colis hors express et de +6% des revenus du colis express léger d'ici 2022, à la faveur de la création du marché unique numérique en Europe. Mais, pour profiter de cette manne, les expressistes doivent concilier réduction des délais de livraison et services innovants à des tarifs toujours plus bas, afin de faire face à la concurrence de nouveaux entrants comme Amazon Logistics. Outre ses cinq centres de distribution (bientôt six avec l'ouverture annoncée de celui de Bretigny-sur-Orge), le meneur de l'e-commerce compte huit agences de livraison dans notre pays, destinées au dernier kilomètre et opérées par Amazon Logistics avec des partenaires du transport.
8 Objectif J+1
Aussi les investissements vont bon train. Xerfi cite le hub européen de FedEx -qui poursuit l'intégration de TNT Express- à Paris-CDG, qui devrait devenir l'un des plus avancés au monde. UPS a inauguré, en juin 2018, son premier hub routier européen à Evry. "Nous avions besoin d'un outil nouveau pour supporter la croissance de l'activité, commente Gilles Depoutot, responsable communication UPS France. Le bâtiment de plus de 30000 m2 (sur un terrain de 135000m2) est l'un des plus gros hubs routiers d'Europe, avec une capacité de tri de l'ordre de 37000 colis/heure."
"Nous avions besoin d'un outil nouveau pour supporter la croissance de l'activité", Gilles Depoutot, UPS France
La Poste a décidé d'investir 450 millions d'euros dans un programme de modernisation dédié à Colissimo pour passer à la livraison à J+1. Elle ouvre de nouvelles plateformes colis, proches des lieux de production, et adapte son outil industriel au transport de colis en vrac. Et, entre 2016 et 2020, DHL injecte 150 millions d'euros dans son réseau français, pour ses sites parisiens, lyonnais et marseillais notamment. Revers de la médaille, "les opérateurs augmenteront leur prix pour financer en partie ces investissements coûteux", prédit Nicolas Le Corre, chargé d'études senior Xerfi.
9 Outils innovants
Les expressistes peaufinent donc leurs outils et innovent. UPS France poursuit le développement d'Access Point (ex-Relais Kiala), qui totalise environ 4000 entités en France et fait évoluer son appli My Choice pour la rendre plus pratique. GLS, qui livre par transport routier, mise sur la formation des chauffeurs-livreurs de ses partenaires de transport et sur les outils -comme l'application web GLSNavigo dont ils sont équipés- pour améliorer la qualité de service, et gagner en précision et en rapidité. "900 chauffeurs-livreurs en sont pourvus. L'objectif, en 2019, est d'en équiper au moins 2000 supplémentaires, soit 80% de la flotte en France", précise Klaus Schädle, Group Area managing director GLS.
DPD cherche à répondre aux demandes intra-européennes via son offre Predict Export, un service de livraison à domicile avec possibilité de choisir le jour et le créneau horaire. "Nous nous connectons au réseau Pickup (36000 relais en Europe) pour proposer la livraison en point relais en Europe à nos e-commerçants français", indique Raoult Courtois, chef de marché e-commerce chez DPD France. Chez Chronopost, Géraldine Devillers, chef de marché e-commerce, distribution et retail, évoque "de nouvelles préoccupations en termes de flexibilité, de personnalisation des créneaux et de respect de l'environnement, avec des créneaux de livraison d'une heure, la reprogrammation et le lancement de la livraison sur rendez-vous". Des services premium... en attendant l'arrivée des robots et des drones, qui promettent de révolutionner le secteur, mais qui restent encore, pour l'heure, à l'état de projets.
(1) "Le marché du colis à l'horizon 2022 - Généralisation du J + 1, pressions sur les prix, nouveaux entrants, investissements capacitaires : quelles perspectives pour les acteurs?", Groupe Xerfi, décembre 2018.
Les prestataires investissent, augmentent leur capacité de tri et se dotent d'outils pour affiner leurs offres. Avec, en ligne de mire, la bataille des délais et celle des tarifs.
10 Les acteurs du dernier kilomètre passent au vert
Alors que 55% des consommateurs indiquent qu'ils seraient plus fidèles à une marque s'ils bénéficiaient d'une livraison en deux heures, seules 19% des entreprises proposent ce service, selon une étude réalisée par Capgemini en Europe et en Amérique du Nord(1). "Pour livrer vite et bien, il faut que le produit parte du magasin et, donc, que le point de vente se transforme en espace de stockage temporaire et de préparation de commandes automatisée", plaide Michaël Levy, CEO de Deliver.ee, start-up de coursiers professionnels et éditeur d'une solution logicielle d'automatisation des livraisons ship-from-store. S'il prêche pour sa paroisse, Michaël Levy concède que Deliver.ee élargit son modèle économique. Aujourd'hui, parmi ses ambitions, "enrichir l'offre fonctionnelle de la plateforme, développer des connecteurs avec les transporteurs de la place -250 transporteurs locaux sont déjà interfacés- et élargir cette offre à l'international". Car, sur le marché du dernier kilomètre, les start-up innovantes, qui connectent les coursiers locaux aux sites e-commerces, cherchent encore leur modèle. Stuart a été rachetée par le Groupe La Poste, tandis que Colisweb ambitionne de devenir le leader de la livraison sur mesure et d'accélérer son développement européen.
11 Une concurrence rude
Coûteux, le dernier kilomètre -comme le premier- suscite bien des convoitises. Digitalisation omniprésente, ultraconnectivité, besoin, à moindre coût, d'immédiateté, contraintes environnementales impactantes (fermeture des centres-villes...), le secteur est en pleine mutation. "En 2019, nous entrons dans une nouvelle phase, avec une stratégie autour de trois enjeux: le renforcement de notre engagement éco-responsable via le développement de la livraison à pied et à vélo et l'objectif, d'ici 2020, d'avoir une flotte de véhicules 100% éco-responsables; l'innovation avec les recherches de nos équipes sur les bénéfices que pourrait apporter l'intelligence artificielle en matière de prévision d'activité; enfin, l'affirmation de notre positionnement social par le biais de formations qualifiantes, tout en favorisant l'embauche en contrat à durée indéterminée", déclare Hervé Street, président du Groupe Star Service, l'expert français de la logistique du dernier kilomètre.
Les grands transporteurs nouent des partenariats avec des start-up pour tirer leur épingle du jeu. DHL Express, par exemple, a annoncé, à l'automne dernier, avoir conclu un partenariat avec You2You, start-up française de livraison collaborative, pour augmenter ses performances de livraison sur le dernier kilomètre dans les zones urbaines denses. La start-up lui permet de répartir son flux logistique dans des Relais urbains (RU) partenaires, espaces de stockage contractualisés par You2You et situés en coeur de ville, avant que les coursiers à vélo prennent le relais.
DPD France est présent au sein du premier Hôtel logistique urbain (HLU), inauguré à Bordeaux en avril 2018, dans la continuité de sa politique de livraison verte, et travaille en parallèle avec le groupe DPD à l'ouverture de nouveaux HLU dans les grandes agglomérations françaises. À venir, au printemps, une 58e agence DPD France Porte de La Chapelle à Paris, qui sera équipée d'une flotte GLV ou électrique.
DPD France poursuit aussi l'ouverture de drives -cinq agences équipées à date- et utilise la solution Mister Pasha en Ile-de-France pour des livraisons le soir. "Ce service est hyper innovant avec le choix du jour et de l'heure, le regroupement des commandes via une conciergerie...", commente Raoul Courtois, chef de marché e-commerce chez DPD France. De nombreuses innovations sont à l'étude: "Nous testons l'usage de la serrure connectée avec Cdiscount à Bordeaux depuis deux mois. Cdiscount prend en charge l'installation des serrures et les livreurs reçoivent un code pour entrer durant la plage horaire prédéfinie". Chronopost, de son côté, souhaite multiplier les petits dépôts, proches des clients, afin de livrer à vélo. "Les consommateurs sont sensibles à la livraison du dernier kilomètre en modes doux. Ce sera le cas à Paris avant l'été", annonce Géraldine Devillers, chef de marché e-commerce, distribution et retail. La guerre de la livraison propre est déclarée.
(1) "The Last-Mile Delivery Challenge: Giving retail and consumer product customers a superior delivery experience without hurting profitability", Capgemini Research Institut, 2019.
Sur ce segment, les grands transporteurs se rapprochent des start-up pour innover et proposer des offres aussi flexibles que douces.
12 Les fabricants d'emballages font la chasse au gaspillage
Sous la pression des internautes, qui placent la livraison au coeur de leur décision d'achat et qui se montrent de plus en plus sensibles à leur empreinte carbone, les colis montent en gamme. Exit les cartons surdimensionnés, les chips de calage en trop grand nombre! Les emballages, gros consommateurs de matière, passent au régime sec. L'année 2019 sera celle de la chasse au gaspillage.
13 La fin de l'ère du vide
"La tendance est clairement à la réduction du vide dans l'emballage, car le surcoût est énorme, en consommation de cartons, mais aussi en coûts logistiques et de transport", indique Isabelle Bion, responsable grands comptes e-commerce DS Smith Packaging. Sans compter une expérience client, parfois désastreuse. "La problématique est triple, résume Gérard Mathieu, directeur marketing et innovation de Smurfit Kappa. Nous devons aider nos clients à réduire le coût de l'emballage, à fidéliser les destinataires des colis et à maîtriser l'impact environnemental, le taux de vide impactant les trois niveaux."
Plusieurs solutions sont envisageables pour proposer des emballages à la juste dimension. La première consiste à augmenter le nombre de formats. DS Smith Packaging a mis au point un concept de table technologique Made2Fit, qui se décline en deux versions pour générer des formats adaptés: une gamme manuelle (39 combinaisons possibles) et une gamme automatisée pour les grands acteurs (14 millions de combinaisons). Les développements sont toujours en cours. "La première machine doit être installée, en mars, chez un client en France", confie Isabelle Bion.
Si ce type d'outil est efficace en termes de résultats, il demeure coûteux. "L'automatisation de la création de boîte 'on demand' est adaptée à l'emballage de produits de masse. Mais s'il s'agit de soigner l'expérience client en glissant du papier de soie autour du produit, ce n'est pas la bonne réponse", estime Gérard Mathieu. SmurfitKappa fait de l'analyse de données son cheval de bataille, et s'est doté d'outils pour détecter les priorités de ses clients et proposer la solution adéquate. "La fonction première de l'emballage est de protéger le produit durant un plan de transport parfois chaotique, avec plusieurs ruptures de charge. D'où des innovations et l'arrivée d'emballages multiproduits, capables de faire cohabiter des achats fragiles et non fragiles", explique Jean-Michel Guarneri, président de l'Aslog. Autre préoccupation, l'emballage des produits frais et le transport des bouteilles. DS Smith Packaging a sorti un catalogue dédié, fin 2018, avec plusieurs déclinaisons pour 1, 3, 6 ou 12 bouteilles. Smurfit Kappa, de son côté, a lancé ModuloPost, un carton prêt à l'emploi (décliné pour 1, 2, 3, 6 ou 12 bouteilles), ainsi que Voyageur II, un calage spécifique (carton+film) qui assure leur protection.
14 Des retours soignés
L'impact environnemental se trouve au centre des préoccupations. "Notre rôle de distributeur est de faire avancer la démarche éco-responsable, en portant ce sujet auprès de nos fournisseurs, en trouvant des alternatives aux produits les plus contestables et en proposant une offre orientée vers l'éco-responsabilité, mais aussi en expliquant à nos clients la réalité du secteur", déclare Alain Josse, directeur général délégué du groupe Raja. Pour accompagner la montée en puissance de l'activité, Raja investit dans sa logistique. Le distributeur a ainsi créé une surface spécialisée dans la gestion des petits produits, avec des allées étroites, au sein de sa plateforme basée à Roissy, et a étendu les surfaces de deux entrepôts en régions.
Enfin, la gestion des retours s'invite dans l'actualité du secteur. "La demande en seconde bande de collage afin de refermer le colis avant de le réexpédier est en augmentation", note Isabelle Bion (DS Smith Packaging). Dans la lignée des solutions durables, UPS présente un emballage innovant, réutilisable et consigné, conçu avec TerraCycle. Baptisé Loop, ce système est d'abord testé à Paris et à New York. "Ces contenants durables, personnalisés et spécifiques à chaque marque pourront être collectés, nettoyés et réutilisés pour d'autres livraisons, tout en restant beaux, présentables et efficaces", détaille Edouard Barreiro, responsable affaires publiques UPS Europe. Un emballage qui répond, lui aussi, aux enjeux de la reverse.
La nature ayant horreur du vide, les fabricants revisitent le dimensionnement des colis, les systèmes de calage et la solidité des emballages, qui doivent supporter les livraisons et les retours.
15 La livraison sur abonnement? Le haut du panier!
Suivant l'exemple d'Amazon, le champion du genre, les retailers français ont lancé des offres d'abonnement. C'est le cas de Cdiscount avec l'offre "Cdiscount à Volonté", dont la progression semble régulière, avec un taux de croissance du parc de 23% en 2018. Le pure player enrichit son offre en augmentant le nombre de références produits éligibles au programme (281000 à la fin de l'année dernière). "Plus d'une commande sur trois sur le site est passée par un membre du programme", déclare Rémi Naudion, directeur transport supply chain de Cdiscount. Mieux, "un client Cdiscount détenteur de 'Cdiscount à Volonté' achète trois fois plus en moyenne dans l'année qu'un client non adhérent au programme", ajoute-t-il.
16 Une formule cross-enseignes
Fnac Darty s'est lancé avec Fnac+ en octobre 2016 et Darty+ en octobre 2017, les programmes de fidélité du groupe qui s'appuient sur la base de 5,3 millions d'adhérents Fnac en France. "Début 2018, Fnac+ capitalisait déjà 1 million de membres dans notre pays. Le rythme de croissance des adhésions est soutenu et porté par une offre complète, qui comprend la livraison gratuite, illimitée et inter-enseignes, ainsi que des avantages liés au service assistance et après-vente, à des ventes privées et à des privilèges exclusifs avec de nombreux partenaires via le Pass Partenaires", commente un porte-parole du groupe.
"Plus d'une commande sur trois sur le site est passée par un détenteur de 'Cdiscount à Volonté'", Rémi Naudion, Cdiscount
Car ces programmes reposent sur deux piliers: faire bénéficier les adhérents de la puissance du groupe Fnac Darty en termes de services de livraison et d'assistance, en leur fournissant une expérience omnicanale, et d'une relation privilégiée avec les deux enseignes. La livraison à domicile est gratuite, illimitée et complète depuis les sites Fnac.com et Darty.com, mais aussi depuis les magasins (express, coursier, sur créneau fin), avec la livraison/installation proposée par Darty sur certaines catégories de produits (gros électroménager et grandes TV), et complétée par la livraison en magasin dans l'ensemble du réseau de magasins. Une promesse 'cross enseigne', puisque l'adhésion à un abonnement donne accès à la livraison offerte pour les achats effectués dans les deux enseignes.
Amazon, lui, élargit son offre. En septembre dernier, il a lancé une boutique virtuelle sur Amazon Prime Now, son service de livraison ultrarapide, afin de mettre à la disposition des membres Amazon Prime plus de 6000 produits sélectionnés par Monoprix, avec une livraison à l'adresse de leur choix en moins de deux heures. "Nous cherchons toujours des moyens d'apporter plus de commodités, de choix et de divertissement à nos membres Prime. Notre collaboration avec Monoprix, qui nous permet d'offrir une sélection de produits encore plus large à nos clients, en est un bon exemple", juge Amazon France. De telles initiatives inspirent La Poste, qui tente de surfer sur la vague des abonnements. Elle a lancé Colissimo Pass, un abonnement d'une valeur faciale de 9 €/an en phase de rodage (39€ après), qui donne accès à la livraison gratuite et illimitée. Ce service fonctionne à date avec une trentaine de marques et est associé à un service premium, disponible 7 jours sur 7 de 8 heures à 22 heures. Le succès de cette offre dépendra de sa capacité à attirer les grandes enseignes de l'e-commerce.
Faire souscrire aux internautes un abonnement offrant un accès illimité à la livraison... L'idée lancée par Amazon fait des émules. Le point sur une stratégie gagnante.
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