Comparateurs de prix sur Internet: l'exigence de la transparence
Un site comparateur de prix est soumis à des principes spécifiques. Et ce surtout quand il est géré par un distributeur Pour ne pas être accusé de concurrence déloyale, celui-ci doit veiller à l'objectivité des données qu'il propose.
Je m'abonneBrigitte Misse avocat auprès de la cour d'appel de Paris
Comparer les prix sur le Web est aujourd'hui un service offert par moult acteurs. Une pratique soumise à des réglementations spécifiques. Plus difficile est la mise en place de comparateurs de prix par les distributeurs eux-mêmes, confrontant leurs produits à ceux des concurrents. Une nouvelle illustration de cette difficulté a été tranchée par le tribunal de commerce de Paris, le 20 mars 2007. Ce tribunal a été amené à vérifier le respect des exigences du droit de la publicité comparative par le site Quiestlemoinscher.com de Galec, le groupe d'achats des Centres Leclerc. En effet, la première difficulté pour les comparateurs de prix entre sites concurrents s'entend de l'application du texte sur la publicité comparative. Texte qui peut entraîner» pour l'annonceur ou le responsable du site comparatif, de lourdes sanctions pénales mais aussi le paiement de dommages-intérêts conséquents. Et c'est sur ce fondement que, depuis le lancement des premiers sites comparatifs, quel que soit le secteur, les juges apprécient leur légalité.
Contrer la concurrence déloyale
S'agissant du site internet Quîestlemoinscher.com, Carrefour avait déjà assigné les Centres Leclerc devant les tribunaux pour procédé comparatif illicite, acte de concurrence déloyale ainsi que publicité trompeuse. Une des principales problématiques soulevées à l'époque s'entendait de la généralité du slogan «Qui est le moins cher?», nom de domaine de ce site. Ce portail avait dès lors été fermé, après une première décision du tribunal de commerce de Paris qui avait constaté le manque de transparence résultant notamment de l'absence de paramètres vérifiables.
A l'inverse, dans leur dernière décision, les juges du fond ont constaté que ce nouveau site présentait pléthore de renseignements tels que le nombre de produits, d'enseignes et de marques comparés, le prix avec mention de la période exacte de relevé... De très nombreux constats, effectués par une société indépendante de Leclerc, y existaient magasin par maga sin, produit par produit. . , et ce, sur près de 5000 pages du site. Une synthèse globale ainsi qu'un exposé de la méthodologie accompagnée d'explications claires étaient également présents. C'est après avoir apprécié l'ensemble de ces informations que le tribunal a constaté que la transparence était garantie et que les paramètres utilisés pouvaient être vérifiables.
La demande de sanction pour publicité trompeuse a été rejetée au motif que la demanderesse n'avait pas rapporté la preuve des allégations. De même, les accusations de concurrence déloyale n'ont pas été retenues par le tribunal de commerce de Paris en raison du fait que, par exemple, Leclerc n'avait pas pris en compte les offres promotionnelles parmi les produits dont les prix étaient comparés...
Objectivité et vérité
La transparence et l'objectivité de la comparaison sont donc la pierre angulaire de cette décision. Une décision qui s'appuie sur les principes essentiels du droit du commerce, à savoir le principe de liberté économique et la possibilité pour tout annon ceur de définir ses stratégies commerciales. Et qui rappelle également que les principes essentiels du droit de la consommation s'appliquent aux comparateurs de prix.
Les articles L. 121-8 et suivants du code de la consommation encadrent toute publicité comparative y compris celle diffusée sur le Web» tant sur les sites comparateurs de prix que sur les espaces publicitaires. De plus, ils définissent précisément les critères que toute publicité comparative doit respecter: objectivité, transparence et vérité des propos en constituent les principes essentiels. Et c'est en s' appuyant sur ces principes mêmes que le tribunal de commerce a été amené à examiner la légalité du site «Quiestlemoinscher.com». Premier principe: la comparaison doit porter sur des biens ou des services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif» sachant qu'elle doit être limitée à des comparaisons objectives, excluant toute référence à des appréciations subjectives, Deuxième principe: elle doit porter sur une ou plusieurs caractéristiques essentielles pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, objets de la comparaison. Ceci a pour principal objectif, bien évidemment, d'éviter toute publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur, publicité strictement interdite dont le non-respect entraîne des sanctions pénales particulièrement graves.
Troisième principe: la publicité comparative ne peut jeter le dis crédit ou le dénigrement sur les marques, biens ou services ou sur le concurrent, objet de la comparaison. Pas plus, elle ne peut tirer indûment profit de leur notoriété.
Brigitte Misse, avocat auprès de la cour d'appel de Paris
«La publicité comparative ne peut jeter le discrédit ou le dénigrement sur les marques, biens ou services ou sur le concurrent, objet de la comparaison.»