Numérique : le retard des entreprises françaises
Selon la dernière étude du cabinet McKinsey, les entreprises françaises tardent trop à entamer leur mutation numérique.
Je m'abonneLes entreprises françaises tardent à passer au numérique alors que cette mutation pourrait améliorer de 20 à 50 % leur résultat opérationnel ainsi qu'augmenter leur croissance et leur rentabilité. Dans son étude "Accélérer la mutation numérique des entreprises : un gisement de croissance et de compétitivité pour la France", le cabinet McKinsey pointe le retard de la France par rapport à ses homologues européens.
En France, le PIB numérique (5,5 % et représentant 113 milliards d'euros) est tiré par les consommateurs, 82 % des ménages accèdent à Internet depuis leur domicile, tandis que la contribution des entreprises affiche un retard. Par exemple, seules 14 % de ces dernières ont reçu en 2013 des commandes via Internet à titre de comparaison il est de 26 % en Allemagne et 65 % disposent d'un site Internet contre 89 % en Suède.
L'Hexagone se situe au 8e rang pour l'usage des services en ligne des pays de l'Union européenne.
Les raisons du retard français
Le cabinet d'étude McKinsey a mené une enquête auprès de 500 sociétés, dont 325 PME, durant les mois de mai et juin 2014 et a identifié 4 raisons expliquant le retard :
- des difficultés organisationnelles pour 45 % des entreprises : organisation pyramidale, fonctionnement en silos... alors que le numérique demande une approche transversale,
- un déficit de compétences numériques : 31 % des sociétés font état de réelles difficultés à embaucher des talents,
- des marges financières restreintes,
- et enfin un manque d'implication suffisamment visible des dirigeants (28 %). Le numérique n'est pas encore au coeur de la stratégie des entreprises : concurrence, innovation, etc.
Le numérique, une opportunité majeure de compétitivité
La France pourrait accroître la part du numérique dans son PIB de 100 milliards d'euros par an si les entreprises accélèrent sensiblement leur transformation numérique d'ici à 2020. L'utilisation du numérique induit que les entreprises doivent proposer à leurs clients une offre digitalisée. Les consommateurs espèrent des transactions pratiques et rapides voire instantanées, un fort degré de personnalisation, ainsi que des interactions plus riches avec les entreprises, au-delà de la simple transaction ou de la relation commerciale. Ils attendent une offre de services de e-commerce dans quasiment tous les secteurs d'activité : distribution, banque, tourisme. Les technologies numériques offrent également aux entreprises des possibilités inédites d'optimiser et d'automatiser leurs processus. Elles leur offrent l'accès à un potentiel de gains d'efficience considérables. Par exemple, la plupart des compagnies aériennes ont introduit des procédures d'auto-enregistrement en ligne sur leurs vols.
Les tendances générales
Il est essentiel pour ces dernières d'analyser et de comprendre comment les technologies numériques affectent leur environnement économique. Le cabinet McKinsey révèle cinq tendances générales :
* Le numérique accroît l'intensité concurrentielle. Dans de nombreux secteurs économiques surgissent de nouveaux acteurs qui franchissent les barrières à l'entrée sur le marché grâce à de modèles économiques de rupture,
* Multiplication des canaux de dialogue avec les consommateurs : sites marchands, drive, applications mobiles, réseaux sociaux, etc.
* Développement de nouvelles offres adaptées aux besoins des consommateurs,
* Éclairer la prise de décision et permettre son accélération,
* Automatisation d'un grand nombre de processus
Fort décalage entre les consommateurs et les entreprises
Le m-commerce s'impose progressivement : en 2014, environ 4,6 millions de Français avaient déjà acheté en ligne depuis leur mobile. Ces évolutions se généralisent désormais à l'ensemble des classes d'âge. Les 60-69 ans affichent ainsi un taux d'utilisation d'Internet de plus de 60 % (trois fois plus qu'en 2006), et les différences de taux d'achat en ligne entre générations diminuent. Aux "silver surfers" s'ajoutent les "digital mums", segments de plus en plus prisés par les services marketing.
Les usages "traditionnels" continuent de progresser : 99 % des PME utilisent désormais l'e-mail (elles n'étaient encore que 82 % en 2011) ; 88 % d'entre elles ont accès à l'Internet haut-débit (chiffre stable depuis 2011) ; 85 % ont recours au Wifi (contre 45 % en 2011) et 75 % disposent d'un Intranet (contre 43 % en 2011). Mais moins de 55 % des entreprises tirent profit d'un Extranet, et le taux d'adoption de cette fonctionnalité est, dans les PME, inférieur de 10 points à celui des grands groupes. La majorité des entreprises (53 %) s'accorde à dire que les technologies numériques leur ont permis d'améliorer leur rentabilité.
Par ailleurs, une partie seulement de la valeur créé par les activités numériques est comptabilisée dans le PIB. Il ne rend pas compte du poids croissant des canaux numériques dans les échanges B2B : 50 % des particuliers achètent ou vendent sur des sites de mise en relation de particuliers. Le commerce inter-entreprises réalisé via des sites Web ou messages EDI28 est proche de 400 milliards d'euros en France.
Des économies de 4 milliards d'euros
Les internautes économisent aussi environ 4 milliards d'euros par an via les achats réalisés sur les plateformes d'échanges entre particuliers, et génèrent près de 4 milliards d'euros de revenus annuels grâce à ces dernières (par exemple, location d'appartements via AirBnb ou Homelidays). Au total, les gains financiers directs liés à Internet en France s'élèvent à environ 20 euros par internaute et par mois.
Le cabinet McKinsey révèle que des gains de pouvoir d'achat de 3 à 5 milliards d'euros sont réalisés chaque année via le commerce B2C. Il estime également les revenus à 7,7 milliards d'euros pour les entreprises installées dans le pays (après prise en compte du taux d'épargne et du solde commercial). Ces dernières bénéficient aussi d'autres gains, notamment de productivité (7 % sur les dernières années selon une récente étude menée sur les compagnies françaises).