Qu'espérer réellement des réseaux sociaux vidéo?
Comment maximiser sa visibilité sur les réseaux sociaux? Quelles plateformes choisir alors que se multiplient les clones de TikTok? Qu'espérer en termes de SEO et comment mettre en place une stratégie de private traffic? Tour d'horizon des bonnes pratiques et des tendances émergentes.
Je m'abonneAlors qu'en 2020, les internautes français ont passé en moyenne 1h36 quotidienne sur les réseaux sociaux(1), tous médias confondus, les canaux vidéo voient leur popularité exploser. Ainsi, au quatrième trimestre 2020, les messages vidéo sur Twitter ont crû de 26,7% (2), de 4,6% sur Facebook et de 5,9% sur Instagram. Une tendance haussière également à l'oeuvre dans les coûts publicitaires: le coût par clic pour les vidéos in stream (dans le flux de contenu) de Facebook, notamment, a ainsi augmenté de 216,8% au quatrième trimestre 2020. Plus largement, les investissements publicitaires sur les médias sociaux ont progressé de 50% dans le monde, selon Socialbakers. Parmi les formats les plus populaires, aux côtés des Stories YouTube, figurent les vidéos de 15 secondes sur TikTok et leur pendant sur Instagram, baptisé Reels. "Avec Reels, Instagram se positionne en priorité sur le segment pré-achat, permettant aux marques de solidifier leurs communautés et d'étendre leur branding", explique Damien Landesmann, VP EMEA de l'éditeur Socialbakers.
L'enseigne Gémo s'est ainsi lancée sur TikTok à l'occasion des fêtes de Noël afin de fédérer un public âgé de 18 à 25 ans. Du 9 au 20 décembre 2020, le challenge #MagicNoelbyGemo, créé en partenariat avec l'agence Rosbeef ! a invité les mobinautes à "activer le mode Noël" en un claquement de doigts, sur un mix musical dédié, en compagnie des influenceurs Manon Pasquier, Fautosh, Cequenousommes, Matdeuh, Evaguessoff et Adorfamily, sur des formats de 3 à 60 secondes.
"Sur TikTok, il s'agit d'identifier les challenges et chansons qui fonctionnent le mieux [les duos dansés avec des influenceurs sont particulièrement "tendance", NDLR] car la plateforme privilégie les vidéos qui créent de l'engagement, précise Valentine Jahan, spécialiste SEO au sein de Fabernovel. La recherche y est moins sémantique que sur YouTube." En effet, YouTube, avec ses formats Story et Shorts (clone de TikTok), privilégie la catégorisation des vidéos autour de thèmes pivots. "Ce n'est pas confirmé par Google mais nous avons constaté un effet de bord [autres vidéos de la chaîne davantage mises en avant, NDLR] à chaque fois qu'une vidéo fonctionne bien, il en va de même sur Instagram et TikTok", explique Valentine Jahan. Enfin, "les facteurs hors page (nombre de vues, nombre d'interactions, de commentaires...) jouent pour 60% dans le ranking d'une vidéo sur YouTube, contre 40% pour le on page (tags, titre des vidéos...)", conclut la jeune femme. S'il est primordial de proposer des sous-titres, inutile de les intégrer à la vidéo, il convient de privilégier l'outil de sous-titrage de YouTube. La plateforme bénéficie d'une audience en croissance: les 25-49 ans passent 31 minutes quotidiennes sur YouTube (tous formats confondus), une durée qui monte à 50 minutes pour les 18-34 ans, selon Médiamétrie.
Enfin, le recours aux influenceurs se concentre sur les communautés de plus petite taille. Selon une enquête menée par Econsultancy, 60% des collaborations entre marques et influenceurs sur les réseaux sociaux en 2020 impliquaient des personnalités à la tête de nanocommunautés (moins de 50000 followers). Au quatrième trimestre 2020, les influenceurs français les plus actifs avec les marques sont Esile et Lena Situations (dont YouTube constitue le canal de prédilection) ainsi que Charlotte Bobb, davantage présente sur Instagram Reels.
Pas de SEO Google search via les réseaux sociaux
En revanche, la stratégie visant à accroître son SEO sur le moteur de recherche de Google via une production de vidéos sociales apparaît contestée. Olivier Andrieu, consultant SEO et auteur de nombreux ouvrages dédiés au référencement Google, conseille de décorréler son action SEO de sa stratégie sociale: "Les moteurs de recherche actuels n'utilisent pas les informations en provenance des réseaux sociaux dans leur algorithme, ce que Google a confirmé à maintes reprises. Ils n'y ont souvent pas accès. C'est pour cette raison que Google avait lancé Google+ mais cela n'a pas fonctionné." Pas question, donc, d'ajouter des backlinks: les liens provenant des réseaux sociaux sont en "no follow", ils ne transmettent donc rien de leur propre ranking à la page sur laquelle ils sont intégrés. L'expert juge inutile de miser sur ce canal pour optimiser la visibilité d'un site de vente. Impensable de créer un cocon sémantique via une galaxie de vidéos YouTube et Instagram Reels pour obtenir un effet bénéfique sur son SEO.
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Pourtant, selon Valentine Jahan (Fabernovel), il serait notamment possible de se positionner sur Instagram pour améliorer son ranking Google mais la pratique demeure expérimentale et n'est pas encore arrivée en France. Google effectue des tests aux États-Unis pour intégrer les vidéos TikTok, Instagram, YouTube Shorts et Trell (déclinaison indienne de TikTok) ainsi que Tangi (propriété de Google) dans un carrousel sur son application mobile. Toutefois, les résultats sont présentés au sein de la fonctionnalité "Google Discover" et non dans les résultats de recherche. L'intégration dans ces résultats devrait suivre. En France, affirme Valentine Jahan (Fabernovel), si une requête sur le moteur de recherche de Google peut mener à l'affichage de format YouTube Stories, "ce comportement demeure assez marginal".
La réponse des réseaux: le private traffic
En réponse à ces difficultés, il apparaît utile de s'inspirer des pratiques chinoises, visant à regrouper branding et social selling au sein d'un même écosystème. Ainsi, Douyin, l'homologue chinois de TikTok, intègre un store au sein de son application et permet aux marques d'animer leurs communautés de clients grâce au "private traffic". Relation privilégiée avec ces micro-communautés, cocréation de produits... Ce procédé a donné naissance en 2017 à la marque de cosmétiques Perfect Diary, rassemblant 5 millions de clients fidèles via WeChat. La marque totalisait 17000000 de followers, toutes plateformes confondues, en 2019. "De nombreuses marques de luxe, comme Prada, se sont lancées sur TikTok", signale Nicolas le Boedec (Fabernovel). La plateforme a d'ailleurs lancé sa propre monnaie, le TikTok Coin, permettant à ses communautés de fans de rémunérer les créateurs de contenu via des "tips" (pourboires donnés durant un live et visant à récompenser l'animateur de la vidéo). De même, WeChat intègre une brique de paiement afin de fluidifier l'achat in-app. Des initiatives à suivre de près pour conquérir et fidéliser les millennials et la génération Z.
Sources : (1) Global Web Index via Data Reportal (2) Étude Socialbakers, quatrième trimestre 2020
Repères
- Les consommateurs français passent en moyenne 1h36 par jour sur les réseaux sociaux, contre 2h22 pour l'ensemble de la population mondiale. (Source : Global Web Index via Data Reportal, 2020)
- Les investissements publicitaires sur les médias sociaux ont progressé de 50 % dans le monde. (Source : Socialbakers, 2020)