Mener une campagne d'e-mailing marketing efficace
Ses détracteurs le disent condamné depuis des années, pourtant l'e-mail marketing demeure un outil de tout premier ordre, tant qu'un certain nombre de règles techniques et déontologiques sont bien respectées.
Je m'abonneLES POINTS-CLES
1. Cibler les destinataires
«L'arrosage systématique est définitivement révolu. Nous sommes entrés dans l'ère de la frappe chirurgicale», affirme Xavier Delanglade, actuel directeur général de TheBluePill. En effet, que vous envisagiez une campagne de conquête, de fidélisation ou de réactivation, vous ne vous adresserez pas aux destinataires de vos messages de la même façon.
Pour adapter le contenu de l'offre, sa formulation, sa mise en forme, mais aussi pour définir les objectifs de la campagne (notamment en termes de ROI), il convient de cibler les envois. Pour cela, la segmentation de la base de données et la création de profils spécifiques, réellement en phase avec votre offre sont des prérequis indispensables. « La performance d'une campagne d'e-mails marketing repose à 70% sur la qualité de la base de données et la pertinence de la segmentation», explique Luc Lepelletier pour Altavia (société spécialisée dans la communication) .
2. Optimiser la délivrabilité
Si vous souhaitez que votre e-mail marketing soit efficace, il faut déjà qu'il arrive à destination, sans être intercepté par les filtres anti-spam. Les fournisseurs d'accès internet (FAI) et les gestionnaires de webmails gèrent des listes blanches d'expéditeurs autorisés. Pour y figurer, il faut se faire «référencer» en tant qu'expéditeur légitime auprès des FAI et gestionnaires de webmails, ce qui est valable pour les annonceurs importants et utilisateurs réguliers du média mail, mais plus délicat pour un acteur modeste. Dans ce cas, il faudra choisir de router ses e-mailings via un prestataire spécialisé dans la diffusion et la gestion des campagnes d'e-mails marketing. Les filtres anti-spam se fondent aussi sur l'analyse du contenu des e-mails. Il convient donc d'optimiser le contenu visible et de veiller à la conformité du code utilisé. «Il ne faut surtout pas concevoir ses messages en UTF-8 par exemple (NDLR: format de codage des caractères conçu pour être compatible avec de nombreux logiciels initialement prévus pour traiter des caractères codés sur un seul octet), car les accents sont alors très mal gérés», précise Antoine de Lasteyrie, de l'agence FullSIX. L'objet lui-même doit être travaillé avec attention. Pour Mélanie Sourdeau, directrice de clientèle de l'agence Caribou, «les majuscules, les répétitions, ou un chiffre en début d'objet, garantissent presque l'interception par les filtres antispam». La conception du message influe sur sa délivrabilité: veillez à l'équilibre texte et images et n'hésitez pas à «doubler» les e-mails en HTML par une version texte, en vous assurant d'une bonne qualité d'intégration HTML. La réputation aussi est déterminante. «La qualité des adresses reste capitale. Trop de NPAI nuisent à l'expéditeur. Vous devez gérer rapidement les désinscriptions pour éviter que trop de plaintes ne mettent les FAI en alerte», conclut Luc Lepelletier, directeur conseil au sein d'Altavia Paris.
3. Multiplier les call-to-action
Lors de la composition du message, il faut indiquer clairement au destinataire les éléments sur lesquels il peut cliquer pour accéder à une page de commande, ou à davantage d'informations, c'est ce qu'on appelle des «call-to -action». « On oublie souvent de bien positionner les call-to-action, explique Nicolas Oyarbide, de LSF Interactive. On doit implémenter des boutons dès le milieu de l'e-mail, en bas ou à droite de chaque offre. Sans ces call-to-action, on peut manquer les objectifs fixés et l'on risque de générer des désinscriptions. » Mais si proposer à l'internaute des moyens d'interagir avec vous est indispensable, il faut aussi, lors de la conception du message, répondre à des impératifs simples. Selon Luc Lepelletier: «La structure de l'e-mail a nécessairement un impact sur le résultat de la campagne. Le message majeur doit obligatoirement figurer en haut de l'e-mail, puis on déroule le message sur les informations à caractère secondaire, mais, dans tous les cas, il faut intégrer un maximum de liens cliquables si l'on souhaite optimiser le taux de clics. »
4. Définir des indicateurs-clés
Il existe un certain nombre d'indicateurs classiques et bien connus: le taux de délivrabilité, le taux d'ouverture et le taux de clics. Pour aller plus loin dans l'analyse de vos campagnes et tirer les meilleurs enseignements en fonction des profils tirés de la segmentation de la base, on peut considérer le taux cliqueur / ouvreur pour mesurer la pertinence de votre offre, et calculer le taux d'actifs / inactifs sur les trois dernières campagnes que vous aurez menées. « Cela vous permet de définir la nécessité de lancer une campagne de réactivation ou des campagnes spécifiques », explique Eve Catrix, directrice marketing pour CheetahMail. Une fois l'e-mailing réalisé, en tenant compte des objectifs préalablement fixés, on s'intéressera aux données transactionnelles (taux d'achat, etc.). « Il est vraiment impératif de se donner tous les moyens techniques pour mesurer l'impact de l'e-mail, mais aussi de consacrer les moyens humains nécessaires à l'analyse pour en tirer les bons enseignements », continue Eve Catrix.
ETUDE DE CAS
Les abandonnistes à la loupe
Intermarché s'est inscrit depuis plusieurs années dans une stratégie d'e-mail marketing très aboutie. Catalina Marketing est l'agence qui a été chargée de la refonte du programme fidélité de l'enseigne.
Lorsqu'un consommateur reçoit, dans sa boîte aux lettres physique, le catalogue d'un distributeur, il est informé des promotions qui lui sont proposées sur environ 200 produits. « Or, on sait, explique William Faivre, directeur général de Catalina Marketing, que seuls 3 % des produits vont intéresser le client final. C'est pourquoi nous avons mis en place des modèles d'analyse du comportement d'achat. » Le système repose sur la carte de fidélité. Les quelque 8 millions de porteurs de cette carte ont indiqué spontanément leur adresse e-mail. « En étudiant les produits qu'ils consomment régulièrement, nous avons la possibilité, via la newsletter, de ne leur proposer que les produits qui vont les intéresser », continue William Faivre. Avec un taux de clic supérieur à 40 % en moyenne, l'e-mail marketing d'Intermarché est également un outil pour lutter contre les abandonnistes. « Lorsque nous constatons qu'un client espace ses visites, nous pouvons lui demander les raisons de cette désaffection et lui faire des offres ciblées», précise William Faivre. Ces méthodes de la grande distribution sont déclinables pour les sites marchands qui disposent d'informations sur leurs clients, souvent trop peu exploitées... »
CONSEILS D'EXPERTS
Raphaël Savy, directeur général d'eCircle France.
« Le point le plus crucial en matière d'e-mailing est de comprendre que chaque campagne enrichit la suivante, car l'on parvient peu à peu à affiner le moindre détail. L'adaptation est le maître-mot de l'e-mailing, car ce n'est pas parce qu'une règle a fonctionné à un instant T qu'elle fonctionnera toujours! »
Antoine de Lasteyrie, directeur général de FullSIX
« Il faut considérer que l'e-mail marketing rassemble de multiples petits leviers qu'il faut pouvoir actionner avec finesse. Tout ou presque est important, depuis le nom de l'expéditeur, en passant par la longueur de l'objet, le moment de l'envoi et le rapport texte/image au coeur même du message. Il ne faut rien laisser au hasard pour mettre au point la bonne combinaison. La moindre erreur peut entraîner une interception par les filtres anti-spam des internautes ou des webmails et, dès lors, la réputation de l'émetteur du message peut être entachée pour de longues semaines. »
William Faivre, p-dg de Catalina Marketing
« L'erreur à ne pas commettre consiste à penser que «more is more»... Parfois, on voit certains annonceurs qui, par crainte d'échouer, font dans la surenchère en misant sur de grandes quantités de promotions, mais je ne pense pas que ce soit forcément la bonne stratégie... Ce qu'il faut toujours garder à l'esprit que pour savoir quoi dire, il faut savoir à qui le dire... »
ETUDE DE CAS
Auchan Drive: des e-mailings façon «haute couture»
En s'appuyant sur une mise à jour quotidienne de ses bases de données, le site internet Auchan Drive parvient à proposer à ses clients, via l'e-mail, des produits ciblés, qui leur correspondent vraiment.
Avec près d'une quarantaine d'Auchan Drive disponibles sur l'ensemble du territoire, le groupe de distribution dispose d'une force de frappe située à la convergence de la boutique virtuelle et de la boutique réelle. Pour interagir avec sa clientèle, Auchan Drive mise beaucoup sur l'e-mailing. Prospection, conversion, réactivation, le groupe s'appuie sur une segmentation très précise de ses bases de données qui rassemblent environ 500 000 clients actifs. La clé du succès, c'est la sous-segmentation qui permet de proposer, aux destinataires, des offres ultra-ciblées, établies sur les habitudes de consommation du client. Les bases de données, mises à jour quotidiennement, permettent un travail extrêmement précis. Fanny Mille, chef de publicité au sein de l'Agence Caribou chargée des campagnes e-mailing d'Auchan Drive explique: « La fréquence des envois et le contenu de l'offre font l'objet d'analyses approfondies. Auchan Drive propose des produits de consommation courante, il faut savoir entretenir le lien sans saturer et surtout s'appuyer sur des offres qui apportent une valeur ajoutée au consommateur. » Au-delà du catalogue Auchan, disponible dans son intégralité sur Auchan Drive, des offres dédiées Drive (cadeaux, petits-déjeuners, etc.), contribuent à entretenir le lien de proximité avec les clients.
ETUDE DE CAS
L'e-mail marketing a toujours la cote
Le consommateur sait parfaitement faire la différence entre du spam et des e-mails marketing susceptibles de l'intéresser C'est en tout cas ce que révèle l'étude »E-mail marketing attitude» (EMA), publiée par la Commission E-marketing du SNCD. Il apparaît ainsi que 78 % des personnes interrogées préfèrent recevoir des offres commerciales directement via leur boîte aux lettres électronique, alors qu'elles ne sont que 2 % à préférer une annonce sur le mur de la marque via Facebook. Elles sont par ailleurs 37 % à suivre l'actualité d'une marque, d'un site ou d'un service en s'inscrivant à la newsletter! Reste cependant que l'internaute se révèle assez vigilant sur la pression commerciale qu'il mesure au rythme d'envoi des messages. L'étude démontre ainsi que le rythme d'envoi hebdomadaire est le plus adapté et que 63 % des sondés se désabonnent d'une newsletter s'ils reçoivent des offres trop fréquemment. En 2010, ils n'étaient que 53 % à le faire... Parmi les nombreux enseignements que l'on peut tirer de cette étude, on retiendra particulièrement les raisons qui poussent l'internaute à ouvrir un e-mail. Sur 1 301 personnes interrogées, 39 % déclarent que le fait d'identifier l'expéditeur est une incitation forte à ouvrir le message, et 32 % sont sensibles à l'objet du message. Seules 10 % répondent qu'une promotion représente une incitation forte à ouvrir le message et 5 % considèrent la présence d'un jeu-concours comme une raison suffisante pour ouvrir l'e-mail.
CONSEILS D'EXPERTS
Didier Kotlar, directeur commercial Caribou
« Le meilleur état d'esprit pour mettre au point des campagnes d'e-mails marketing efficaces, c'est l'ouverture! Nous conseillons à nos clients de procéder par «test and learn». Nous définissons des échantillons représentatifs au sein des bases de données et nous faisons des envois tests pour mesurer les retours. Nous pouvons ainsi essayer plusieurs objets ou créations graphiques pour finalement effectuer l'envoi en masse d'un message aussi affiné que possible. »
Nicolas Oyarbide, directeur du département eCRM, LSF Interactive
« La question de la cible arrive bien souvent trop tard dans les préoccupations des annonceurs alors que cela devrait être la première interrogation. Ce n'est qu'une fois qu'on connaît la cible que l'on peut travailler à la conception du contenu et à l'angle d'attaque. Pour y parvenir, il faut enregistrer les centres d'intérêt des clients en s'appuyant sur des informations comportementales. »
Eve Catrix, directrice marketing CheetahMail
« L'e-mail est un média qui permet à un annonceur de rester connecté en temps réel avec sa cible. Cela implique le respect des bonnes pratiques pour optimiser la délivrabilité en respectant les critères des FAI, mais aussi l'application des règles déontologiques en s'appuyant sur des bases opt-in! »