«En France, nous visons plus de 30 % de croissance pour le site Price Minister»
LE FONDATEUR DU GROUPE PRICEMINISTER, EGALEMENT PRESIDENT DE L'ASSOCIATION DE L'ECONOMIE NUMERIQUE, EXPOSE LES AMBITIONS QU'IL NOURRIT POUR SON ENTREPRISE, ET REVIENT SUR L'ACTUALITE PLUS GENERALE DU COMMERCE EN LIGNE.
Je m'abonneQuel bilan tirez-vous de l'année 2008 pour le groupe PriceMinister?
Pierre Kosciusko-Morizet: Nous sommes satisfaits, car nous avons terminé l'année avec une progression de notre chiffre d'affaires de 30%. Parallèlement, l'audience a grossi de 35 à 40% sur l'année. En novembre dernier, les chiffres de Médiamétrie faisaient état de 10,5 millions de visiteurs uniques sur Priceminister. com. Sur ce site, nous avons beaucoup progressé et le but que nous poursuivons est de nous hisser à la première place. Concernant A vendre à louer, un autre de nos sites, que nous avons acquis en juin 2007, nous avons également plus que doublé le trafic, notamment grâce à des investissements marketing en augmentation. Selon les mois, nous sommes le premier ou le deuxième acteur de l'immobilier sur Internet derrière Seloger.com. Et l'objectif reste de combler notre retard en chiffre d'affaires par rapport à ce leader, en développant le nombre de nos agences partenaires.
Afin d'y parvenir, nous avons doublé la taille de l'équipe commerciale et nous allons à nouveau doubler nos investissements marketing cette année, avec de grosses ambitions.
Cette stratégie intervient, naturellement, à contre-cycle, le marché n'étant pas fameux en ce moment. Pour autant, les agences qui restent actives sur le marché cherchent à rendre plus efficaces leurs investissements et ont tendance à les faire basculer du papier vers Internet.
Notre groupe est aujourd'hui constitué de quatre pôles: l'achat-vente garanti, l'automobile, l'immobilier et le voyage. En ce qui concerne l'automobile, si l'on prend la somme de nos trois sites, PriceMinis- terauto, 321 auto, et Autoevasion, nous nous positionnons à la deuxième place sur ce créneau. Cette activité continue à se développer, l'essentiel de cette croissance émanant des professionnels du secteur. Ces derniers vendent moins en concession et vont davantage vers le Web.
Le site 321 auto propose-t-il également de la vente en ligne?
Oui et ce sont essentiellement des voitures d'occasion qui sont proposées à la vente. Nous avons également une offre dans le neuf. Des voitures neuves sont vendues par des concessionnaires en déstockage avec des prix de l'ordre de 15 à 25% inférieurs au prix en concession. Quant à la vente de voitures neuves sur Internet, elle se développe vite, mais ce marché reste petit pour des raisons que je n'explique pas forcément... En effet, on achète sa voiture sur Internet comme chez un concessionnaire avec les mêmes services, on peut même aller la chercher chez le concessionnaire ou se la faire livrer!
Quid de votre pôle lié au voyage?
Sur cette activité, nous sommes présents avec les sites Voyagermoinscher et Planetanoo. Et nous visons une croissance de 30 à 40%. Nous venons de lancer un moteur de recherche d'hôtels pour le site Voyagermoinscher. Grâce à lui, pour la première fois, les internautes vont pouvoir aller sur une page qui donne toutes les informations sur un hôtel, les commentaires et tous les prix pour une nuit donnée, proposés par les sites de réservation. Cela permet de constater qu'il y a de gros écarts... Parallèlement, nous préparons le lancement de notre newsletter «Plane- tanoo», dédiée à l'univers du voyage, en Espagne, et dans un second temps en Angleterre.
@ P. Lesage
PARCOURS
Pierre Kosciusko-Morizet, 31 ans, parle français, anglais et allemand couramment.
Diplômé d'HEC Entrepreneurs en 1999, il a monté une première société lors de sa dernière année d'études, Visualis. Cette entreprise, spécialisée dans le conseil en distribution, a fait rapidement faillite. Puis Pierre Kosciusko-Morizet est parti aux Etats-Unis travailler chez Capital One, une banque en ligne, où il a dirigé une équipe de 60 analystes.
De retour en France, il a fonde, en août 2000, PriceMinister. Membre de l'Acsel depuis la création de PriceMinister et administrateur depuis 2005, Pierre Kosciusko-Morizet a été élu à la présidence de l'association en juillet 2008.
Quel est le modèle économique de Planetanoo?
C'est une newsletter qui donne des idées de voyage et renvoie vers des offres pour lesquelles nous sommes rémunérés au clic ou non. Une équipe éditoriale sélectionne les meilleurs «leads» de la semaine et, en fonction des accords que nous avons ou pas, nous percevons des commissions. Maintenant que nous totalisons plus de deux millions d'inscrits à notre newsletter, nous sommes parvenus à signer des accords avec la plupart des sites.
Quelle est la ventilation du chiffre d'affaires du groupe sur ces différentes activités?
En gros, un peu plus de la moitié de notre chiffre d'affaires est réalisée sur le site PriceMinister. Le reste du chiffre d'affaires est réparti de manière assez équilibrée entre le voyage, l'automobile et l'immobilier.
Quels sont vos projets phares pour 2009?
Nous avons lancé l'Angleterre sur PriceMinister, officiellement depuis début février. C'est une grosse ambition d'aller attaquer le marché anglais, qui est le plus grand d'Europe. C'est une porte vers les pays anglophones et cela représente donc un enjeu important. Par ailleurs en France, nous visons plus de 30% de croissance sur PriceMinister. Quand on regarde les sites d'e-commerce cotés en Bourse, les progressions sont en effet plutôt de l'ordre de 10 à 15%. Vouloir progresser de 30% est donc ambitieux. Mais nous pensons que la crise ne va pas nous freiner, au contraire, elle va peut-être nous aider un peu. Les consommateurs vont vouloir acheter moins cher et vendre pour récupérer du cash.
@ P. Lesage
Pierre Kosciusko-Morizet cofondateur du groupe PriceMinister et président de l'Acsel
Comment percevez-vous la crise actuelle, en tant que président de l'Acsel. Aura-t-elle, selon vous, des répercussions notables sur l'e-commerce français?
Oui, je pense que la crise va ralentir la croissance. Tout simplement parce que les gens vont dépenser un peu moins. Globalement, la consommation va plutôt diminuer, mais le report du off line vers le on line va, quant à lui, continuer à s'opérer au même rythme.
Vous avez pris la présidence de l'Acsel en novembre dernier et l'association a changé de positionnement. Quelles en seront les lignes directrices?
Nous sommes en train de structurer l'association. Nous avons acté le fait que nous étions l'association de l'économie numérique avec un positionnement très transverse. Nous avons 180 membres et ces derniers viennent chez nous pour avoir accès à différents types d'acteurs et traiter de problématiques transversales. C'est cela la vocation de l'Acsel. Certains chantiers sont en cours comme la logistique de l'e-commerce ou encore le Rich Media et le fait que la plupart des commerçants en ligne sont aussi des médias. Ou encore l'identité numérique et comment cela va se gérer. Des sujets sur la mobilité, aussi... Les trois opérateurs sont membres, ce qui est une chance pour traiter ce type de sujet!
Pour que l'Internet parle d'une seule voix, les actions de lobbying des associations ne devraient-elles pas être plus efficaces?
Il y a effectivement un gros déficit de lobbying car nous avons moins de moyens que d'autres industries plus installées. Sur Internet, ces moyens restent modestes. L'Acsel est une grosse association de l'Internet, mais elle ne compte que trois permanents. De plus, le lobbying auprès des parlementaires notamment se fait surtout auprès des élus locaux, et l'Internet reste assez parisien. Le député ou le sénateur, lorsqu'il est dans sa circonscription, ne va pas forcément entendre parler de l'Internet, ou plutôt en mal... Nos parlementaires ne se rendent pas forcément compte de l'intérêt qu'ils auraient à défendre ce média ni de l'impact représenté par Internet sur l'opinion.
Quel est votre point de vue sur le plan d'action France numérique 2012? Quelles en sont les mesures phares?
J'ai apprécié la quatrième licence, je pense que c'est positif. Pour les consommateurs, le fait qu'il y ait davantage de concurrence est une bonne chose. Des moyens ont été débloqués pour passer au tout numérique pour la télévision et c'est également une bonne chose. En effet, il s'agit là d'un prérequis pour ensuite pouvoir utiliser des fréquences, ce que l'on appelle le «dividende numérique», et donc pour avoir accès à de l'Internet très haut débit.
Le report du off line vers le on line va continuer à s'opérer au même rythme.
Quel impact ce plan peut-il avoir sur l'économie du Web, concrètement?
Le dividende numérique aura un impact d'ici deux à trois ans. Cela permettra d'être en très haut débit, partout et pour tout le monde. Notamment dans des zones où cela reste très compliqué de pouvoir câbler. Actuellement, encore plusieurs millions de Français n'ont pas accès au haut débit. D'autre part, les bénéfices se feront aussi sentir en termes de mobilité. Et l'Internet devient de plus en plus mobile.
Le groupe PriceMinister
Créé par Pierre Kosciusko-Morizet, Pierre Krings, Justin Ziegler et Olivier Mathiot en août 2000, PriceMinister est le leader européen de l'achat- vente garanti sur Internet avec son site Priceminis- ter.com, lancé en janvier 2001. Le groupe est aujourd'hui constitué de quatre pôles: l'achat- vente garanti, l'automobile, renforcé en 2007 avec le rachat de Mixad/321Auto, l'immobilier, ouvert en 2007 avec l'acquisition d'A Vendre à louer, et le voyage-tourisme, créé avec les reprises en 2007 de Planetanoo, puis de Voyager Moins Cher et Billet Moins Cher.
La loi Chatel a été décriée par le secteur de l'e-commerce l'année dernière. Pensez-vous que plus de régulation soit nécessaire en ligne pour protéger les consommateurs?
Il faut réguler bien sûr. Le problème est de faire des règles qui soient justes et surtout qui ne freinent pas le développement des entreprises. On communique bien dans l'Internet, donc, vu de l'extérieur, on a l'impression que nous sommes d'énormes entreprises.
Or nous sommes à la fois gros, et en même temps, très petits par rapport à des groupes comme TF1 ou à de grosses radios. Typiquement, nous souffrons de cela. D'être de gros médias qui monétisent assez peu leurs modèles, car l'essentiel de l'Internet reste gratuit, et la publicité est relativement peu chère. On nous pense importants là où on ne l'est pas, notamment en termes de solidité financière. Aussi, vouloir rajouter des taxes sur un métier qui est trop jeune, c'est le mettre en danger. De plus, cela crée des disparités entre pays car nous sommes concurrents entre nous mais aussi avec des pays étrangers, non soumis aux mêmes taxes. Malheureusement, je pense que les gouvernements ne se posent pas assez cette question-là.
Vous êtes un fervent partisan du statut de l'auto-entrepreneur, lancé en janvier dernier. Pourquoi et qu'en attendez-vous?
Pour moi, il s'agit d'une étape intermédiaire entre le fait d'être un particulier et le fait de créer sa société. Ce n'est pas seulement une transition, on peut rester dans cette étape si le but est de générer du revenu supplémentaire. C'est une manière de mettre le pied à l'étrier et tout se passe par Internet. Je pense que, sur PriceMinister, ce nouveau statut va simplifier la vie à un certain nombre de nos vendeurs.
Parmi vos activités, vous êtes également associé fondateur de l'Isai, un fonds d'investissement dédié à l'amorçage et au développement de jeunes pousses. En temps de crise, l'innovation est-elle toujours soutenue?
La loi qui permet à ceux qui payent l'ISF de défiscaliser une partie de leur impôt en investissant dans de petites entreprises est une très bonne mesure. L'innovation est soutenue en partie par ces investisseurs-là. Nous avons lancé le site de l'Isai en décembre dernier, mais nous en parlions depuis plus d'un an.
L'idée est de dire que lorsque l'on monte une entreprise, on trouve toujours les premiers fonds, les premières dizaines de milliers d'euros. Quand on devient plus gros et qu'on veut chercher plus d'un million cinq cent mille euros, on trouve également des fonds. En revanche, entre ces deux stades, pour lever entre 500 000 et 1,5 million d'euros, une entreprise ne trouve personne! Cela s'appelle l'«equity gap», une notion qui a d'ailleurs été théorisée. L'Isai s'occupe de cette tranche-là. Elle d'autant plus importante qu'en tant de crise, les fonds sont un peu frileux. Nous aurons donc plus de bons dossiers et moins de concurrence pour les financer.
Quelle est la marche à suivre pour se faire connaître auprès de l'Isai?
Il faut aller sur le site Isai.fr et déposer un dossier. Nous en avons reçu 200 en trois semaines et de nombreux investisseurs sont intéressés. Il faut maintenant choisir les meilleurs et bien les accompagner. Le vrai travail démarre maintenant pour nous.
Pour lever entre 500000 et 1,5 million d'euros, une entreprise ne trouve personne!