La logistique : la clé du succès
Tout le monde en est convaincu : c'est la façon de préparer et de livrer les commandes qui fera la différence. Reste à en faire la démonstration.
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Jamais, on n'avait autant parlé de logistique. Dans les états-majors des
cybermarchés, le mot est sur toutes les lèvres. En effet, rien ne sert d'avoir
un site dernier cri si l'on n'est pas capable de répondre à la demande et
d'assurer les livraisons en temps et en heure. Pour bien se rendre compte qu'il
s'agit d'un problème à gérer au quotidien, il suffit de se rendre dans son
cybermarché. Chez Telemarket, par exemple, on prévient le consommateur qu'"en
raison de l'afflux de clients, certaines tranches horaires de livraison peuvent
être saturées". C'est un peu contrariant surtout si la tranche horaire en
question est justement celle que l'on avait choisie ! Allons maintenant sur
www.c-mescourses.com. Là, on découvre que plusieurs produits sont
indisponibles. C'est un réel désagrément pour ceux qui voulaient reproduire à
l'identique leurs courses en hyper. « La non-disponibilité d'un produit est
très mal perçue, confirme Paul-Emile Cadilhac, le directeur du pôle conseil de
la web agency Business Lab. Pour tous les cybermarchés, le risque est le même :
celui de brûler ses clients. »
Un problème inhérent à la distribution
Conscients de cette réalité, les cybermarchés ont
fait de gros efforts ces derniers mois sur la logistique. Pour mesurer leurs
performances, il faut tout d'abord les comparer à celles des autres acteurs du
commerce en ligne. Or, selon une enquête d'Andersen Consulting, seulement 12 %
des commandes effectuées en France sont livrées à la date prévue. Pour nos
cybermarchés, ce pourcentage est infiniment supérieur, même si l'on ne dispose
pas de statistiques précises sur le sujet. « Les cybermarchés sont en pointe
dans le commerce électronique, explique Alain Borri, codirigeant de Team on
line, une société spécialisée dans les systèmes d'informations e-logistique. Ce
sont des gens qui maîtrisent leur logistique, c'est un avantage par rapport à
ceux qui font appel à des transporteurs. » Livrer le client dans les meilleures
conditions, c'est d'ailleurs devenu le leitmotiv des cybermarchés. La plupart
d'entre eux se sont dotés de flottes de camionnettes spécialement équipées avec
des compartiments spéciaux pour les produits frais. Des efforts ont également
été faits au niveau des emballages afin, par exemple, de séparer les produits
selon leur destination (cuisine, salle de bains...). Pour satisfaire le client,
on s'efforce également de lui proposer un rendez-vous dans une tranche de deux
heures (ou bien une heure pour C-mescourses), généralement 24 heures, voire 48
heures après sa commande. Bien entendu, certains ont cherché à raccourcir au
maximum ce délai en livrant dans la journée. Cependant, C-mescour ses a dû
faire marche arrière en juillet dernier car cela induisait des coûts trop
élevés. « Livrer dans les deux heures, c'est possible mais cela génère beaucoup
de risques, c'est un véritable exercice d'équilibriste », ajoute Hervé Cohen,
le directeur général adjoint de Telemarket.
Créer l'accoutumance aux services
Que faire donc pour se démarquer de la concurrence ?
Pourquoi ne pas baisser le prix des livraisons, généralement facturées entre 45
et 79 francs, voire d'instaurer leur gratuité ? Tout est possible dans ce
domaine mais attention aux surenchères suicidaires quand on sait que le coût
réel d'une livraison tourne en moyenne autour de 60 à 90 francs. Selon Alain
Borri, la différence peut se faire sur de petits services comme, par exemple,
le tracking qui permet au client de suivre sa commande. « Des messages du type
"votre commande a bien été préparée, elle est mise dans notre véhicule de
livraison" sont très utiles pour le client. Et à terme, on pourra même recevoir
ces informations sur son téléphone portable. » « En matière de services, il ne
faut toutefois pas trop promettre, prévient Paul-Emile Cadilhac. Il y a en
effet une sorte d'accoutumance du consommateur. Et demain, on demandera
peut-être au livreur de venir ranger les courses ! » Aujourd'hui, les
cybermarchés ont donc plus intérêt à investir dans leur organisation interne.
Depuis leur lancement, le grand débat était de savoir s'il fallait
s'approvisionner dans ses propres magasins (technique du picking) ou utiliser
des entrepôts spécialement conçus pour la distribution en ligne. Alors que
Ooshop et C-mescourses sont des partisans du picking ou de formules mixtes,
Houra et Telemarket ont choisi la solution de l'entrepôt qui convient mieux aux
livraisons de masse dans les grandes agglomérations. Le 1er mars dernier,
Telemarket a d'ailleurs inauguré une toute nouvelle plate-forme logistique à
Pantin. L'entrepôt est vaste (15 000 m2), entièrement mécanisé et doit
permettre, à terme, de préparer 7 500 livraisons par jour. Coût de
l'investissement : 50 MF. Chez Houra, les capacités de traitement des commandes
se sont vite révélées insuffisantes. A la fin 2000, on ne pouvait satisfaire
que 1 000 clients par jour et l'entreprise a dû mettre les bouchées doubles
pour "industrialiser le processus de préparation des commandes". Préparer le
maximum de colis en un minimum de temps. Et si c'était d'ailleurs la recette du
succès pour les cybermarchés ?