[Tribune] Quelle architecture pour les points de vente à l'heure du métavers ?
L'incursion des retailers au sein des mondes numériques est désormais une réalité. Si les stratégies et les mécaniques associées diffèrent selon les enseignes et les objectifs qu'elles visent, la duplication numérique du point de vente leur est chère.
Je m'abonneIl est vrai qu'édifier une boutique dans le métavers ne coûte rien, à l'exception du terrain qu'il est nécessaire d'acheter. Les contraintes de surface, d'aménagement intérieur et les budgets décoratifs n'ont plus de limites. Y édifier le flagship store idéal est alors très tentant. À condition de respecter les codes d'une architecture nouvelle, qui elle-même permettra de vivre des expériences nouvelles tenant compte des possibilités techniques offertes par les mondes numériques. Car dupliquer un magasin du monde réel dans un métavers n'a aucun intérêt, voici quelques pistes pour repenser le point de vente à l'heure des métavers.
Des techniques d'agencement vers les techniques de navigation
Attention et rétention sont dans les mondes réels comme numériques l'objet de toutes les convoitises. C'est dans cette optique que sont conçus et agencés les points de vente, avec l'obsession constante de délivrer la meilleure expérience de shopping.
Les univers numériques n'échappent pas à cette conception expérientielle à ceci près qu'elle s'applique à une navigation. Tel un voyage, cette navigation comprend un début et une fin et entre les deux, des expériences qui doivent retenir l'attention. La frayeur des architectes du numérique, qu'ils conçoivent des sites internet ou des bâtiments est de voir les utilisateurs quitter l'expérience au beau milieu de celle-ci. Un syndrome que l'on pourrait appeler bore-quit, ou la fuite causée par l'ennui et le manque de stimulation.
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Il est donc nécessaire de penser une architecture qui de tous les instants propose une stimulation. Visuelle, sonore, expérientielle ou simplement déambulatoire, cette architecture doit proposer de nouvelles manières d'interagir avec l'espace.
On distingue ainsi trois grands types d'architecture selon l'expérience désirée : L'architecture Cinétique qui plonge immédiatement le visiteur dans un univers animé et qui attire l'oeil en jouant sur les déséquilibres et le conflit entre les masses. Par exemple, l'escalier est utilisé dans les mondes dotés d'une gravité. Il est inutile dans les mondes numériques qui sont dépourvus de gravité. Les plateformes en mouvement ou la capacité de l'avatar à voler suffisent à se déplacer verticalement.
L'architecture Immersive joue sur le contemplatif et s'attache à offrir de beaux paysages et de belles constructions imaginés pour être observés, admirés et profiter pleinement de leur découverte. Autre exemple précis lié à cette architecture avec la lumière. Elle fluctue lors de la journée, du mois et des saisons. Dans les univers virtuels, il n'en est rien, la lumière et le temps ne sont que des paramètres, des options, des composants. On l'utilise donc comme un outil qui peut toucher des éléments précis ou les plonger dans le noir complet. Les possibilités sont infinies.
L'architecture du Challenge dont l'organisation spatiale favorise le jeu, les quêtes et les énigmes et s'adapte donc particulièrement aux mécaniques de play-to-earn (jouer pour gagner de l'argent).
Plusieurs typologies de points de vente
Une fois le style architectural adopté, plusieurs typologies de bâtiments sont envisageables, là encore selon la stratégie de l'enseigne. Ils ne sont d'ailleurs pas tous dédiés à la vente mais participent tous à la construction de l'expérience.
Le Store est un espace commercial à part entière. Il est le lieu de vente d'assets (les produits disponibles dans les mondes numériques) à utiliser dans l'univers numérique. Il est aussi un lieu d'évangélisation et une vitrine immersive qui doit projeter le visiteur dans l'identité expérientielle de la marque.
Le Micro-Store est un shop in shop. Autrement dit, un micro espace vitrine avec une téléportation possible vers le Store général. Il présente une série limitée d'assets, une collection privée, un lancement de produit... et agit tel un showroom exclusif. Le visiteur doit y comprendre très explicitement les valeurs véhiculées par la marque.
La Villa est un édifice privé ou semi-public. Certaines pièces sont accessibles uniquement via des accès spécifiques (des clés NFT par exemple). La villa est le lieu de réception d'une invitation adressée aux membres de la communauté, aux clients fidèles de la marque, pour y visiter son univers à 360°. On y trouvera sa collection d'oeuvres NFT au travers de parcours avec une ou plusieurs ambiances.
Le Social Hub rassemble les utilisateurs autour d'une ou plusieurs expériences de jeu en multi-joueurs. Particulièrement adapté aux expériences Play-to-earn ou Play-to-learn, il favorise les interactions sociales numériques. Des évènements de type concerts ou live twitch peuvent y être organisés.
La Fondation est le lieu d'exposition artistique public par excellence. Il donne lieu à des démonstrations de force architecturale.
La représentation et l'ergonomie des lieux où le retailer s'expose sont tout aussi importantes que ce que les visiteurs y découvriront et de quelle manière ils y seront dirigés. Rappelons-le, reproduire un espace de vente ou un showroom comparable à ce que l'on trouve dans la vie réelle n'a pas de sens. Ce serait gâcher le formidable champ d'expression qu'offrent les métavers.