[Tribune] Quand luxe et digital se rencontrent...
Le luxe, intemporel par essence, et le digital, disruptif par nature, pourraient n'avoir rien à se dire... Pourtant, ces deux écosystèmes dialoguent et font jaillir de nouvelles tendances passionnantes. Le point avec Pascal Malotti, directeur conseil et marketing France de Valtech France.
Je m'abonne1. Luxe et codes du luxe...
C'est le premier point saillant de cette réflexion. Car finalement, on a vu émerger des nouvelles marques, ces dernières années, qui utilisent les codes du luxe, afin d'être assimilées : si elles n'ont ni l'histoire ni les clients des grandes maisons du luxe, elles utilisent leur terminologie et leurs images, mais également le soin apporté aux emballages... Autant de codes qui font aujourd'hui leur succès, en faisant de leurs clients des " happy few ", même s'ils sont des millions. On peut parler d'une forme de théâtralisation, d'une scénographie de ces enseignes, qui utilisent le digital de façon hyper intelligente. Elles se servent de sa puissance extraordinaire pour toucher le grand public, diffuser une image de marque très travaillée, et les détourner en leur faveur. Et comme toujours, c'est le parcours utilisateur qui est au coeur de cette réflexion : ces marques sont suffisamment souples et polymorphes pour savoir se positionner à des carrefours d'influence, utiliser ce qui est utile à leur travail d'image, sans abandonner ce côté " mainstream " qui est la base de leur chiffre d'affaires.
2. Tradition et modernité... une affaire d'équilibre !
C'est d'un équilibre parfait dont on parle quand deux mondes aussi différents que le luxe et le digital se confrontent. Il n'y a pas d'opposition systématique, mais de vraies questions qui se posent pour chacune des marques de luxe qui souhaite évoluer. Combien de digitalisation une marque ancienne peut-elle se permettre, quelle dose injecter dans son image et ses pratiques ? Les plus belles réussites d'hybridation sont sans doute certaines grandes maisons de couture françaises, qui, tout en gardant le cap de leur ADN, ont utilisé certains leviers forts du digital pour sortir du lot. Elles ont utilisé le côté disruptif, et parfois insolent, des armes digitales, pour adresser un nouveau public, et s'offrir une nouvelle jeunesse... Pour elles, le digital est donc un indicateur de tendances, mais elles choisissent de ne pas toutes les suivre, pour ne pas se dénaturer. Et c'est évidemment cette intelligence et cette parcimonie que nous trouvons intéressante, car il s'agit d'une vraie évolution, en profondeur, et donc pérenne.
3. Allers... et retours...
En dernier lieu, on peut également citer quelques exemples de " dé-digitalisation "... Ces marques s'étaient engouffrées dans une transformation numérique - sans doute un peu virulente - et ont finalement constaté qu'elle ne leur convenait pas. En tout cas, pas tout azimut ! Et si certaines marques sont ostensiblement restées dans leur coin ignorant toutes les opportunités apportées par le digital, d'autres ont fait le mouvement inverse... puis ont fait machine arrière encore. Parce que les choix initiaux avaient été mauvais, et qu'elles y ont perdu leur âme - ou pas loin. Si nous sommes les chantres de la digitalisation chez Valtech, il nous paraît également important d'insister sur le fait que cette transformation numérique ne doit jamais être une dénaturation de l'ADN de la marque. C'est le " jus " de l'enseigne que ses clients aiment, et s'ils sont prêts à concéder quelques transformations à leur bénéfice - ils ne veulent pas voir leur marque préférée changer de nature ou de comportement. Ensuite, et c'est sans doute le plus important, les pratiques digitales ne sont que des modus operandi, des nouveaux leviers pour atteindre de nouveaux résultats ... pas une révolution qui coupe les têtes et réinvente la roue. S'il y a transformation, elle doit se faire au bénéfice du client, de la fluidité de son parcours d'achat, de la simplicité avec laquelle il accède au produit dont il a besoin, de la personnalisation dont il bénéficie etc. Hors de ce périmètre, il n'est pas de digitalisation révolutionnaire !