Tendances décryptées par... Duke
Grâce à la réalité augmentée, le processus d'achat des biens et des services est en plein bouleversement. Voici quelques exemples.
Le premier modèle élaboré pour penser le commerce en ligne divisait les enseignes en trois catégories: les «brick & mortar», les entreprises virtuelles et les «click & mortar». Cette vision est définitivement dépassée. Lieu physique et boutique en ligne ne sont plus les deux seules dimensions à articuler . L'émergence de la réalité augmentée et du virtuel augmenté vient bousculer tous les anciens repères et brouille les frontières. Nouveaux lieux, nouveaux dispositifs de paiement, nouvelles monnaies, le shopping est en pleine mutation.
Tout d'abord, les produits sont disponibles à la fois au magasin et à la boutique en ligne. Homeplus, en Corée du Sud, en a fait la démonstration en affichant ses rayonnages dans le métro. Les temps de pause, d'attente et de transport sont optimisés et le shopping s'insère naturellement dans les parcours des consommateurs. On constate en effet que le monde virtuel peut être augmenté par le monde physique, le rapport entre les deux dimensions n'est pas unilatéral. En concevant KinectShop, une cabine d'essayage digitale avec réalité augmentée, Duke Razorfi sh / Emerging Labs multiplie les possibilités d'essayage en dépassant les limites imposées par les rayonnages, les tailles et les stocks. La séance de shopping sur le Web n'est plus un acte individuel. En parallèle, le digital poursuit sa transformation du modèle de commerce physique. Ainsi, Pay with a tweet, qui n'était au départ qu'une opération éphémère, est devenu un système de paiement générique vendu à de nombreuses industries. Ainsi, la médiatisation s'est transformée en une monnaie d'échange et les réseaux personnels ont acquis une valeur concrète. Le service Bitcoin va jusqu'à générer une monnaie virtuelle permettant de payer en ligne. Les utilisateurs peuvent gagner des crédits en échange du partage de ressources informatiques. De son côté, PayPal utilise la monnaie traditionnelle mais a l'intention de révolutionner les modes de paiement, notamment grâce au mobile. La technologie NFC , entre autres, devrait permettre à la marque de proposer ses services à l'ensemble des points de vente physiques. Parmi leurs futures innovations: scan de codes-barres et recherche de produits similaires, transfert d'argent entre smartphones, promotion hyperlocale et paiement par mobile sans passer par la caisse. Le shopping n'a plus de frontières. Reste maintenant aux marques à faire preuve d'imagination.
CREER DE NOUVEAUX PRODUITS EN COLLABORATION AVEC SES CLIENTS
L'explosion du social media a conduit les marques à explorer les territoires de la cocréation. Ces pratiques illustrent le tournant pris par ces dernières: elles doivent désormais ouvrir leur modèle.
Depuis des années, Danette lance ses nouveaux produits en faisant voter les internautes pour leur recette préférée. De même, Starbucks utilise les suggestions de ses consommateurs sur son site My Starbucks Idea pour améliorer ses produits et ses services. Des plateformes comme Kickstarter financent et réalisent parfois des innovations conçues par des consommateurs. Mais c'est la marque Lego qui s'engage le plus clairement dans la voie de la collaboration. Avec son service Design by Me, Lego donnait les moyens aux internautes de dessiner un jouet et de se faire livrer les pièces correspondantes afin de le réaliser. De plus, avec le lancement de Cuusoo, on constate que la marque s'approprie le modèle My Major Company. Si l'internaute récolte suffisamment de soutien de la part de la communauté pour son projet, le jouet est fabriqué et le créateur perçoit 1 % de royalties sur les ventes. Lego passe d'un service personnalisé au partage total de son modèle marketing: les internautes maîtrisent les produits et partagent les bénéfices. Le «tryvertising» a le vent en poupe et les boutiques de prototypes se multiplient partout dans le monde. A l'instar de la stratégie de Tcho avec son «beta chocolate», les marques cherchent à récolter des insights, tout en développant une relation de confiance et un sentiment de proximité qui motive les consommateurs à «vendre» leurs capacités de création.
Stéphane Guerry, directeur général de Duke Razorfish
Contact: contact@duke-razorfish.com
QUAND L'E-COMMERCE S'HUMANISE
Les internautes ont compris l'intérêt de se mettre en réseau pour échanger des connaissances, des compétences, des objets et des idées. Un excellent moyen de faire partager ses passions.
Aujourd'hui, ces microréseaux solidaires ont fait des émules dans le commerce classique. Les internautes sont plus que jamais en quête de liens humains lors de leur processus d'achat. Dans cette veine, Super Marmite donne la possibilité, à ceux qui n ont pas le temps de cuisiner, de se procurer des plats faits maison, sains et peu chers.
La valeur ajoutée du service réside dans le fait que l on achète son plat à son voisin. Outre l'aspect pratique, c'est la relation humaine qui séduit les consommateurs . Dans la même veine AaramShop est un site d'achat de produits alimentaires en Inde. Contrairement au modèle habituel, les produits ne viennent pas de la grande distribution mais du commerce de proximité. L'internaute choisit sur le site l'épicerie (photos de l'épicier et de son commerce à l'appui) à qui il souhaite envoyer sa commande. Ses produits ne seront pas livrés par une grande firme impersonnelle mais par le commerçant de son quartier. Ce que propose le couple de blogueurs de Turntable Kitchen répond également à ce besoin de relations sociales. Pour 25 dollars, leurs abonnés reçoivent chaque mois un colis contenant une playlist musicale et des produits alimentaires permettant de créer un repas qui associe parfaitement ambiance musicale et nourriture. Le site ne propose pas seulement un système de recommandation, il permet également de partager une expérience sensorielle et gustative . Les objets ne sont plus seulement définis par leur prix, ils portent des valeurs, insufflent des émotions, créent des liens et donnent au commerce un supplément d'âme.