Les places de marché n'échap pent pas aux lois de l'e-achat
Adulées un temps, les places de marché sont aujourd'hui décriées. Avant de les ranger trop vite dans le tiroir des fausses bonnes idées, laissons la parole à leurs clients. Les acheteurs professionnels les considèrent comme des outils, non révolutionnaires, mais complémentaires de leurs autres stratégies d'achat électronique. Explications.
Je m'abonne
Révolution à long terme ou phénomène éphémère, quel est le futur des places
de marché ? L'année dernière, tous les experts leur prédisaient un avenir
assuré et les présentaient comme les nouvelles galaxies des échanges marchands
B to B. Aujourd'hui, le discours s'est inversé. Pointées du doigt, les places
de marché ont été reléguées au statut d'étoiles filantes, destinées à
disparaître rapidement. Loin des vagues et des modes du milieu internet, les
clients de ces nouveaux opérateurs, les acheteurs professionnels, mènent une
réflexion plus large, sur l'ensemble des solutions d'achat électronique. Les
entreprises n'ont pas attendu l'arrivée de l'Internet pour rationaliser leurs
achats. Avec le développement de la sous-traitance, les services achats ont
pris du galon. On estime en effet que les achats chez les grands comptes pèsent
entre 40 et 60 % dans le chiffre d'affaires de la société. Autant dire que
l'acheteur professionnel est devenu un allié de poids en interne aussi bien
pour influer sur les coûts globaux de l'entreprise que pour agir très en amont,
dès la conception des produits en intervenant dans le choix des fournisseurs
les plus stratégiques. Acheter ne signifie plus seulement acquérir un bien ou
une matière première à un prix négocié. On achète désormais autant la
prestation du fournisseur, sa logistique, sa capacité à suivre le produit, la
nature de l'emballage, les certificats de qualité. Auparavant simple exécutant,
pousseur des commandes issues des différents services de l'entreprise,
l'acheteur a peu à peu rejoint le cercle des décisionnaires de l'entreprise. De
véritables politiques d'achat centralisées ont été mises en place, avec un
double objectif : améliorer les échanges entre le service d'acheteurs
professionnels et ses "clients internes" tout salarié qui a besoin d'être
approvisionné de produits ou services - et réduire les coûts d'achats globaux.
Pourtant la fonction achat est très jeune. Il y a dix ans, une seule formation
aux achats était disponible en France. Aujourd'hui, on en recense entre 700 et
800, mais il reste difficile encore de chiffrer, en France, le nombre
d'acheteurs professionnels. La plus importante des associations
professionnelles, la CDAF, la Compagnie des Dirigeants d'Approvisionnement et
Acheteurs de France, compte plus de 3 000 membres. L'utilisation des nouvelles
technologies dans la gestion des achats et des approvisionnements s'est
développée dans les années 90 avec l'EDI (Echange de données informatisé)
utilisant le Minitel pour passer des commandes aux fournisseurs et la connexion
à un réseau EDI pour la gestion des approvisionnements. Puis, au cours de la
décennie, les outils et solutions se sont perfectionnés avec l'arrivée
d'Internet, des catalogues électroniques et des web marchands. Lorsque les
grands groupes ont fait le ménage dans leurs achats, les résultats ont
rapidement suivi.
L'e-procurement générateur d'économies
Entre 1993 et 1998, IBM a entièrement réorganisé sa
fonction Achat et a créé en interne un outil d'e-procurement. Finies les
commandes directes par téléphone des salariés qui ne laissaient aucune trace.
Au centre de fabrication de matériels informatiques de Greenock en Ecosse, les
résultats ont été spectaculaires : le cycle d'établissement de contrats est
passé de six mois à trente jours, la fuite de fournisseurs de 30 % à 0,3 %, le
taux de satisfaction de 40 % à 95 % ... Au niveau mondial, en 2000,
l'e-procurement chez Big Blue aurait généré 376 millions de dollars
d'économies. Pour les professionnels de l'achat, l'arrivée du Web a tout de
suite bouleversé l'accès à l'information. « L'acheteur est un aiguilleur
d'informations, qui travaille à la vitesse de l'électron, définit David
Lahille, qui cumule quinze ans d'expérience dans les achats, aujourd'hui chargé
de mission auprès de l'EIPM, centre de formations à l'achat. Son challenge
aujourd'hui est simple : avoir accès aux bons tuyaux ! » Les places de marché
font-elles partie des tuyaux indispensables à l'acheteur d'aujourd'hui ? « Les
places de marché, au sens large du terme, sont pour nous incontournables. On ne
s'en rend peut-être pas encore compte aujourd'hui. Mais à terme, il y aura
certainement un risque de se couper du marché des fournisseurs », commente
François Girard, président de la CDAF, et également directeur des achats
matières premières chez Rhodia. La palette des relations électroniques
acheteur/vendeur ne se cantonne pas aux places de marché. Au sens strict du
terme, la place de marché met en relation plusieurs acheteurs et plusieurs
fournisseurs. Différents types de services se sont positionnés : les
plates-formes d'e-achat publiques ou fermées - fréquentées seulement par un
nombre restreint d'acteurs ; les places de marché généralistes, qui regroupent
des fournisseurs de produits et services hors production, ainsi que les
spécialistes, qui se concentrent sur un marché comme le bâtiment ou un segment
précis comme les services télécoms. Mais l'acheteur peut aussi utiliser
d'autres méthodes : la simple commande sur le site d'un fournisseur, la
connexion directe du catalogue fournisseur à son propre système d'informations
ou le développement d'un Extranet achats, sur lequel ses prestataires viennent
se greffer. Autant de possibilités qui assurent indéniablement l'avenir de
l'e-achat, dont les places de marché font partie. « Il ne faut pas se tromper
de débat, met en garde François Girard. Nous n'assistons pas à une révolution
en matière de méthode d'achats. S'il y a révolution, elle est informatique. »
Christophe Villenave, chef de projet au sein de l'EIPM, s'étonne des
contradictions des entreprises pour lesquelles il intervient : « Pas loin de 70
% des entreprises déclarent qu'elles ont une stratégie e-business, mais 50 %
d'entre elles seulement ont défini une stratégie par rapport à leur système
d'informations. Les deux sont pourtant fortement liées ! »
Les emplettes de luxe des grands comptes
Le choix du bon canal d'achat
électronique en fonction du segment visé et des spécificités du marché couvert
(cf. encadré) est au coeur des débats, particulièrement au sein des grandes
entreprises. Flavien Kulawik dirige K-Buy, société de services spécialisée en
achat et en approvisionnement, qui dispose d'une équipe de 50 acheteurs et
réalisera cette année pour le compte de ses clients près de 1,5 milliard
d'euros d'achats. « Aujourd'hui, les NTIC ont un impact sur toute la démarche
achat : du marketing achat au suivi du fournisseur, explique-t-il. Selon les
étapes de la chaîne achat, les impacts sur les coûts sont différents ; ils
peuvent porter sur les coûts d'achats, on parle alors d'e-purchasing, ou sur
les coûts administratifs, c'est l'e-procurement. Les grandes entreprises sont
très intéressées par l'e-purchasing qui va accélérer la dynamique
concurrentielle, par une enchère, par exemple, sur une famille d'achat donnée.
L'e-procurement intéresse tout autant les services achats car il libère du
temps pour les acheteurs. Mais sa mise en place est lourde et dépend de
multiples liens vers les applications de l'entreprise. » La mise en oeuvre
d'une solution d'e-procurement est en effet devenue très complexe. Elle
implique de nombreuses étapes : interfaçage avec les applications existantes
comme l'ERP ou le système de facturation, paramétrages, création de workflows,
interconnexion avec les systèmes des clients et des fournisseurs. Elle comprend
autant des outils de gestion de contenu, comme les catalogues produits ou les
guides d'achat qu'une plate-forme transactionnelle intégrant la gestion des
commandes ou des appels d'offres et des services supplémentaires de type
disponibilité des produits, suivi des commandes et des fournisseurs. Et bien
sûr cela se chiffre : l'achat d'une solution d'e-procurement atteint vite le
million de francs, montant qui peut se décupler selon le niveau de
développement et de conseils nécessaires à sa mise en oeuvre. Le développement
d'une place de marché privative complète peut se chiffrer à plus de 10 millions
de francs. Les grands comptes peuvent ainsi accéder à une série d'outils, plus
ou moins perfectionnés, choisis en fonction de leurs stratégies d'achats.
L'Intranet, par exemple, est investi par les services achats afin d'agir sur
l'amélioration des processus internes. « L'Intranet nous permet de faciliter la
communication interne sur la fonction achat, de faire valoir nos outils, nos
procédures, nos missions », confirme Thierry Trimbach, directeur des achats du
Crédit Commercial de France, qui totalise un volume d'achats de 1,9 MdF.
L'Intranet "achats" du CCF, baptisé Intr@chat, comprend, par exemple, la liste
de tous les fournisseurs ainsi que des modèles de contrats avec la check-list
des points à ne pas oublier lors d'une négociation. En 2002, le CCF compte
développer des fonctionnalités d'e-procurement à destination de 6 500
utilisateurs pour certaines catégories de produits catalogués et négociés, avec
un système de commande et de confirmation en ligne, et des indications sur la
disponibilité ou la livraison, le tout associé à un système de facturation
unique. L'e-achat, pour améliorer les méthodes internes, c'est également le
choix opéré par Spie Batignolles, l'un des principaux acteurs du BTP. Ses
achats représentent un milliard de francs pour un chiffre d'affaires de 5,3
MdF. Ses 300 chefs de chantiers passaient leurs commandes de béton et de
matériels chacun de leur côté. La mise en place d'un magasin virtuel sur
Intranet il y a trois ans, dont le catalogue présente plusieurs milliers de
références, a permis de simplifier la gestion des approvisionnements en
impliquant davantage les responsables opérationnels. Progressivement, les
fournisseurs traditionnels de Spie Batignolles se sont adaptés à ces nouvelles
formes d'achat. Au sein du groupe de chimie de spécialités Rhodia, la stratégie
d'e-achat se décline. En premier lieu, la société fait partie des 22
industriels fondateurs du système d'échanges électroniques standardisés
Elemica. « Il ne s'agit pas d'une place de marché, mais plutôt de l'EDI
amélioré, explique François Girard. Cela permet d'être en connexion directe
avec les fournisseurs, d'avoir accès aux informations de leur système de
gestion afin de fluidifier les échanges. » Rhodia fait également partie de la
place de marché privée KeyMRO, créée avec Thomson Multimédia, Schneider
Electric et Usinor, destinée à l'achat de biens et services hors production.
Enfin, l'entreprise teste régulièrement des places de marché publiques
spécialisées. « Nous faisons de la veille sur les systèmes d'enchères en ligne,
par exemple. Nous avons testé Chemconnect, une grande place de marché dédiée
aux produits chimiques. Cela peut s'avérer intéressant mais pour l'instant, il
n'y a pas encore assez d'acteurs présents. »
Les PME en mal de stratégie
Si les grands groupes disposent de véritables politiques
d'achat, les PME, marché pourtant visé au départ par nombre de places de marché
généralistes, s'avèrent bien moins averties. De plus, l'Internet n'est pas
encore entré dans toutes les cultures d'entreprises. « Dans les petites
entreprises, on ne trouve pratiquement pas d'acheteurs professionnels ou de
services achats, particulièrement au dessous d'une centaine d'employés. C'est
le patron qui gère les achats. Que les places de marché permettent ainsi aux
PME d'avoir accès à un service achat externalisé, c'est pour moi aujourd'hui du
domaine du rêve. Les meilleures offres fournisseurs se signent autour d'un bon
déjeuner », lance David Lahille. En théorie, la valeur ajoutée de la place de
marché ouverte, destinée aux achats hors production est particulièrement
intéressante : centraliser les processus internes, aligner tous les
utilisateurs, acheteurs professionnels ou non, sur les mêmes méthodes de
fonctionnement ou contrôler les dépenses globales. Une étude menée par Kearney
Interactive pour la place de marché Avisium au début de l'année 2001 estime que
les achats, hors production, représentent en France un marché de 800 milliards
de francs, dont plus de la moitié pour les PME. En termes de poids, ce type
d'achat représente en moyenne 8,5 % du chiffre d'affaires des entreprises, un
chiffre légèrement en hausse dans le cas des PME. Si les places de marché
généralistes constituent certainement pour les PME un levier de réduction des
coûts d'achats hors production, la théorie ne rejoint pas encore la pratique.
La place de marché Mondus a mené avec l'institut IDC une étude en juin 2001
auprès de 200 entreprises de 10 à 500 salariés. L'échantillon ne regroupe que
des PME/PMI averties, qui disposent d'une connexion internet et qui ont déjà
pratiqué les achats hors production sur le Web ou qui ont l'intention de le
pratiquer. Pour celles qui ont testé l'achat en ligne, 71 % ont utilisé
directement le site du fournisseur, 20 % ont testé les places de marché dédiées
aux achats hors production, 9 % ont commandé sur un site de commerce
électronique spécialisé, et 7 % sur un site marchand généraliste. « Le principe
des places de marché généralistes pour les PME est séduisant. Mais les besoins
des PME s'avèrent très hétérogènes, met en garde Christophe Villenave. Je
croirais à l'idée d'un service achat en ligne pour les PME quand, chez les
opérateurs de places de marché, on trouvera 20 acheteurs professionnels
capables de couvrir correctement tous les segments visés. » Tandis que les
grands comptes peuvent influer sur le développement de l'e-achat, soit en tant
qu'initiateurs de places de marché privatives, soit en tant que participants
aux systèmes d'interconnexions avec leurs fournisseurs, les PME disposent d'une
moindre marge de manoeuvre, financière et technologique, et se tournent vers
les places de marché publiques. Et les critiques fusent. « Certaines places de
marché proposent de la valeur ajoutée comme le sourcing - la recherche de
fournisseurs qualifiés. Mais, lorsqu'on creuse un peu, on s'aperçoit qu'elles
n'apportent guère plus que l'achat d'un annuaire de fournisseurs de type
Kompass ou Europages », indique Flavien Kulawik. L'avis de Christophe Villenave
est également réservé : « Nous avons fait des tests lors d'un stage de
formation qui s'est avéré plutôt catastrophique. Certaines places de marché
indiquaient qu'elles disposaient d'experts capables de vous trouver le meilleur
fournisseur. Le problème, c'est que le marché fournisseur dès le départ était
mal identifié : ils se basaient, par exemple, sur une recherche auprès de 10
fournisseurs alors que le marché en question comportait 40 acteurs ! »
Place de marché : un parcours du combattant ?
Sébastien
Fresneau, manager chez Valoris, a mené son étude personnelle sur les places de
marché pendant le premier trimestre 2001. Sa conclusion est sans appel : «
L'erreur de nombre d'opérateurs a été d'analyser superficiellement les besoins
de leurs clients et de plaquer un business modèle américain à un projet
français. Seuls dans certains domaines spécialisés, la place de marché peut
fonctionner rapidement, là où il y a une vraie demande et une logique de mise
en relation. » Dans le cas des places de marchés dédiées aux achats hors
productions, les acteurs comme Hubwoo, Avisium, Seliance, Achatpro, Answork ou
Mondus, se disputent les moyens et grands comptes, pour lesquels ils proposent
le plus souvent la mise en place de plates-formes privatives. Leur pérennité va
désormais dépendre de leur capacité financière à tenir la barre jusqu'à ce que
la demande se développe. Car tous ces acteurs vont également devoir faire face
à plusieurs types d'embûches. Tout d'abord, la réaction émotionnelle des
acheteurs. « Les acheteurs ont eu peur d'être remplacés par des machines,
remarque François Girard. C'était le même type de crainte à laquelle on a pu
assister aux débuts de l'informatique. Cependant, une vraie remise en cause
s'opère dans les services achats : la différenciation entre acheteurs peut
effectivement se faire entre ceux qui savent utiliser les outils électroniques
et les autres. » Les craintes des acheteurs sont particulièrement justifiées
dans les entreprises où les approvisionnements et les achats sont séparés : les
outils d'e-procurement suppriment les tâches de gestion administrative. Si des
blocages internes peuvent apparaître, les entreprises sont pourtant bien plus
positives. « Les salariés ont peur surtout de voir disparaître leur fonction
d'acheteur, qu'ils ont parfois mis du temps à imposer. Mais les entreprises
sont plutôt curieuses par rapport aux places de marché », remarque Christophe
Villenave. Aux Etats-Unis, l'e-achat s'est imposé. Selon une étude publiée
cette année par l'association professionnelle NAPM, National Association of
Purchasing Management, et l'institut Forrester Research, 71 % des compagnies
américaines ont utilisé des méthodes d'e-procurement, et 20 % des sondées ont
acheté des produits ou des services par des enchères en ligne. Il reste
cependant un autre obstacle de taille auquel devront faire face les places de
marchés. Le principal souci est de maîtriser les échanges de données qui vont
se multiplier entre les différents acteurs : clients, fournisseurs,
institutions financières, assureurs et administrations publiques. Et,
contrairement à l'EDI - format technique et de communication qui avait été
adopté au niveau international -, il n'existe pas encore de normes liant les
différentes solutions entre elles. A défaut de s'entendre sur des standards
techniques, chaque éditeur de solution, tels Commerce One ou Arriba, a mijoté
sa propre cuisine. Dans beaucoup de cas, ce sont les fournisseurs qui vont
devoir adapter leur système informatique et leurs références aux formats de
catalogue en ligne de leurs gros clients. Et, sans norme reconnue, il va leur
falloir jongler avec les multiples standards, en sachant que la description
d'un produit sera différente selon le point de vue du fabricant ou du
distributeur. D'où l'intérêt grandissant des professionnels pour le langage XML
et ses multiples possibilités de description pour des documents électroniques.
Les places de marché gagnantes seront bien celles qui auront su écouter les
acheteurs, collant à leurs attentes en termes d'outils, mais aussi celles qui
sauront faciliter la tâche des fournisseurs... A moins d'avoir inventé une
alternative à l'adage : il faut être deux pour faire du business.
Thalès joue sur tous les fronts de l'e-achat
Ex-Thomson CSF, spécialiste des technologies de défense et d'aéronautique, Thalès - 65 000 collaborateurs, 4 MdF d'achats annuels - est souvent citée dans les forums spécialisés de la filière Achats comme un modèle du genre. Le directeur des achats, Jean Potage, et l'équipe technique de Thalès ont en effet bâti un système complet de place de marché privée qui agit sur tous les fronts. Il comprend quatre outils : un portail intranet pour communiquer autour du marketing achats, un "buyerless portal" ou portail d'achats par lequel les salariés depuis deux ans passent leurs ordres, un portail destiné aux acheteurs pour commander un produit hors catalogue, et enfin un système de paiement en ligne via carte bancaire actuellement en test. Le but : rationaliser l'acte d'achat, préparer les gens à une solution d'e-procurement et réaliser 200 MF d'économies annuelles. D'ores et déjà, le système propose 400 contrats et 800 fournisseurs principaux référencés ainsi que onze catalogues en ligne accessibles depuis 22 sites dans le monde. « Paradoxalement, vu l'avancement de ces différents outils, nous avons voulu un minimum de technologies pour un maximum de connaissances achats. Ces outils sont faits pour faciliter le travail des acheteurs », clame Patrick Gatellier, responsable technique de ce gros projet. Après les composants et les fournitures de bureaux, la version 2 s'attaquera aux consommables informatiques et aux emballages carton, deux gros postes d'économies potentielles.
Interview
Philippe Nieuwbourg (AEDPM) : « Pour les PME, les places de marché sont une opportunité à saisir » Philippe Nieuwbourg préside l'AEDPM, l'Association européenne des places de marché, créée en janvier 2001 et qui compte aujourd'hui 25 membres. Le concept de place de marché est souvent remis en cause aujourd'hui. Quelle est votre perception du secteur ? Aujourd'hui, il est certain qu'aucune place de marché n'a atteint sa vitesse de croisière. Il est trop tôt encore pour tirer des bilans. D'ici cinq à dix ans, on pourra commencer à y voir plus clair, car la réduction des acteurs va logiquement se poursuivre. J'estime que d'ici 2008, on ne trouvera en moyenne pas plus de cinq acteurs par pays et par secteur d'activité.
Pour les grands comptes, le développement des places de marché constitue une évolution technologique. Qu'en est-il des PME ?
Pour les PME, la valeur ajoutée est double : faire baisser les coûts d'achats et améliorer les processus internes. On rencontre peu de services achats dans les PME qui travaillent en général avec quelques fournisseurs. Les places de marché peuvent être une bonne alternative à un service achat.
Vous voulez dire que c'est un moyen pour les PME d'externaliser leur service achat ?
La place de marché ne va pas forcément remplacer l'acheteur existant, elle va plutôt s'imposer comme un nouvel outil pour l'acheteur futur. Ceci dit, pour les PME ne disposant pas d'acheteurs, je crois tout à fait à l'externalisation des achats. Les forces de vente supplétives existent bien, pourquoi pas les forces d'achat ? On peut facilement concevoir la mise en place d'un réseau d'acheteurs, comme on mettrait en place un réseau de distributeurs.
Qu'en est-il de la valeur ajoutée pour les grandes entreprises ?
Les grands comptes sont sur des stratégies globales un peu différentes, ils disposent déjà d'outils d'e-procurement interne. La valeur ajoutée se situe moins sur la comparaison des fournisseurs ou sur la baisse des prix d'achat. Par contre, les systèmes d'enchères peuvent être très intéressants pour eux.
Beaucoup de critiques à propos des places de marché portent sur le faible nombre d'acheteurs et de fournisseurs inscrits. Que craignent ces acteurs ?
Les entreprises expriment des craintes en termes de garantie et de sécurité, elles veulent surtout être assurées de la confidentialité de leurs données et informations. Nous travaillons au sein de l'association à l'élaboration d'une charte de qualité.