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Castorama entame une mue axée sur une union sacrée entre marketplace et magasins

Publié par Emmanuelle Serrano le | Mis à jour le

La semaine dernière Kingfisher, maison mère de l'enseigne de bricolage de décoration et d'aménagement de la maison Castorama, a annoncé qu'elle allait devoir restructurer sa filiale, notamment en modernisant et en optimisant son réseau de magasins. Le développement de l'e-commerce (6 % des ventes de Castorama France avec un focus important sur le drive) fait également partie des axes stratégiques retenus par Kingfisher pour relancer Castorama, qui a annoncé le 21 mars la création d'une marketplace avec un objectif de 500 000 références. Romain Roulleau, directeur marketing, digital et clients de Castorama France, nous explique les chantiers déjà accomplis et ceux qui restent à exécuter.

Un projet clair pour franchir une nouvelle étape en France avec un objectif de marge opérationnelle de 5 à 7% pour un Castorama « à l'organisation simplifiée » et « à la performance significativement améliorée », telle est la promesse faite le 25 mars par Kingfisher aux marchés et à ses actionnaires lors de la publication de ses résultats annuels pour l'exercice clos le 31 janvier 2024. Le chiffre d'affaires global du Britannique en France a reculé de 5,9% sur cette période par rapport à l'exercice précédent. Le groupe veut désormais tirer parti du potentiel de Brico Dépôt (taux de pénétration du e-commerce : 5%) et remonter la marge opérationnelle de ses activités en France à un seuil compris entre 5-7%. A partir d'avril, le niveau de direction France de Kingfisher est supprimé pour renforcer la rapidité décisionnelle au niveau des enseignes. Alain Rabec, directeur général (DG) de Kingfisher France, part en retraite en septembre, tandis que Pascal Gil devient DG de Castorama France. Laurent Vittoz reste à la direction de Brico Dépôt, l'enseigne low cost du groupe.

directeur marketing, digital et clients de Castorama France

« Castorama, qui fête ses 55 ans cette année, a mis l'accent sur les premiers prix, a relancé un programme de fidélité particulièrement généreux, que ce soit pour les particuliers, mais également avec une offre dédiée aux professionnels ouverte dans un certain nombre de magasins. Nous essayons vraiment d'attaquer ce sujet-là et de nous positionner de manière très compétitive, quels que soient les besoins et les envies de nos clients. Nous avons des clients qui cherchent de l'accompagnement, d'autres qui sont très experts et veulent aller directement au produit. Le fait que nous ayons trois enseignes nous permet d'être présents sur tous ces segments », observe Romain Roulleau, directeur marketing, digital et clients de Castorama France.

Redynamiser les ventes en magasins

Les magasins Castorama sont mis au coeur de ce plan de redynamisation des ventes physiques avec la volonté d'augmenter le chiffre d'affaires au mètre carré. « Castorama exploite 95 magasins en France dont un tiers sont les surface de vente les moins performantes de notre portefeuille » , relève Kingfisher dans ses résultats annuels. « Nos magasins sont au centre de la stratégie digitale du groupe et ses enseignes. Ils constituent un maillon essentiel de notre organisation de drive-to-store et de ship-from-store. Une partie très importante de nos livraisons à domicile se fait à partir de nos magasins. Il y a aussi de la livraison à domicile qui se fait à partir de centres d'expédition centraux. Mais nous ne sommes pas très tournés vers les entrepôts. C'est d'abord sur les magasins que nous nous appuyons », affirme clairement Romain Roulleau, directeur marketing, digital et clients de Castorama France. Le site draine aussi du trafic vers les points de vente physiques : il affiche 10 à 15 millions de visiteurs uniques chaque mois.

Des mesures introduites dans le cadre du plan Powered by Kingfisher en 2020, ont aussi fait effet. Il a notamment consisté à redonner plus de responsabilités aux enseignes qui sont différentes d'un pays à un autre. « France et Pologne partagent la même marque mais le positionnement, la politique commerciale de Castorama Pologne ne sont pas obligatoirement identiques à ceux de Castorama France. « Dans l'Hexagone, nous avons développé depuis trois ans, un nouveau format de magasin de proximité, les « Casto ». Il y en a trois actuellement et nous allons continuer à les développer dans les mois et années à venir. Aujourd'hui, nous avons décidé d'avoir un travail précis, magasin par magasin, en les modernisant et en remettant des moyens là où il faut, comme il le faut afin de servir au mieux notre stratégie en matière d'omnicanalité. Le digital a pris une part très importante dans les ventes en ligne mais le parcours client a aussi un rôle très structurant » ajoute le directeur marketing, digital et clients.

La marketplace, un chantier stratégique

Leroy Merlin a lancé sa marketplace en 2020, Bricoman a fait de même en 2022 en annonçant un doublement de son offre en mai de la même année, après l'avoir lancée en janvier de la même année. Castorama s'y attelle cette année. Un brin tardive comme initiative ? « Comme Decathlon, Kingfisher a la particularité de vendre des produits qu'il conçoit (NDLR : les « own exclusive brands ou OEB »). Ce ne sont pas de simples marques de distributeurs comme chez beaucoup de retailers. Cela a représenté environ 45% des ventes du groupe sur cet exercice (5,7 milliards de livres en 2023/2024, soit 6,66 milliards d'euros). Cela veut dire que l'ouverture de la marketplace a été réfléchie à l'aune de la stratégie de chacune de nos enseignes en Europe. En France, nous avons Castorama, Brico Dépôt et aussi Screwfix (NDLR : 22 comptoirs), plus tournée vers les pros et qui se développe rapidement au niveau national. Compte tenu de cette spécificité, cette place de marché a nécessité 3 ans de réflexion avant de se matérialiser », explique Romain Roulleau. En plus des 70 000 références produits proposés par Castorama France, la marketplace devrait rapidement en ajouter 500 000, ce qui démontre la forte ambition de l'enseigne dans ce domaine.

Castorama France insiste sur la complémentarité entre magasins et marketplace et sur l'absence d'opposition entre l'expérience en magasin et celle sur le site. « Lorsqu'un client rentre dans un Castorama, il a des produits complémentaires, parfois même concurrents de nos propres produits. Mais au bout du compte, le vendeur qui est face au client, dispose d'une offre « augmentée ». Il a donc la capacité de proposer des projets beaucoup plus complets à la clientèle. y compris quand ce sont des produits marketplace non vendus dans son magasin. » Le groupe capitalise aussi sur les expériences passées puisque l'enseigne généraliste miroir de Castorama au Royaume-Uni B&Q a expérimenté cette organisation il y a deux ans avec des résultats encourageants. « Aujourd'hui, 30 à 35 % des ventes de B&Q sont faites via la marketplace et c'est bien un objectif partagé sur l'ensemble de nos activités, que l'on parle de Castorama France ou Pologne, pays où la marketplace sera déployée prochainement. », complète le manager. La Pologne est un des marchés stratégiques pour le développement de Castorama en Europe puisque Kingfisher prévoit d'ouvrir jusqu'à 75 magasins de formats moyen et de proximité sur 5 ans dans ce pays.

Cultiver une relation de qualité avec les marchands

Un point essentiel pour qu'une marketplace soit profitable et soit performante réside aussi dans la qualité de la relation avec les marchands. « Aujourd'hui, il y a beaucoup de marketplaces comparables aux nôtres, dont des généralistes comme Amazon entre autres. Mais ce qui ressort de notre analyse, c'est que la proximité avec le marchand est un élément très structurant du succès d'une marketplace. Nous ferons donc de l'expérience marchand un point focal de notre projet. Grâce à un ensemble de technologies, nous réaliserons des analyses plus fines des marchands en amont, afin de mieux animer cette relation avec eux et d'améliorer notre capacité à savoir quels produits doivent être référencés en priorité », conclut Romain Roulleau.