Points relais vers consignes automatiques : une tendance inéluctable ?
Face aux défis logistiques et aux attentes clients, les consignes automatiques - ou lockers - s'imposent progressivement comme le nouveau standard de la livraison hors domicile. Le point sur le paysage français des points de livraison hors domicile.

Se dirige-t-on vers une domination des consignes automatiques au détriment des points relais "classiques" ? Quelques signes pourraient en effet corroborer cette tendance. Historiquement dominée par les points relais, la livraison hors domicile connaît en tout cas une transformation structurelle. Alors que la France compte plus de 37 000 relais colis - Pickup (17 000), Mondial Relay (11 000) et Relais Colis (9 000) en 2024, le modèle traditionnel montre des signes d'essoufflement.
Entre les horaires d'ouverture variables ou limités, le manque de place pour stocker les colis, la gestion chronophage, l'agacement de certains clients (ou gérants) ou encore, les fermetures définitives de commerces, les points relais physiques ne sont plus aussi fiables qu'auparavant. "Les petits commerces, souvent partenaires des réseaux de relais, rencontrent de plus en plus de difficultés à assurer ce service avec des flux croissants", confirme Katia Bourgeais Crémel, la Directrice Europe consignes colis automatiques chez Quadient.
Les conséquences sont déjà visibles : Mondial Relay a commencé à réduire son réseau physique, provoquant l'inquiétude de nombreux commerçants pour lesquels le service représentait jusqu'à 20 % de leur trafic en magasin.
Le locker, solution de la nouvelle logistique
Dans ce contexte, les consignes automatiques (lockers) séduisent par leur simplicité et leur robustesse. Accessibles 24h/24 et 7j/7, souvent situées en extérieur, sur les parkings des commerces, à proximité de lieux publics ou transports en communs elles répondent aux besoins des consommateurs modernes : flexibilité, rapidité, sécurité et zéro contact.
Quadient, acteur majeur du secteur, affirme que plus de 80 % de ses installations en Europe sont désormais en extérieur, signe d'une tendance forte. Le locker est aussi facilitant pour les transporteurs, qui peuvent livrer et collecter rapidement.
Cette évolution touche également le comportement client. Selon une étude de la Fevad, 42 % des e-acheteurs français ont déjà utilisé un point retrait automatisé, un chiffre en constante progression, en particulier chez les moins de 35 ans.
Diversité des usages et complémentarité des formats
Pour autant, la Directrice Europe consignes colis automatiques de Quadient relativise, "Le modèle ne sera pas exclusivement locker. Il y a une complémentarité entre consignes et relais physiques." Certains colis restent incompatibles avec les lockers, notamment pour des questions de taille, et une partie des consommateurs apprécie encore le contact humain.
De plus, les consignes sont aussi devenues un levier pour la "logistique inverse", autrement dit, les retours de colis, en plein essor avec le développement de plateformes comme Vinted. Avec des solutions de type "drop-off" (l'impression de ticket intégré), l'utilisateur peut retourner son colis en toute autonomie.
Un enjeu pour les commerçants... et les villes
Autre atout pour les lockers et contrairement à certaines idées reçues, ils peuvent aussi générer du trafic en magasin. "Un client qui vient retirer un colis, même de manière autonome, peut être converti en acheteur s'il est bien accueilli", note Katia Bourgeais Crémel. Encore mieux, certains commerçants vont même jusqu'à accompagner les clients dans l'usage du terminal, créant un point de contact opportun.
Pour les collectivités, ces consignes s'intègrent également dans une stratégie plus large de logistique urbaine durable. Elles permettent de réduire les échecs de livraison à domicile, responsables de surcoûts logistiques et d'émissions polluantes inutiles. D'après La Poste, une livraison sur cinq échoue en première tentative en zone urbaine, un chiffre que les consignes permettent de diviser par deux.
Quelle place pour Amazon et les géants de l'e-commerce ?
Amazon a certes développé son propre réseau de lockers - plus de 8 000 en France selon les estimations de Statista - mais n'est plus dans une dynamique d'expansion massive. Il semble en effet que le géant américain ait atteint une masse critique avec une priorité sur la livraison à domicile, surtout pour les clients Prime.
Des marketplaces comme Cdiscount ou Veepee s'appuient quant à elles sur les réseaux existants, via des partenariats avec Mondial Relay, Pickup ou Quadient, qui hébergent également des solutions pour des opérateurs comme Coyote.
En France, la livraison hors domicile représente plus de 30 % des livraisons e-commerce (Fevad, 2024), avec une croissance annuelle de +12 %. Le basculement vers des solutions plus autonomes, comme les lockers, devient un levier stratégique pour l'ensemble de la chaîne logistique : transporteurs, commerçants, e-commerçants et consommateurs. "Ce n'est pas une guerre entre lockers et points relais, mais une redéfinition complète de l'expérience de livraison", conclut Katia Bourgeais Crémel.
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