Il y a sur le Web un besoin d'assistance qui est latent
Le besoin d'assistance des internautes sur le Web est beaucoup plus fort qu'on veut bien le croire. Webhelp entend leur apporter le confort de navigation nécessaire pour entretenir une relation de qualité avec les annonceurs, comme l'explique son directeur général et cofondateur.
Je m'abonneWebhelp a bouclé en juillet dernier un second tour de table de 70 millions de francs. Que va vous apporter cette nouvelle manne financière ?
Les deux nouveaux actionnaires qui nous ont rejoint - Turenne
Capital et Avenir Finance - nous apportent leur expertise dans la gestion de
l'entreprise, un réseau relationnel et des introductions dans un certain nombre
de grands comptes pour placer nos offres de GRC pour les professionnels. Mais
surtout, grâce à cette opération, nous possédons une visibilité à long terme,
ce qui, dans la conjoncture actuelle, est un vrai luxe.
Comment vous est venue l'idée de créer Webhelp ?
A partir d'un constat
simple. Nous avons remarqué que les outils de recherche sur Internet sont de
moins en moins performants alors qu'il y a 7 millions de pages web qui
s'ajoutent tous les jours. De plus, il arrive aujourd'hui sur Internet une
population plus féminine et davantage senior qui ne sait pas manier ces outils.
Il y avait donc un besoin d'assistance qui était latent.
Quelle a été l'évolution de Webhelp depuis un an ?
Nous avons connu une
croissance saine, et nous avons été capables d'installer véritablement la
marque. Nous avons créé deux centres de production, l'un à Bucarest en
Roumanie, qui emploie 150 opérateurs, et l'autre à l'Ile Maurice, composés de
50 opérateurs. Nous possédons depuis quelques mois une filiale en Allemagne, et
travaillons avec 20 clients professionnels. Par conséquent, le métier est bien
ancré.
Qui supervise la bonne marche de vos deux web call centers ?
Nous avons monté une joint venture dans ces deux pays avec des
sociétés roumaine et mauricienne et des entrepreneurs locaux qui coachent
véritablement l'activité au jour le jour. Nous sommes leur client, et nous
vérifions que ces sociétés travaillent en conformité avec les méthodes et la
charte déontologique que nous avons mise au point avec Webhelp aux Etats-Unis,
et tiennent compte du code du travail en vigueur dans leur pays.
Pourquoi avoir choisi ces deux pays ?
Parce que tout y
est neuf et forcément moins cher. Nous avons construit nous-mêmes les centres
qui hébergent nos opérateurs en y investissant un million d'euros. Dans notre
métier, nous avons un souci de disponibilité totale et de sécurité maximum pour
nos clients. Internet est un réseau qui est fragile, et si la bande passante
tombe entre la Roumanie et la France, il fallait absolument que l'on ait un
back up qui puisse "switcher" le trafic sur Maurice, et inversement.
Combien vous fait gagner le fait d'externaliser votre activité de web call center ?
Sur l'équipement, pas grand chose, car le
matériel est occidental, le routeur Cisco est au même prix là-bas qu'en France,
idem pour les PC... A l'exploitation, en revanche, beaucoup plus. A deux
niveaux : le premier sur les salaires. Nous avons une politique salariale
locale qui est extrêmement généreuse puisque nous payons les gens en gros 50 %
de plus que la moyenne nationale locale, alors que dans les call centers en
France, c'est plutôt 15 à 20 % de moins. Et de ce fait, nous avons une
attractivité du métier qui est plus forte. Ensuite, nous avons un turn-over
nettement plus faible et les coûts de formation sont limités. Ces économies
mises bout à bout, nous proposons ainsi une prestation deux fois moins coûteuse
que nos concurrents.
La levée de fonds de cet été doit aussi vous permettre d'accélérer votre développement en Allemagne.
Nous avons
effectivement pour le moment une filiale commerciale de moins de dix personnes
placée sous la houlette de l'ancien vice-président de Telagate, un des premiers
groupes de call centers allemands. Elle a récemment signé un premier contrat
avec GMX, le Caramail allemand, pour un programme d'e-mail management, et a
lancé le moteur de recherche de Webhelp il y a quatre mois. Sa mission est de
conquérir le marché outre-Rhin avec des offres similaires aux nôtres et de
profiter de la taille du marché allemand qui pèse en gros plus de deux fois le
marché français en termes de population d'internautes.
C'est une révision totale du fonctionnement de Webhelp.
C'est vrai, mais la
contrepartie du payant, c'est que le service est étoffé. Par exemple, si nos
opérateurs ne trouvent pas la réponse à la question d'un internaute dans un
délai de sept minutes, une équipe de nuit recherchera plus en profondeur pour
lui fournir dès le lendemain la réponse la plus précise.
Quel est le trafic du site webhelp. fr ?
300 000 visiteurs par mois. Et il
y a un million d'interactions clients sur les plates-formes Webhelp dans le
monde, en France, en Allemagne et aux Etats-Unis.
Quels types de questions vous pose-t-on ?
Nous avons de tout. Cela va de la plus
saugrenue à la plus pointue, de niveau universitaire. Les questions proviennent
à 100 % de personnes privées, mais dans ce pourcentage, les questions
professionnelles ne couvrent que 15 à 20 %. Mais la question privée n'est pas
forcément plus simple. Trouver le rapport annuel de Michelin est enfantin,
alors que répondre à la question : "C'est la panique quand elle rentre dans le
poulailler, en sept lettres", ce qui correspond en fait à un mot croisé, est
plus difficile. Même si nous avons trouvé la réponse, qui est belette.
Comment vos opérateurs organisent-ils leurs recherches ?
Nous commençons par regarder dans l'historique des questions,
soit plus de deux millions stockées dans notre base, pour voir si la réponse
s'y trouve déjà. Si ce n'est pas le cas, on utilise une combinaison de meta
moteurs de recherche développés de manière propriétaire qui couvre près de 60 %
du Web, quand des moteurs comme Yahoo ! ou Altavista n'en couvrent que 20 %.
Qu'en est-il de votre métier de gestion de la relation client professionnelle ?
Nous sommes partis du constat qu'il existait un
mythe d'un commerce 100 % électronique qui n'aurait pas besoin d'assistance
humaine. Or, on constate aujourd'hui que tous les gens qui sont arc-boutés sur
ce concept vont probablement rencontrer des difficultés importantes, et que les
taux de transformation du e-commerce sont très faibles. De 1 à 3 % contre 3 à 4
% dans le commerce traditionnel d'après BCG. Il y a donc manifestement un
hiatus énorme qui s'explique bien sûr par les problèmes liés à la sécurisation
des paiements, mais aussi par le fait que les règles du commerce traditionnel
qui sont le service, l'accueil, le conseil et tout ce qui fait le "bon vendeur"
des boutiques classiques n'est pas reproduit dans le monde virtuel. Nous
souhaitons donc proposer aux entreprises un système de gestion de la relation
client adapté au Web.
Que proposez-vous à vos clients professionnels ?
Le premier produit est le chat. La puissance de
l'offre de Webhelp, c'est de respecter les caractéristiques du Web,
c'est-à-dire naviguer dans un relatif anonymat et librement. Or, l'assistance
par chat est tout à fait compatible avec cette philosophie. Du côté de
l'internaute, cela a un aspect "user friendly", et du côté de l'entreprise
cliente de nos services, cela a beaucoup de vertus, puisque c'est moins cher et
que le taux de transformation est beaucoup plus élevé. Le deuxième produit est
l'e-mail management. La problématique du mail aujourd'hui en France est assez
simple : prenez les volumes actuels d'un site, eh bien vous pouvez multiplier
par dix ce qu'il va recevoir comme e-mails en 2003. Le marché se partage entre
ceux qui n'y répondent pas, et ceux qui y répondent mal. Webhelp arrive à point
nommé avec une solution qui combine le logiciel et les ressources humaines.
Comment vous positionnez-vous sur le marché du web call center ?
On aime se définir comme le spécialiste de l'assistance à grande
échelle sur les canaux Internet et mobile.
Comment voyez-vous évoluer votre métier ?
Il va se passer dans le monde de la
relation client la même chose que dans la publicité il y a cinq ans. De vrais
spécialistes du Web vont émerger, prospérer, s'introduire en bourse et
construire un métier particulier, différent de ce qui existait auparavant.
Que proposez-vous dans votre offre Wap que vous développez en partenariat avec Orange ?
Le point de départ de notre réflexion a
été de dire qu'il est difficile de trouver une information sur le Wap
aujourd'hui parce qu'aucun service n'est suffisamment simple d'usage. Ce que
nous avons proposé à Orange, c'est un service complet basé sur notre
technologie, comprenant un serveur vocal, une plate-forme applicative, une
distribution du trafic et, derrière, une prise en charge par nos opérateurs.
Après avoir posé sa question de manière vocale, l'utilisateur n'a plus qu'à
attendre qu'on lui signale par SMS que sa réponse est arrivée pour la consulter
en trois clics sur le portail orange. fr. Ce que nous proposons, ce ne sont ni
plus ni moins que les renseignements du Wap.
Pourquoi vous être adressé à Orange et pas à un autre ?
Parce qu'ils ont été
tellement emballés par le concept du service qu'ils nous ont demandé qu'il soit
exclusif. Mais nous avons d'autres produits liés à l'univers du mobile que nous
allons lancer et que nous comptons bien proposer aux deux autres opérateurs.
Quels sont ces nouveaux produits ?
Nous avons un grand
projet dans le domaine de la comparaison de prix sur le Wap, et un autre qui
concerne l'assistance par SMS.
Quelles sont les prochaines étapes de développement de Webhelp ?
D'un point de vue technologique,
c'est le lancement de la nouvelle offre Arena ce mois-ci. C'est un système de
streaming qui permet de pousser sur l'écran de l'internaute une information ou
une image dès qu'elle est disponible sur le serveur, ce qui réduit
considérablement les temps d'attente. La deuxième innovation technologique que
nous allons lancer d'ici la fin de l'année est une fonction que l'on appelle le
"co-pilot", qui permet à l'opérateur de prendre la main sur le PC de
l'internaute à sa demande en cliquant sur un bouton, et de le configurer ou le
paramétrer comme il faut lors d'une installation de logiciel, par exemple.
Quels sont, selon vous, les principaux freins au développement du CRM dans les entreprises françaises ?
Tout le monde les connaît.
Ils sont au nombre de trois : la faiblesse du parc informatique des Français.
Que voulez-vous mettre en place quand 3 % seulement de ce parc est connecté en
haut débit ? Tant que le dégroupage n'aura pas été effectif et que les offres
sur le câble n'existeront pas, nous serons toujours bloqués. Le deuxième est
basé sur une erreur fondamentale qui a été de croire à un commerce 100 %
technologique. Trop de gens ont construit des boutiques en ligne en oubliant la
pièce essentielle, les vendeurs. Et, pour finir, il y a toujours cette phobie
du paiement en ligne avec sa carte bancaire qui demeure pour moi
incompréhensible. J'en vois toutefois un quatrième qui est le contrecoup des
expériences malheureuses qui ont quelque peu discrédité notre métier. Dans les
dernières années, les gens ont été obnubilés par l'obligation d'établir l'offre
et ont construit sans aucune réflexion préalable. Résultat, aujourd'hui, la
plupart freinent des quatre fers de peur de reproduire les mêmes erreurs.
Quel est le degré de maturité de vos clients vis-à-vis de la gestion de la relation client ?
Elle est très variable. Nous avons des
clients qui ont d'ores et déjà acquis une connaissance pointue des outils
disponibles et qui savent précisément ce qui leur faut, et d'autres qui
pataugent totalement et auxquels il faut presque leur dire que c'est important
de répondre au mail d'un client. Pour beaucoup d'entreprises, l'apprentissage
du CRM est tout sauf évident et s'annonce long.
Biographie
Diplômé d'HEC en 1992, Frédéric Jousset débute sa carrière chez L'Oréal où il occupe des responsabilités marketing qui lui permettent de se familiariser avec le développement de nouveaux produits, la gestion de marques grand public et l'utilisation de toutes les techniques promotionnelles et publicitaires. Il prend ensuite avec succès des fonctions d'encadrement commercial qui lui ouvre les portes d'une direction générale en Amérique Latine. S'intéressant de près à l'Internet, il décline cette promotion et décide en 1998 de racheter Dialog, un éditeur de logiciels, avec un ambitieux projet d'Extranet fondé sur ce progiciel utilisé par les distributeurs de L'Oréal. Il fusionne cette activité avec son concurrent Ikosoft et en profite pour sortir du capital. Il intègre alors Bain & company en 1999. Au sein de la practice "private equity", il a participé à plusieurs missions de conseil auprès de grands fonds institutionnels pour les guider dans leur stratégie de participation. Il rencontre Olivier Duha au cours d'une mission commune et crée avec lui Webhelp en juin 2000.