Offres groupées: les précautions à prendre
Fin 2008, les professionnels du Web ont multiplié les offres proposant un produit gratuit lors de l'achat d'un autre. Mais celles-ci ne peuvent être mises en place que dans le respect de dispositions réglementaires bien déterminées.
Je m'abonneBrigitte Misse, avocat auprès de la Cour d'appel de Paris
En cette période de crise économique, les professionnels d'Internet n'ont pas hésité, fin 2008, à proposer des offres groupées, avec deux produits pour le prix d'un. Ce principe de vente, s'il n'est pas nouveau, innove de par son caractère spectaculaire: offre d'une voiture ou d'un vélomoteur pour l'achat d'un appartement ou d'un baladeur pour une télévision.
Ces nouveaux Pères Noël du Web se sont peut-être aventurés sur ce terrain sans, auparavant, s'être plongés dans les codes de la consommation et du commerce. En effet, de telles méthodes commerciales, si on ne les examine que du côté consommation, ne peuvent être mises en place que sous réserve du respect de dispositions concernant notamment les ventes groupées ou avec prime. Des dispositions qui ont d'ores et déjà été appliquées par les tribunaux pour des offres tout à fait similaires.
Les ventes groupées
Lors de la mise en place d'une offre groupée, la première contrainte concerne les dispositions sur les ventes liées. Egalement appelées «ventes jumelées», elles sont interdites par le code de la consommation. Les infractions à cette interdiction exposent leurs auteurs à des sanctions pénales, telles que des amendes de 1 500 euros (jusqu'à 3 000 euros en cas de récidive).
Le montant de l'amende est, en plus, multiplié par le nombre d'infractions constatées. Une sanction fréquemment prononcée, puisque les concurrents des annonceurs d'offres groupées et la DGCCRF n'hésitent pas à saisir les tribunaux.
En effet, il est interdit d'imposer au consommateur l'achat d'une quantité obligée ou la prestation d'un autre service. S'agissant des offres de Noël 2008, la question se pose de savoir si elles sont susceptibles d'être qualifiées de ventes jumelées.
En règle générale, trois activités distinctes sont appréhendées sous le vocable «ventes jumelées»: les ventes conditionnelles, les ventes par lots et les ventes par quantités imposées. Concernant des ventes conditionnelles, ont été sanctionnées, par exemple, l'offre d'une garantie protection juridique étendue à toute personne souhaitant bénéficier d'une garantie responsabilité civile, celle d'un petit déjeuner inclus dans le prix d'une chambre d'hôtel... La vente par lots peut être tolérée lorsque cette offre concerne le même produit que celui devant être acheté à titre principal ou bien un produit complémentaire (yaourts présentés dans un même conditionnement, ménagères, séries de casseroles...).
D'autres exceptions existent pour les ventes jumelées, elles sont en effet admises dans les cas où les consommateurs ont la possibilité d'acheter séparément chacun des produits proposés. Toutefois, des conditions de forme s'appliquent, puisqu'il convient de respecter les dispositions afférentes à la présentation des prix et, notamment, des réductions. En outre, le consommateur doit être clairement informé sans être induit en erreur ni manquer d'informations sur les prix pratiqués avant l'offre groupée.
«De telles offres ne peuvent être mises en place que sous réserve du respect de dispositions concernant notamment les ventes groupées ou avec prime.»
Les ventes à prime
Est qualifiée de vente à prime toute «vente ou offre de vente de produits ou de biens ou de toute prestation ou offre de prestations de services faite aux consommateurs et donnant droit à titre gratuit, immédiatement ou à terme, à une prime consistant en produits, biens ou services, sauf s'ils sont identiques à ceux qui font l'objet de la vente ou de la prestation». Il est habituel de considérer que l'offre de cadeaux, à l'occasion d'une offre de vente ou de services, destinée à un consommateur, est une vente à prime, qu'elle soit immédiate ou ultérieure, du moment que le consommateur peut en bénéficier. Il a ainsi déjà été jugé que l'offre d'un cyclomoteur pour tout achat d'une automobile, celle d'un appareil jetable pour l'achat de pellicules photographiques, ou encore l'offre d'un voyage, d'une cheminée ou d'un portail à des acheteurs de biens immobiliers étaient interdites.
En cela, les juges ont fait une interprétation stricte des dispositions du code de la consommation, dont le non-respect entraîne, là encore, des sanctions pénales. Il s'agit, comme pour les ventes liées, d'amendes de l'ordre de 1 500 euros par infraction constatée et de 3 000 euros en cas de récidive.
Bien sûr, il existe des exceptions à cette interdiction de prime, puisqu'il reste toujours possible d'offrir des objets ou services indispensables ou de même nature que ceux faisant l'objet de la vente principale, ou bien de menus objets dont la valeur est calculée de manière particulièrement stricte et sous réserve qu'ils soient marqués de manière indélébile.
Proposer des offres couplées n'est donc pas impossible. Néanmoins, les professionnels du marketing sur le Web devront, de la même manière que leurs confrères du marketing off line, examiner leur faisabilité, mais également leur présentation avant de se lancer dans des offres aussi spectaculaires.