Comment réussir son implantation à l'international
Pour tenir ses promesses, l'e-marchand qui se lance à l'international doit veiller à ce que le traitement des commandes et leur acheminement demeurent sans faille. Facteurs de succès et retours d'expérience.
Je m'abonneLES POINTS-CLES
1. Garantir la sécurité des expéditions
Avec ou sans rupture de charge, il est important d'assurer la sûreté des produits pendant leur acheminement. Or, plus on exporte loin, plus cela est difficile. L'expédition à l'international de produits distribués par un site d'e-commerce n'étant intéressante que si le produit possède une certaine valeur, l'enjeu est important. On peut envisager de réduire le nombre d'intermédiaires en ne s'adressant qu'à un seul prestataire. Une autre solution consiste à faire appel à un logisticien ayant un partenaire fiable dans le pays cible. C'est ce pourquoi milite Eddy Richauvet, directeur associé de ShipLeader, en proposant « une offre globale intégrant la distribution, la gestion des retours et celle du service clients, grâce à un réseau de logisticiens implanté dans chaque pays ». Le client final peut ainsi renvoyer le produit défectueux chez le logisticien, qui le réachemine vers le pays du site marchand. Ainsi, plus les colis sont sécurisés, moins les sociétés se trouvent confrontées à des réclamations, or, comme le souligne Hervé Cohen, directeur marketing adjoint de TNT, « la gestion du SAV à l'international est complexe et coûteuse ».
2. Mutualiser les expéditions
L'injection directe est réalisée par les logisticiens, en partenariat avec leurs transporteurs locaux. Elle permet de mutualiser les coûts liés au transport et consiste à regrouper les marchandises en partance vers un pays cible dans un même camion. En général, les systèmes informatiques des différentes sociétés sont également interfacés de manière à communiquer entre eux. Ainsi, précise Luc de Murard, p-dg de Crosslog, « nous pouvons tracer les produits, gérer les litiges et les retours de produits ». Pour que la logistique ne mange pas la marge de l'e-marchand, Didier Lesueur, directeur marketing DHL supply chain recommande aux emarchands de « trouver un logisticien offrant la mutualisation des coûts. Il est donc nécessaire qu'il accepte de facturer le traitement du produit et son transport au coup par coup, afin d'éviter les charges fixes ». Pour l'expert, il s'agit du « modèle de demain, bien qu'il soit encore peu développé sur le marché et peu accessible aux petits volumes ».
3. Gérer des stocks déportés
Au lancement de l'activité à l'international, il est tout à fait envisageable de gérer le stock en France et d'expédier les commandes au fil de l'eau. En revanche, à partir d'un certain volume - plus de mille expéditions par mois - cette méthode devient trop coûteuse. Le stock déporté présente alors des avantages en termes de réactivité: qu'il s'agisse de la première livraison ou de la gestion des retours, il permet d'être plus rapide. TNT, par exemple, évoque des livraisons à J + 1 depuis un stock déporté en Belgique. En revanche, cette solution génère des coûts: investissement dans un stock disponible (tout ou partie du catalogue), location d'entrepôt. Le transport est optimisé, puisque les frais sont moins onéreux à l'intérieur d'un territoire qu'à l'international et que les tarifs postaux de certains pays, comme l'Allemagne, demeurent particulièrement compétitifs. Mais encore faut-il que le volume d'activité soit suffisant pour que l'équation économique soit positive.
4. Respecter le délai de livraison
La satisfaction des clients passe par la confiance dans la livraison des produits.
« Peu importe le délai annoncé, pourvu qu'il soit tenu », martèle Hervé Cohen (TNT). Pour honorer ses engagements, l'e-commerçant doit s'assurer que le transporteur lui-même tient ses promesses. Il existe des prestataires bien implantés à l'international, mieux vaut faire appel à eux. C'est le cas des sociétés spécialisées dans l'envoi express, comme DHL, TNT, UPS ou FedEx, qui prennent en charge les colis de 30 Kg maximum. Au-delà, les transporteurs facturent leurs prestations selon un rapport poids / volume de la marchandise difficile à déchiffrer, qui a tendance à pénaliser les expéditions à l'international.
5. Assurer le suivi de la commande
Les systèmes d'information logistique doivent être paramétrés pour suivre l'acheminement du colis. Hervé Cohen vante les bienfaits des services de «préaverting», qui optimisent les résultats de la première livraison. « En prévenant le destinataire par e-mail lorsque le produit arrive dans le centre de distribution du pays pour lui annoncer que la livraison aura lieu le lendemain, nous évitons les échecs, soit parce que le destinataire est bien là, soit parce qu'il répond pour fixer un autre rendez-vous ou pour se faire livrer à une autre adresse », explique-t-il. Ce genre de services permet d'augmenter la satisfaction client et de diminuer les problèmes de SAV.
CONSEILS D'EXPERTS
Hervé Cohen, directeur marketing adjoint de TNT
«D'après le baromètre E-commerce de l'Acsel (deuxième trimestre 2010) les e-commerçants français se tournent en priorité vers les marchés proches: la Belgque, le Luxembourg, la Suisse. Je leur recommande aussi de se lancer dans les pays européens à potentiel comme l'Allemagne et le Royaume-Uni. Privilégier l'Europe pour roder le lancement de l'activité à l'international permet de tester tous les paramètres. »
Didier Lesueur, directeur marketing DHL supply chain
«Dans le domaine de l'e-commerce, le magasin étant dématérialisé, le consommateur raisonne en termes de perception et non en fonction de la réalité. Lorsqu'il passe sa commande, il ne se soucie pas de la localisation géographique du produit, il achète un article à un prix affiché, sans se soucier du coût du transport et de la logistique. C'est pourquoi certains e-marchands proposent plusieurs tarifications pour satisfaire leurs clients. Chacun doit déterminer son modèle selon son activité, son organisation, ses actions marketing et commerciales.»
Denis Payre, président de Kiala
« Avec nos propres réseaux de points relais, nous permettons à nos clients de tester leur modèle économique à l'étranger sans avoir besoin de réaliser de gros investissements. Nous sommes ouverts à la négociation suivant les volumes traités et quand il s'agit d'importants clients français, ils ont accès à des tarifs préférentiels d'accès à nos réseaux européens. »
ETUDE DE CAS
Quiksilver exporte dans neuf pays de l'Union européenne
La marque de vêtement de surf a lancé un site d'e-commerce en septembre 2007, ouvert simultanément en France et dans dix pays de l'Union Européenne. « Le démarrage de l'activité n'a pas été compliqué, car nous avons choisi de travailler avec un seul prestataire, TNT, et sur une zone, à l'intérieur de l'UE, sans problématiques douanières », explique Alexandre Barbier, directeur transport international de Quiksilver. Le distributeur s'appuie sur ses deux entrepôts - en France et en Belgique - qui stockent la marchandise dédiée à la distribution B to B et gèrent les expéditions des commandes B to C passées sur le site d'e-commerce. Et l'activité à l'international, bien que tenue confidentielle, représente aujourd'hui une part non négligeable du chiffre d'affaires total du site de vente en ligne. « Les ventes en ligne vers l'étranger devraient encore fortement augmenter d'ici trois à quatre ans, car nous projetons de développer ce canal en nous dotant de nouveaux outils », explique Alexandre Barbier. Quiksilver envisage de diversifier les solutions de livraison en proposant la livraison en points relais, y compris à l'étranger, pour répondre à la demande de ses clients finaux au Benelux, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni. Mais aussi pour réduire ses coûts. « Nous avons besoin de solutions plus économiques, même avec des délais un peu plus long », glisse le directeur transport international. Pour l'heure, la livraison express en moins de 24 h représente 5 % des expéditions à l'international et la livraison «économie express» en moins de 72 h, 95 %.
Power Tonic opte pour la multiplication des sites
Power Tonic.net, le pure player distributeur des produits Power Tonic, commercialise son offre en France, depuis août 2010, et à l'international depuis décem bre 2010 (en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Belgique, aux Pays-Bas, en Finlande et au Portugal). Il réalise un tiers de son chiffre d'affaires à l'étranger. Pour Gustin Hocine, le directeur France de la marque, la clé de succès à l'international vient de la « visibilité du site internet » et de la « stratégie logistique ». D'un point de vue logistique, les prises de commandes sont en effet gérées en plusieurs langues depuis un site unique, situé au Maroc. Tout comme le SA, la création ainsi que l'animation des sites internet. En revanche, les expéditions partent de l'entrepôt le plus proche de l'adresse du client final. « Au démarrage, lors des périodes de tests, nous ne travaillions qu'avec un seul prestataire, Efilog, en France, confie Gustin Hocine. Mais nous avons rapidement créé deux sites en interne pour réaliser des économies sur les frais de port. » Ces plateformes - ouvertes en Angleterre et en Allemagne - ont leurs propres contrats avec les services postaux de leurs pays respectifs. Aujourd'hui, les retours sont encore gérés par Efilog en France, mais l'e-marchand planche pour améliorer ce point « L'optimisation de la gestion des retours est un sujet complexe pour nous, car elle dépend de l'état du stock de chaque site », souligne Gustin Hocine. Une approche pointue s'impose.
ZOOM
Des tarifications négociables au cas par cas...
Les offres des opérateurs, expressistes comme transporteurs classiques, sont négociables selon les volumes des expéditeurs concernés. Mais d'autres critères entrent en jeu. En passant vos commandes sur le Web auprès de sociétés telles que Chronopost International ou Colissimo International, vous obtenez des prix un peu à plus compétitifs que si vous vous rendez dans un bureau de Poste /j pour affranchir vos colis. Chronopost International consent des remises additionnelles qui peuvent atteindre 35 %, Kiala affirme avoir une offre très compétitive pour la Belgique, etc. Avant de choisir un prestataire, mieux vaut étudier les offres à la loupe, elles sont négociables au cas par cas.
CONSEILS D'EXpERTS
Sylvain Mignot, gérant d'Efilog
«Commencer par exporter en Europe permet de se familiariser avec l'export. Les e-commerçants doivent se renseigner en amont auprès d'un avocat sur la législation des pays-cibles, pour adapter les conditions générales des ventes, puis s'informer sur les formalités douanières à respecter avant de proposer leurs offres en dehors de l'Union Européenne. »
Luc de Murard, p-dg de Crosslog
«Nous proposons à nos clients une nouvelle solution, en envoyant toutes les marchandises à destination de l'Espagne vers l'entrepôt d'un partenaire, qui traite sur place la préparation des commandes (triage, mise sous colis, expédition). Ce système permet de mutualiser les coûts et de bénéficier de coûts de main-d'oeuvre et d'immobilier, moins onéreux qu'en France. Il facilite également le traitement des retours. Ceux-ci sont plus rapides, parce que les colis sont vérifiés dans le pays-cible. »
Eddy Richauvet, directeur associé de ShipLeader
«Nous animons un réseau européen, baptisé «F4E - Fulfillment For Europe«, qui regroupe des logisticiens, spécialisés dans la gestion globale du traitement des commandes en e-commerce international avec une forte expertise dans le textile, notamment pour s'adresser à l'industrie de la mode. Ces services sont proposés à ce jour en France, en Angleterre, en Allemagne, en Italie, en Scandinavie et en Europe de l'Est, afin de faciliter le lancement des activités des e-marchands dans ces pays-cibles. »