Comment Securitas Direct a maîtrisé son e-réputation
En quelques mois, l'expert de la télésurveillance est parvenu à reprendre le contrôle de son image sur le Web, passablement écornée. Une prise en main tardive mais dont pourraient s'inspirer de nombreux sites marchands.
Je m'abonne“La réputation est le plus pur des trésors”, disait Shakespeare. S'il avait vécu la révolution Internet, le dramaturge n’aurait pas dit mieux: aujourd'hui, 30% des consommateurs donnent leur avis sur Internet après achat. C'est donc tout naturellement que l'avocat Gérard Haas a cité ce vers de “Richard II”, le 18 septembre, au salon E-commerce Paris 2012. Intervenant dans une conférence sur l’e-réputation, ce spécialiste en droit de l’Internet et du e-commerce a évangélisé: “Quand vous êtes interpellés sur les réseaux sociaux, ne restez pas silencieux. Il faut répondre!”
Un précepte suivi un peu tardivement par Securitas Direct, comme l’explique Ludivine Chaumeille, sa community manager. Jusqu’au début de l’année 2012, la société spécialisée dans la sécurité, n’animait pas sa communauté et était faiblement représentée sur les réseaux sociaux. Pourtant, de nombreux messages d’internautes avaient fleuri sur la Toile, dont la publication remontait parfois à 2008. Entre temps, le portefeuille clients de Securitas Direct avait augmenté d’environ 30%. Malgré cela, sur le terrain, ses commerciaux voyaient certains de leurs rendez-vous avec des prospects annulés, ces derniers ayant lu des avis négatifs sur Internet.
Pour remédier à cette situation, Securitas Direct décide de s’entourer du cabinet Haas et de la société SOS-e-reputation. Pendant un mois, ils vont travailler ensemble sept jours sur sept afin d’évaluer, pour chacun des messages, la réaction appropriée et d'y répondre. Securitas Direct est ainsi entré en contact avec des administrateurs de blogs et de forums pour faire supprimer les messages litigieux ou obsolètes. “Quand on leur écrit avec l’appui d’un avocat, les responsables de ces sites répondent assez vite”, affirme Ludivine Chaumeille. Ce sont eux qui se chargent de la suppression des commentaires et indiquent quand un “topic” est résolu.
Subsiste un problème, soulevé par Gérard Haas: passés trois mois après une diffamation ou une injure, les faits sont prescrits mais le droit à l’oubli n’existe pas. Pour contourner la difficulté, Securitas Direct invoque le dénigrement sur les cas les plus anciens (environ 90% des messages à l’époque). Généralement, les administrateurs des sites acceptent de supprimer les termes litigieux dans les messages. Des procédures de médiation sont mises en place: la société demande aux auteurs de nombreux commentaires d’envoyer leur numéro client afin de régler des problèmes individuels et de déceler les faux avis.
Aujourd’hui, Securitas Direct est en “roue libre” pour gérer son e-réputation. Elle utilise une solution de veille de SOS-e-reputation pour être alertée lorsque la marque est citée sur Internet. “Certains de nos collaborateurs répondent eux-mêmes aux messages. C’est tout à leur honneur. Mais nous avons mis en place une charte informatique afin qu’ils ne prennent pas de risque”, explique Ludivine Chaumeille.
“Il faut être prudent dans ce que l’on dit”, approuve Gérard Haas. Et l’avocat, d’humeur décidément littéraire, de citer Victor Hugo pour montrer comment répondre aux mécontents: “Tout ce qui est excessif est insignifiant.”