Comment bâtir un cross selling efficace
Devenu une pratique courante du e-commerce pour accroître les ventes, le cross selling ne s'improvise pas. Définir les offres additionnelles, identifier les associations de produits pertinentes et choisir a quel moment les mettre à disposition des internautes reposent sur des règles métier qui ne cessent de s'enrichir. Avoir en ligne de mire la satisfaction des clients évite bien des erreurs. Voici quelques démarches à suivre pour faire de ces ventes additionnelles un levier de croissance efficace.
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Les étapes-clés
1 Bien connaître les attentes des clients
Proposer aux acheteurs en ligne un ensemble de produits complémentaires à celui qu'ils recherchent permet d'augmenter le montant du panier moyen et rend visibles les produits qui ne le ne sont pas. Mais, pour que cette technique baptisée cross selling, ventes additionnelles ou ventes supplétives, donne satisfaction, encore faut-il l'utiliser en partant des réelles attentes des clients.
Or, encore aujourd'hui, beaucoup de sites marchands sélectionnent les produits et services additionnels en se basant sur leurs seules intuitions. Parce qu'ils cherchent avant tout à écouler leurs stocks, certains vont jusqu'à pousser des produits en faisant fi des règles d'association. Alors que pour susciter l'intérêt de l'acheteur en ligne, ces offres supplétives doivent avant tout répondre à ses besoins. Comment les identifier? Par des entretiens réalisés auprès de panels d'individus représentatifs de sa clientèle ou par des outils informatiques d'analyse du comportement des cyberacheteurs. On arrive alors à construire le cross selling comme un service venant en aide à l'internaute.
Celui-ci y trouve des offres personnalisées à ses besoins auxquelles il aurait difficilement eu accès autrement.
2 Proposer un cross selling au moment opportun
Pour des articles de consommation courante, les offres additionnelles apparaissent en général dès le deuxième clic sur la page du produit recherché par l'internaute. Mais cette règle ne s'applique pas à tous les sites marchands. Dès lors que l'achat porte sur un gros montant, il peut s'avérer judicieux de verrouiller la première vente avant de solliciter l'internaute sur d'autres achats. Les voyagistes en ligne ont tendance à privilégier cette pratique. D'autant qu'elle permet d'affiner les services susceptibles d'intéresser le client. Sur une proposition de location de voiture suite à une réservation de vol, il est plus pertinent et efficace en termes de vente de présenter une offre avec un prix correspondant aux dates de voyage du client. Plus le cross selling est personnalisé, plus il a de chance de susciter l'intérêt. D'où la nécessité d'appréhender quels sont les critères de déclenchement de l'attention des clients pour une offre afin de construire le parcours de navigation sur le site en conséquence.
3 Faire évoluer son cross selling
Il est préférable de penser cross selling dès la conception du site marchand. Anticiper sur les évolutions futures, de manière à pouvoir enrichir progressivement ce site d'offres de ventes additionnelles. Il existe des plateformes d'e-commerce permettant de monter des sites marchands sans aucune connaissance technique. La plupart d'entre elles offrent aujourd'hui des fonctionnalités de cross selling en standard, mais pas toutes. Quoi qu'il en soit, il est préférable de procéder par étapes afin de pouvoir analyser les résultats obtenus et affiner ses choix en conséquence.
4 S'appuyer sur des outils d'analyses statistiques
Les outils d'analyse du comportement des clients ne donnent satisfaction que dans la mesure où ils travaillent sur un volume de données suffisamment important pour garantir la fiabilité de leurs calculs statistiques.
Jusqu'à récemment n'étaient analysés que les pages vues et le comportement d'achat des visiteurs. Avec les outils de Web Analytique, on arrive aujourd'hui à suivre et à enregistrer l'intégralité des actions de chaque internaute tout au long de sa navigation sur le site. Ces outils servent à étudier le comportement des internautes en vue d'améliorer les performances des sites en ligne. Ils permettent de savoir comment les visiteurs réagissent aux contenus du site marchand et quelles actions entraînent une hausse du taux de conversion. Ils déterminent les revenus associés à chaque article selon le chemin suivi par l'internaute pour y accéder. Ils sont donc tout indiqués pour optimiser les opérations de cross selling et s'avèrent très efficaces pour analyser la pertinence des offres de ventes croisées. Ils arrivent aussi à mettre en lumière des associations de produits réalisés par les acheteurs du Net que le commerçant était loin d'imaginer.
5 Vérifier la cohérence des associations réalisées en automatique
Faire des corrélations en fonction de mots-clés ne suffit pas, loin s'en faut. Mal pensée, cette méthode risque de donner des résultats aberrants comme l'association d'un ouvrage de Ninja japonais aux internautes acheteurs du dernier livre d'Amélie Nothomb parce que l'histoire se déroule au Japon. Pour les petits sites ne comportant pas plus de 500 références, mises à jour seulement deux à trois fois par an, le choix des produits à proposer à la vente en supplément peut se faire manuellement selon les critères métier du commerçant. C'est souvent le choix que font les magasins qui se lancent sur la vente à ligne.
En revanche, dès lors que le site comporte plus de mille références avec de nombreuses mises à jour plusieurs fois dans l'année, il est préférable de passer en automatique. Mais encore faut-il bien définir les règles d'association, les vérifier et en tester la pertinence. Ce préalable mobilise des compétences et du temps. Mais cette solution permet ensuite de gagner beaucoup de temps par rapport à la version manuelle.
Etude de cas
Expédia fait du cross selling par e-mailing
Parce qu'elle représente un enjeu très important pour eux, les voyagistes en ligne innovent dans leur pratique des ventes additionnelles. Expédia expérimente l'envoi par courrier électronique d'offres complémentaires.
Le coût d'un vol sec ne représente guère plus de 40% du budget que l'internaute va consacrer à son séjour. Et les marges sur la billetterie aérienne sont faibles. Aussi la profitabilité future des voyagistes en ligne dépendra-t-elle de leur capacité à augmenter leurs ventes additionnelles.
«Nous n'en sommes qu'au début de cette pratique. Il y a encore tout à inventer dans ce domaine qui constitue une de nos priorités», souligne Guillaume Cussac, directeur général adjoint e-commerce d'Expedia.fr. Le package dynamique qui propose aux clients la location de voiture et la réservation de l'hôtel lors de la recherche du vol est aujourd'hui une pratique très répandue dans le métier. Les offres mises en avant au moment de la réservation commencent également à faire beaucoup d'adeptes parmi les voyagistes. Elles portent sur des assurances complémentaires et des accès à des activités payantes sur place. Expédia voulait aller plus loin maintenant que les outils d'analyse permettent de mieux comprendre le cycle de construction d'un voyage. «Les internautes réfléchissent à leur hébergement et à l'organisation de leur séjour sur place seulement plusieurs semaines après avoir réservé leur vol. C'est à ce moment là qu'il est opportun de leur faire des propositions», explique Guillaume Cussac. Ayant en sa possession les adresses électroniques de ses clients, le voyagiste a donc décidé de leur envoyer automatiquement un e-mail avec des offres personnalisées. Ceux qui vont en Sicile se verront proposer une location de voiture pour faire le tour de l'île. Pour les touristes partant à Barcelone, Expédia aura sélectionné des hôtels et des entrées dans les lieux culturels de la ville. La période à laquelle adresser ces e-mails n'a pas encore été bien définie. Le voyagiste en expérimente plusieurs. Et attend les résultats des tests. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle pratique requiert des infrastructures informatisées très importantes pour capturer les informations et générer automatiquement des courriers électroniques avec des contenus personnalisés. D'autant que ces contenus doivent être attractifs visuellement.
Paroles d'experts
Les conseils des professionnels
Fabienne Cammas, directrice générale du groupe Plan créatif et directrice fondatrice de Plan créatif Bées net «Faire du benchmark en regardant les sites proposant des offres concurrentielles à la vôtre et accorder le temps nécessaire à la bonne connaissance des besoins de ses clients. S'immerger dans la vision du consommateur pour que les produits et services proposés en cross selling soient perçus positivement par l'internaute. Qu'ils répondent à son besoin d'accompagnement dans son acte d'achat»
Xavier Rousselou, responsable marketing et communication d'Opodo «Attention à ne pas polluer la page par trop de propositions qui noient l'intérêt de l'offre principale et fait perdre ses repères à l'internaute. Mal pensé et mal organisé, un cross selling risque d'entraîner le départ du visiteur avant qu'il ne concrétise son achat. L'offre additionnelle doit être perçue comme un plus. L'internaute s'irrite d'être poussé à l'achat à tout prix.»
Guillaume Cussac, directeur général adjoint e-commerce d'Expedia.fr et Anyway.com «Le cross selling est une véritable opportunité à ne pas gâcher par manque d'attention. Les offres proposées par ce canal de vente doivent réussir à changer le comportement des clients par leur caractère incitatif.
Elles doivent séduire par les réels avantages qu'elles procurent. Le client doit y trouver son compte.»
Jean-Pascal Mathieu, vice-président Stratégies de Nurun «Pour plus d'efficacité, il faut se donner les moyens de mesurer la pertinence des offres additionnelles proposées sur son site, utilisez des outils de Web Analytique pour trouver de nouvelles corrélations entre vos offres afin d'améliorer les taux de transformation. Ces outils facilitent la mise en oeuvre de tests entre deux choix différents de cross selling. Ils aident à penser en dehors des approches évidentes.»
Sonia Kofman, directrice projet BiCommerce «Ne pas mettre en cross selling des produits en fin de stocks au risque de perdre la totalité de la vente. Car vous introduisez alors dans le cycle de décision d'achat de l'internaute un accident de parcours qui le déstabilise. S'il n'arrive pas à boucler son panier parce que le produit additionnel n'est plus disponible, il risque de quitter le site. Il est donc important de mettre en place une procédure pour remplacer automatiquement les produits en rupture de stock au niveau du cross selling.»
Eric Sansonny, directeur marketing et commercial d'Amen. «Mettre en scène les offres additionnelles de manière à créer un univers thématique cohérent sur toute la page visualisée par l'internaute. Et veiller à la qualité éditoriale de ces offres tant au niveau de la photo que du contenu rédactionnel. Cette mise en scène doit être pensée dès la conception du site marchand.»
Aude Mainville, directrice générale adjointe de Dixit
«Attention à ne pas diriger les internautes uniquement sur les meilleures ventes pour une question de facilité. Il est important de ne pas négliger les niches commerciales, car ajoutées les unes aux autres elles génèrent un gros volume de vente.»
Focus
Les différents types d'offres additionnelles
Le cross selling est un levier couramment utilisé aujourd'hui par les sites marchands. Les ventes additionnelles peuvent représenter près du quart des ventes d'un produit.
Elles portent sur des produits de la même marque ou de la même catégorie. Elles renvoient également à des accessoires à prix réduits ou au top des ventes. Elles servent aussi à attirer des clients sur des articles plus haut de gamme. Certaines ventes supplétives portent sur des services associés qui facilitent l'utilisation de produits achetés dans le cadre de recettes culinaires ou de travaux manuels. D'autres reprennent les articles que les internautes ont tendance à mettre dans le même panier d'achat. Les idées d'associations de produits sont multiples et variées. Il faut juste veiller à leur pertinence. C'est là qu'intervient le savoir-faire du commerçant.