Les start-up studios
Les start-up studios pilotés par des entreprises constituent une tendance émergente. On a cité Axa, exemple pour l'instant assez singulier par son ampleur. Mais de nombreux grands groupes ont travaillé avec des start-up studios existants, avec des réalisations concrètes, ou ont créé le leur récemment ; nous avons évoqué dans le chapitre précédent Orange, Mobivia ou encore Total. Le start-up studio permet, sur le papier, d'allier le meilleur des deux mondes : des équipes internes très motivées et compétentes sur leur domaine, des ressources avec une expérience entrepreneuriale permettant d'aller vite en évitant les erreurs élémentaires.
C'est encore plus coûteux, mais lorsque cela fonctionne, l'entreprise dispose ainsi d'une nouvelle business unit très compétitive, dont elle est l'actionnaire majoritaire. Il faut aussi savoir gérer les cas des start-up qui ne rencontrent pas leur marché comme prévu.
Les acquisitions de start-up
Les acquisitions de start-up peuvent permettre d'augmenter le périmètre d'activité du groupe ou d'acquérir des technologies ou des talents.
Si la plupart des acquisitions ne produisent pas la valeur prévue, surtout quand la culture du groupe acquéreur n'est pas à même d'attirer les talents des sociétés acquises, elles sont nécessaires pour nourrir tout l'écosystème de l'innovation et aider les groupes à se transformer. Néanmoins, les directions financières et fusion-acquisition sont très prudentes car elles savent que ces opérations, relativement petites, sont statistiquement lentes à produire de la valeur. Lorsque ces initiatives " high risk, high reward " fonctionnent, elles permettent à l'entreprise d'arriver rapidement sur un territoire (géographique ou business) nouveau, voire d'impacter positivement toute son organisation ou redonner de l'attractivité à ses produits.
Lorsque l'acquisition n'est pas conduite correctement, l'équipe de la start-up se délitera peu à peu et le grand groupe risque de se retrouver avec un actif qu'il ne saura pas piloter et qu'il va finalement fermer ; des dizaines d'exemples en attestent. La bonne intégration des acquisitions est un savoir-faire que maîtrisent les grands leaders américains comme Google, Qualcomm, Oracle ou encore Accenture qui en font des dizaines chaque année, sur un process bien rôdé et visiblement performant. Nous avons rapidement cité les hackathons d'entreprise, qui ont été très à la mode entre 2010 et 2015.
Ces manifestations durant en général un grand week-end et visant à co-créer des nouveaux concepts permettent d'inviter des talents, étudiants ou start-up pour revisiter une thématique. Ceux qui ont des idées tentent de convaincre les autres de les rejoindre... et ils rejoindront d'autres équipes s'ils ne convainquent personne. On va ainsi travailler nuit et jour sur des concepts qui seront primés par un jury à la fin. Si on constate statistiquement que l'entreprise a bien du mal à capitaliser sur les réalisations, cela crée des rencontres et plante des graines, en termes de méthodes et de solutions potentielles à des problématiques données.
Il n'est pas rare que des hackathons débouchent sur des projets d'intrapreneuriat, mais leur impact est plus anecdotique que les dispositifs précédents. Par ailleurs, de nombreux grands groupes créent des dispositifs de Labs, de façon à réaliser des tests avec des start-up : on citera le Lab Postal, qui crée des expérimentations à partir de collaborations des équipes de La Poste avec de nombreuses start-up, ou encore Suez qui a lancé des dizaines d'expérimentations avec des start-up1, ou encore le Lab SFR. Ces dispositifs sont peu coûteux mais ils mettent potentiellement longtemps à produire de la valeur visible par les actionnaires.
Selon leur configuration, ils peuvent contribuer à construire une culture d'ouverture dans chaque entreprise et permettre de très vite comprendre le potentiel des technologies testées ainsi que le potentiel de collaboration avec l'équipe de la start-up lors de constructions d'expérimentations, qui sont généralement payées à la start-up pour un montant symbolique. Ce type d'initiative " low cost, high reward " pour l'entreprise devient un incontournable des dispositifs d'innovation.
Parfois ce sont des " espaces " à vocations multiples : par exemple WeLab d'Altran, Lab qui réalise de l'incubation interne, accueille des événements divers et incarne la démarche innovante de l'entreprise, ou l'iLab d'Air Liquide, ou encore Léonard, un espace innovant ouvert par Vinci en 2017. Les organisations aiment lancer des concours de start-up, plus ou moins primés, qui leur permettent de repérer quelques jeunes pousses intéressantes, de faire un peu d'animation en interne, pour un prix très raisonnable. On citera ceux de EY2 ou La Poste qui sont parmi les plus anciens. Les grandes entreprises créent aussi des start-up en interne, gérées par des collaborateurs. C'est ce que l'on appelle l'intrapreneuriat.
Ces dispositifs relèvent de l'open innovation, concept popularisé par Henry Chesbrough. Il suppose notamment la culture de l'acceptation de l'échec. Ces stratégies d'open innovation peuvent se heurter à des réflexes internes de " not invented here " de la part des équipes, c'est-à-dire de rejet des innovations " pas inventées ici ", mais il est indéniable qu'elles ont donné lieu à de belles réalisations partout dans lemonde. Elles ont permis à des groupes à la culture historiquement très fermée et secrète, comme par exemple Michelin, de mieux sourcer les innovations de leur univers. Ce groupe a développé dans les dixdernières années une démarche exemplaire et en a tiré les bénéfices.
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