Instagram, un réseau social pertinent pour les marques ?
Le réseau social dédié à l'image n'a jamais autant attiré les annonceurs. Mais est-il vraiment pertinent pour les marques ? Analyse avec Cédric Deniaud, spécialiste des réseaux sociaux.
Je m'abonneSi Instagram a une audience 10 fois inférieure à celle de Facebook (2,6 millions de visiteurs uniques contre 26 millions d'utilisateurs actifs en France), il affiche un taux d'engagement 60 fois supérieur. De quoi attirer les marques, qui n'hésitent plus à faire appel aux Instagramers influents, dont certains arrivent à se faire rémunérer leurs photographies publiées pour des opérations signées Costa Croisières, Etam ou Splendia.
Pour Cédric Deniaud, directeur conseil du cabinet The Persuaders, "Instagram a gagné en intérêt pour les marques depuis son rachat par Facebook en 2012. De plus, son audience augmente et, même si elle reste jeune, celle-ci vieillit, contrairement à Line ou Snapchat qui s'adressent aux 16-18 ans". Mais Instagram est-il un réseau social pertinent pour les marques ? "Le but des directeurs marketing est de recruter et d'avoir des inscrits. Mais Instagram ne répond pas vraiment à ces objectifs car il n'est pas possible de mettre un lien dans un post pour rediriger le trafic vers son site Web, contrairement à d'autres réseaux sociaux comme Pinterest par exemple".
Une viralité limitée
Instagram, réseau social de partage de photos, s'avère surtout intéressant pour les marques avec un univers visuel... Mais, là encore, le réseau social montre ses limites, notamment en terme de viralité : "Les utilisateurs vont liker les images publiées par la marque, mais sans logique d'amplification derrière, remarque Cédric Deniaud. La raison : le bouton pour partager la photo sur Instagram n'est pas natif dans l'application, contrairement à Tumblr ou Facebook". En effet, pour republier une photo postée par un autre utilisateur sur Instagram (le verbe usité est "regramer"), il faut passer par des applications tierces, comme Repost for Instagram ou Repost & Regram... Plus que sur les autres réseaux sociaux, les marques jouent sur un pied d'inégalité sur Instagram, où il est important d'avoir une notoriété suffisante pour tirer parti de cette viralité limitée.
Outre la visibilité directe, Instagram présente toutefois un autre avantage pour les marques : la mécanique de jeux. "Un jeu-concours sur Instagram peut être intéressant en communiquant avec un hashtag, conseille Cédric Deniaud. Des grandes marques y ont recours avec succès, comme Air France ou Samsung par exemple". Ainsi, Samsung Electronics France a organisé en février les #SamsungInstawards, concours de photographies créatives prises avec un smartphone en collaboration avec des Instagramers français. "Utiliser un hashtag dans ce type d'opération permet d'amplifier le contenu et de générer facilement de l'UGC. Cela donne un cercle vertueux en terme de contenu qui va s'amplifier".
Attention cependant à bien utiliser les mécaniques de jeu sur Instagram, "où les marques ont la fâcheuse habitude, comme sur Facebook, de conditionner la participation au jeu à l'abonnement à la page fan ou au compte de la marque", note Cédric Deniaud. C'est toujours le même problème que l'on constate. Certes, on augmente le nombre de fans et on soigne son "vanity metric", mais on ne répond pas à l'objectif d'engagement au final". Les nouveaux fans ainsi gagnés grâce au jeu-concours ne sont pas forcément de vrais "fans" de la marque, et ne viendront donc pas partager ou commenter les futures publications de celle-ci sur les réseaux sociaux.
Croiser interaction et ciblage publicitaire
Comment utiliser efficacement Instagram dans ce cas ? Par le biais du ciblage publicitaire : "Facebook, qui a racheté Instagram, travaille de plus en plus dans une logique publicitaire avec Instagram, notamment en terme de ciblage, remarque Cédric Deniaud. Un internaute américain qui like un contenu de BMW sur Instagram sera "reciblé" ensuite sur Facebook avec une publicité en fonction de son précédent like sur Instagram. Ce croisement de l'interaction et de la logique publicitaire est intéressant pour sortir des limites d'Instagram, qui ne génère pas de trafic vers le site Web des marques".
Ce rapport intelligent entre une logique d'animation, de contenu, d'engagement et une logique publicitaire s'avère donc la bonne solution pour utiliser efficacement Instagram et, à plus grande échelle, les réseaux sociaux. "La règle de l'Edge Rank sur Facebook, où il faut payer pour que son contenu soit visible, sera bientôt la même sur Twitter ou LinkedIn, prévient Cédric Deniaud. Même s'ils disent le contraire, ces réseaux sociaux, côtés en Bourse, n'ont aucun intérêt à proposer de la gratuité sur leurs plateformes. Leurs vraies forces sont les données qu'ils agrègent pour le ciblage publicitaire extrêmement fin des utilisateurs". Les directeurs marketing qui préparent leurs prochaines campagnes sur Instagram ou Facebook sont prévenus.