DossierLes e-commerçants font leur pub
En quête de bassins d'acquisition plus puissants, les e-commerçants intègrent les grands médias dans leurs budgets publicitaires. De spots TV ou radio en campagnes d'affichage en milieu urbain, les acteurs du Web diversifient leurs achats d'espaces. Présentation.

Sommaire
- E-commerçants: quels achats médias? (1/2)
- La distribution, leader des annonceurs
- La TV pour booster l'indice de confiance
- Des bassins d'acquisition puissants
- Des résultats tangibles
- L'enjeu pour le marché: mesurer l'impact d'un spot en temps réel
- E-Commerçants, quels achats médias? (2/2)
- Le mix formats surperforme
- Le courrier ciblé: la chasse aux abandonnistes
- Une mesure toujours plus précise
- La part de voix des e-commerçants dans les grands médias (1/1)
- La part de voix des e-commerçants dans les grands médias (2/2)
1 E-commerçants: quels achats médias? (1/2)
Les e-marchands sont-ils des?annonceurs comme les autres? Pas tout à fait! Biberonnés à la culture du ROI dans un écosystème digital où les indicateurs d'optimisation règnent en maîtres, ils attendent de leurs investissements médias qu'ils soient rentables et ajustables en temps réel. Le choix d'une campagne de publicité diffusée sur un média dit "traditionnel" (TV, radio, affichage...) ne les éloigne pas de leurs objectifs premiers: de l'audience, du trafic et, donc, du clic! Face à la pression de ces nouveaux acteurs, le marché s'adapte pour proposer des plans médias adaptés à cette communauté.
"Les e-commerçants se?rendent compte que le cross-media fonctionne. Multiplier les points de contact est une stratégie gagnante", Zaïa Lamari, Kantar Media
Ainsi, des pure players en quête de notoriété et de visibilité immédiate font leur apparition en TV ou à la radio. Conquête, notoriété ou engagement, à chaque média sa spécificité et son impact, même si la tendance observée est à la complémentarité. "Les e-commerçants se?rendent compte que le cross-media fonctionne. Multiplier les points de contact est une stratégie gagnante", note Zaïa Lamari, data analyste chez Kantar Media.
2 La distribution, leader des annonceurs
Selon Kantar Media, les e-commerçants ont?dépensé 968,1?millions d'euros bruts sur l'ensemble de l'année 2017, contre 975,6?millions d'euros bruts en 2016. Les?chiffres plus récents (janvier-août?2018) indiquent une part de voix équivalente à 585,1?millions d'euros bruts, avec un trio de tête où apparaissent Amazon (77,7?millions, soit deux fois plus qu'en 2017), Vistaprint (29,1?millions d'euros) et Showroomprivé (22,9?millions d'euros). Sans surprise, le?secteur de la distribution truste la première place avec 1358?annonceurs sur un total de 4097?annonceurs, suivi de la mode (644) et de la décoration (300) (tous les résultats des investissements par secteurs et par média sont publiés page 28).
Dans le Top?10 du classement des plus gros annonceurs, la majorité a choisi le mix TV-radio pour un impact plus fort. "La?radio est privilégiée par les distributeurs pour soutenir les offres promotionnelles et les pure players choisissent la TV pour se faire connaître", précise Zaïa Lamari. À titre d'exemple, le site de bricolage ManoMano (4e?plus gros annonceur) a investi plus de 16?millions d'euros en TV sur un budget global de 22?millions d'euros (soit deux fois plus qu'en 2017).
3 La TV pour booster l'indice de confiance
Les premiers à avoir intégré la télévision dans leur plan médias sont les pionniers de l'e-commerce comme Zalando ou Sarenza. Ils ont alors investi massivement les écrans. Aujourd'hui, les chaînes accueillent de nombreux acteurs du Web, parfois peu connus du grand public, tels que JustFab, Back Market ou encore monAlbumPhoto. Grâce aux chaînes du câble et du satellite, ces petits annonceurs décrochent des tickets d'entrée abordables en télévision. Pour les régies, ce sont des clients à fort potentiel, à?qui elles proposent des offres dédiées avec leurs propres KPI's.
Chez M6, ces nouveaux annonceurs sont devenus stratégiques. La chaîne est co-leader avec TF1 auprès des e-marchands, totalisant 428?clients en 2017 pour un montant moyen d'investissement d'1,5?million d'euros bruts. "L'investissement sur le marché des e-players en TV a été multiplié par 25 en douze ans et par 8 en dix ans (Top?3 sur les secteurs du voyage, des services photos et des produits bancaires). Les indicateurs sont positifs", précise Guillaume Charles, directeur général adjoint M6 Publicité. En association avec Holimetrix, spécialisé dans la mesure de l'efficacité drive-to-Web, la?régie a d'ailleurs développé une offre, dédiée aux primo-accédants, baptisée "Step by M6", qui les accompagne dans leur première prise de parole en TV (suivi des métrics drive-to-Web, de la création publicitaire grâce à un pôle de compétences composé d'experts médias, data analysts...).
"Le mythe de la TV inaccessible n'existe plus. Pour notre première prise de parole en TV, M6 Publicité nous a proposé un accompagnement adapté à nos enjeux e-commerce et à notre budget", témoigne Raphaël Wetzel, président de So Shape, marque de compléments alimentaires.
4 Des bassins d'acquisition puissants
Pour les primo-accédants, une campagne TV s'inscrit en complément de l'achat de mots-clés. "Le référencement devient très cher sur des secteurs très concurrentiels durant certaines périodes. Les pure players s'orientent vers la TV pour générer du trafic sur le long terme et, bien sûr, pour gagner en notoriété et bénéficier de l'effet "vu à la télé", qui booste la confiance dans la marque. Surtout, la TV est un média de construction de marque, qui génère un trafic pérenne sur les sites de nos annonceurs", explique Guillaume Charles.
Même constat chez TF1. "La TV leur permet d'aller chercher des bassins d'acquisition plus puissants que le digital. Nos enjeux face à cette cible sont liés à la simplification de l'offre, à l'accessibilité et à l'accompagnement dans leur prise de parole sur ce média. Notre rôle est de leur apporter de la visibilité qualifiée", explique Dimitri Marcadé, directeur commercial chez TFI Publicité. La chaîne leur propose des paniers d'écrans spécifiques. Dès 5000?euros, un annonceur peut être présent sur LCI. "Selon nos études, le mix TNT et TF1 est encore plus efficace: un pure player verra son trafic augmenter de 44% s'il est actif sur les chaînes du groupe", assure Dimitri Marcadé.
En 2010, TF1 accueillait 50?annonceurs sur ses antennes; en 2018, ils sont plus de 300 (distribution, services, tourisme). "Nous cherchons à capter le marché dynamique de la 'long tail' et à faire venir les petits annonceurs", insiste le représentant de la chaîne. Pour décomplexer leur approche de la TV, TF1 vient de lancer la Boxe Entreprise. Cette plateforme d'échanges B?to?B s'adresse directement aux annonceurs et leur permet de simuler des campagnes en fonction de leur cible et de leur budget.
5 Des résultats tangibles
Rassurés, les annonceurs reviennent quand d'autres "jouent pour voir". Un constat partagé par les prestataires qui, en parallèle des plans médias des régies TV, analysent en profondeur le tracking des campagnes. Eux aussi ont vu les pure players évoluer au regard de leurs investissements. Au départ frileux et inquiets de ne pas avoir de résultats tangibles, ils sont devenus, au fil des ans, des annonceurs presque comme les autres. "Pour passer des paliers, ils doivent sortir de l'écosystème digital. Et ils sont étonnés des résultats obtenus grâce aux analyses et optimisations", analyse Valérie Teboul, responsable des études chez Realytics, plateforme de mesure de la performance TV.
Cette société a mené une enquête auprès de 58 de ses annonceurs représentant, entre autres, le secteur des services (25%), le tourisme (20%) et la distribution (19%). En termes d'investissements, les budgets (brut, base 30?secondes) varient de 200000?euros à?5,7?millions d'euros, avec une moyenne à 1,7?million d'euros. "Les e-commerçants sont les mieux placés pour recruter avec un point d'audience (GRP) qui génère 22?contacts directs, avec chacun un coût moyen de 25?euros. Les pure players sont nos clients historiques et disposent, depuis longtemps, d'outils d'optimisation de leurs campagnes drive-to-Web. Ils sont ainsi capables de mieux gérer et orienter leurs investissements publicitaires en TV", détaille Valérie Teboul.
Cette culture du ROI est, en effet, favorable aux e-marchands. Selon une étude basée sur les données de 150?annonceurs, la plateforme Admo.tv confirme l'impact drive-to-Web de la TV*, particulièrement pour les pure players: "En moyenne, un spot TV génère 25?visites directes sur l'environnement on?line de l'annonceur, soit en moyenne 2?fois plus que pour les annonceurs brick & mortar. Concernant les?visites par point de GRP, là aussi les performances des annonceurs pure players surpassent celles des annonceurs traditionnels, avec 116?visites/GRP en?moyenne, contre 45 visites/GRP", confirme Domitille de Saint-Exupéry, directrice marketing d'Admo.tv. Grâce à une technologie de détection en temps réel et à ses algorithmes de mesure, Admo.tv permet aux annonceurs d'obtenir des résultats sur quatre KPI's, à savoir l'audience, le business, le comportement des visiteurs et le branding.
6 L'enjeu pour le marché: mesurer l'impact d'un spot en temps réel
"Nous faisons un travail chirurgical pour proposer le meilleur mix, le plus rentable, commente François Liénart, directeur des études de My Media, agence média indépendante. Tout l'enjeu est de diffuser les spots auprès d'individus attentifs et, ainsi, de créer des occasions de contacts. Il y a des moments spéciaux en TV où le téléspectateur est plus disponible et va plus facilement quitter la consommation TV pour aller sur le digital." Il y a dix ans, l'agence a mis en place un outil analytics Leads Monitor, lequel permet de mesurer en temps réel l'impact d'un spot publicitaire sur le trafic d'un site Web. "Avec plus d'un million de spots en base?de données, nous sommes capables de?déterminer des taux moyens de transformation: sur 500 ou 600?visites générées sur un site, environ 7% à 15% vont s'inscrire et entre 1% à 5% vont acheter un?produit ou un service. Avec quelques dizaines de milliers d'euros investis, les?performances sont bonnes, y compris sur?les chaînes de la TNT", détaille François?Liénart. Pour aller encore plus loin, My Media vient de lancer le chantier Alpha (en référence au bêta de mémorisation de?Morgensztern, qui mesure l'impact mémoriel d'une campagne publicitaire), visant à identifier les chaînes où?l'attention est la plus forte. L'idée est de?mettre en adéquation l'attention et la mémorisation.
* Étude Admo.tv
Dans leur perpétuelle quête d'acquisition, les e-commerçants s'intéressent au cross media et diversifient leurs investissements.
7 E-Commerçants, quels achats médias? (2/2)
La communication extérieure permet aux e-marchands de s'afficher dans la rue. Et ils ont rapidement compris les enjeux de l'affichage urbain en termes de visibilité, de mémorisation et de proximité avec les consommateurs. Pour JC Decaux, les e-annonceurs sont en forte croissance. Le groupe propose des campagnes microlocales de 5K euros, des activations Digital Out Of Home (DOOH) ciblées à compter de 25K euros jusqu'à des campagnes nationales de couverture puissantes, variant de 300 à 800K euros selon la nature et la répétition des messages.
"Les pure players ont intégré le Top 10 de nos secteurs d'activités clients à plus forte contribution. Sur les deux dernières années, plus de 100 marques pure players nous ont fait confiance en France et, dans le monde, ces acteurs comptent parmi nos plus grands clients, explique Jean Muller, directeur général délégué commerce et développement chez JC Decaux. Ils plébiscitent la communication extérieure, car ils sont à la recherche de carrefours d'audience. Et l'espace urbain offre des jalons physiques et une proximité qui interviennent dans le parcours de mobilité des consommateurs. Nos campagnes créent des points de contacts physiques à des moments stratégiques où les consommateurs sont réceptifs."
La publicité extérieure permet ainsi de toucher une cible urbaine CSP+ active avec un taux de couverture très rapide. "Par ailleurs, nous leur proposons des activations DOOH ciblées grâce à un data planning performant", précise Jean Muller.
8 Le mix formats surperforme
Selon la dernière étude en date "Drive to Store" ** menée avec BVA pour JC Decaux, 23% des individus qui se souviennent avoir vu une campagne ont effectué une visite sur le site, l'application mobile ou le point de vente de la marque (et 31% auprès des ambassadeurs de marques), soit trois fois plus que ceux non exposés. Mieux, les campagnes avec un dispositif mix-formats performent de 19% comparées à celles mono-formats.
Autre objectif des annonceurs, déclencher des consultations sur mobile. C'est l'ambition de Betclic, annonceur chez JC Decaux: "Le média communication extérieure représente 70% de nos investissements off line en 2018. Un choix nouveau qui nous permet de nous immiscer dans le quotidien de nos clients, de plus en plus jeunes, urbains et mobiles. Nos campagnes en communication extérieure nous permettent non seulement de développer notre notoriété, mais également de déclencher du drive-to-app", témoigne Julien Fontan, responsable marketing Betclic France.
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9 Le courrier ciblé: la chasse aux abandonnistes
"Les pure players ont une culture digitale et sont habitués à des coûts d'acquisition très bas", Éric Trousset, La Poste
À la marge, l'usage du média courrier par les e-commerçants peut prendre la forme de mailing ou de catalogues, bien connus dans le secteur de la distribution (par exemple, dans le cas de l'ouverture d'une boutique physique). Cependant, le premier frein à l'usage du média courrier pour ces acteurs est lié au coût. En effet, un mailing papier coûte cher. "Les pure players ont une culture digitale et sont habitués à des coûts d'acquisition très bas. À moins d'un euro le coût de contact, un mailing n'est pas qualitatif. Or, dans le digital, l'investissement est de quelques centimes seulement", analyse Éric Trousset, directeur du développement de la BU Média du groupe La Poste.
De fait, le travail consiste à récupérer les internautes qui n'ont pas finalisé leurs achats sur le Web. "Notre stratégie avec les pure players est de leur proposer de travailler les abandonnistes en exploitant les bases de données des anciens clients, restés inactifs depuis un certain temps. Il s'avère tout à fait rentable d'aller chercher de bons clients qui ont décroché. Une des actions à privilégier est de pousser deux vagues de réactivation dans l'année avec des cartes de promotions, grâce à une segmentation intelligente de la data. Cela crée un effet de surprise chez le client ", explicite le représentant de la Poste.
C'est la méthode privilégiée par la Deutsche Post via la solution Commanders Act, qui permet à un e-marchand d'envoyer des courriers personnalisés aux visiteurs du site à l'aide de données clients anonymisées. L'internaute reçoit une brochure publicitaire avec une offre attractive l'incitant à retourner sur le site pour finaliser son achat. Selon une récente étude de la Deutsche Post (https://www.collaborativemarketingclub.com/cmc-dialogpost-studie), le taux moyen de conversion atteint 3,9%.
Autre exemple, avec Google. "En B to B, au niveau européen, nous envoyons des mailings aux créateurs d'entreprises leur proposant d'acheter des AdWords avec leur première commande", ajoute Éric Trousset. Dans des secteurs ultra-concurrentiels où l'achat de mots-clés est très élevé, notamment à certains moments de l'année, un annonceur qui a une logique de coût d'acquisition très bas devra repenser sa stratégie et faire de nouveaux arbitrages.
10 Une mesure toujours plus précise
Grâce à l'accessibilité des écrans TV, la mesure toujours plus précise de l'impact des spots auprès des internautes et l'efficacité du ciblage des médias dans leur ensemble, la prise de parole des e-commerçants dans les médias n'a pas fini de progresser. D'autant que les codes du digital infiltrent l'achat média classique. En effet, après la commercialisation des espaces display classiques, le programmatique s'attaque aux supports historiques: le print, la radio, l'affichage et la télévision. Certes, ce n'est qu'un début, mais, dans ce contexte, l'indice de performance reste plus que jamais central.
Enfin, une réforme réclamée par les chaînes de télévision dans leur lutte contre les GAFA pourrait bouleverser le régime publicitaire de la TV. Elle consiste à autoriser les secteurs interdits -le cinéma, l'édition et les opérations de promotion dans la distribution- à faire de la pub TV. Elle permettrait également la publicité segmentée, c'est-à-dire le ciblage de la publicité en fonction du foyer récepteur. Des usages déjà bien ancrés dans le monde de l'Internet. Bien implantée aux États-Unis, la TV segmentée ouvre de nouvelles perspectives aux régies et aux annonceurs.
** Étude "Drive to Store" menée avec BVA pour JC Decaux. 52050 interviews ont réalisées auprès de 300 individus interrogés par semaine sur un scope de cinq campagnes JC Decaux maximum. Au total, 16499 individus âgés de 18 à 60 ans présents sur une sélection de dix agglomérations de plus de 200000 habitants. 70 campagnes de 48 annonceurs testées.
Les acteurs digitaux n'hésitent plus à recourir à l'affichage urbain ou au média courrier pour toucher une cible plus large.
11 La part de voix des e-commerçants dans les grands médias (1/1)
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Top 150 des annonceurs du secteur e-commerce: budget investi de janvier à août 2018 versus 2017, selon Kantar Media.
12 La part de voix des e-commerçants dans les grands médias (2/2)
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Le mix media des 50 principaux annonceurs du secteur e-commerce, investissements réalisés de janvier à août 2018.
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