SALON - Europe : un marché fragmenté mais riche d'opportunités
Publié par François Deschamps le | Mis à jour le
Avec plus de 300 milliards d'euros de chiffre d'affaires, l'Europe est numéro un mondial du e-commerce. Dans le cadre d'une conférence Acsel lors du salon E-Commerce Paris 2013 , Susanne Czech (Emota), et Thierry Petit (Showroomprive.com), reviennent sur cette grande opportunité européenne.
L'internationalisation est une étape importante dans la vie d'un e-marchand. Avant de se lancer dans une telle aventure, beaucoup de questions doivent être posées. Quel pays choisir, quel est son potentiel d'activité, quelles sont les règles légales à connaitre... Ces interrogations prennent tout leur sens sur le marché européen, dont la physionomie protéiforme et les spécificités qui en découlent, n'en font pas moins un incroyable relais de croissance pour les sites marchands.
En effet, en 2012, la croissance du e-commerce en Europe est de 20%, pour un montant global des dépenses en ligne de 300 milliards d'euros. C'est plus que les Etats-Unis et plus que la région Asie, ce qui en fait le premier marché au monde en terme de chiffre d'affaires.
" Trois grands marchés dominent l'Europe, il s'agit du Royaume-Uni, de l'Allemagne et de la France, souligne Susanne Czech, secrétaire générale de l'Emota, l'association chargée de défendre les intérêts des e-marchands en Europe. Ces trois pays génèrent 60% du chiffre d'affaires en Europe. Néanmoins, les pays du sud de l'Europe connaissent une forte croissance, tout comme les pays scandinaves ".
Les tendances qui régissent l'évolution de ce vaste marché ressemblent beaucoup à celles identifiées en France. " Tout d'abord, dans l'e-commerce européen, le client est roi, indique Susanne Czech. Il cherche beaucoup d'informations sur Internet, déniche les bonnes affaires, et n'hésite pas à aller chez le concurrent, qui par ailleurs, ne se trouve qu'à un seul clic de souris. " Un client-roi doit être bien traité, car en cas de mauvaise expérience d'achat, il peut diffuser très rapidement une mauvaise image du e-marchand, notamment grâce aux réseaux sociaux. Autres tendances fortes, le Web-to-store, ainsi que le showrooming, reflètent un changement fondamental du comportement de consommation. " Tout ceci s'accompagne évidemment de l'explosion des smartphones et des tablettes, à la fois en tant qu'outil de recherche, qu'outil d'achat ".
Vers un marché européen unifié ?
Les fortes disparités qui existent au sein de l'Europe, ont jusqu'alors freiné les échanges transfrontaliers. Mais Susanne Czech ne baisse pas pour autant les bras. " D'ici 2015, 50% des consommateurs en Europe devrait acheter en ligne, et 20% dans un autre pays d'Europe ". Pour l'heure, cet objectif est encore loin d'être atteint. Selon Eurostat, en 2013, seuls 10% à 11% des consommateurs achètent dans un pays autre, que celui dans lequel ils résident.
Il faut dire que les freins au développement du e-commerce transfrontalier sont encore nombreux : Lois différentes selon le pays d'achat et/ou de vente, moyens de paiement spécifiques, règles de protection des données personnelles à géométrie variable, délais et frais de livraisons non unifiés, etc.
Mais l'Union européenne travaille activement à harmoniser le cadre réglementaire, afin d'aider à créer une cohérence entre les pays, sur tous ces points. " Mais l'UE doit encore faire face à la peur des gouvernements nationaux d'une ingérence trop forte de l'Europe dans le droit national ", déplore Susanne Czech.
" Nous ne devons pas attendre les politiciens pour agir "
Malgré ces apparentes difficultés, certains e-commerçant français ont fait le pari de s'internationaliser en Europe. C'est notamment le cas de Thierry Petit, co-fondateur du site de ventes événementielles Showroomprive.com. A la tête d'une société qui devrait générer pas moins de 350 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2013, il croit au potentiel de l'Europe : " 25% de notre activité provient de l'international. L'Europe est capital pour Showroomprivé car beaucoup de marques de mode avec lesquelles nous travaillons sont européennes, et ont une notoriété mondiale ". Aussi, le principal concurrent de Showroomprivé, le géant Vente-Privée.com, " très fort en France, ne l'est paradoxalement pas tant que ça en Europe ". C'est donc un moyen de gagner " facilement " des parts de marché, et gagner en croissance et donc en chiffre d'affaires.
Mais Thierry Petit reste lucide et réaliste sur les difficultés de conquérir ce vaste marché. " Il a la particularité d'être très fragmenté, sur le moyens de paiements par exemple, mais aussi sur les lois, ou encore le niveau de maturité du consommateur, qui soulève de vraies questions sur la manière dont le site doit se positionner ".
Par exemple le consommateur espagnol va avant tout rechercher des prix très bas, tandis que dans les pays plus matures comme le Royaume-Uni ou les pays scandinaves, c'est la qualité de service et l'expérience d'achat associée à l'offre qui prévalent.
Mais Thierry Petit maintient le cap. Et en dépit de toutes ces différences, difficultés, et autres freins, reste convaincu de l'intérêt de s'internationaliser en Europe, et de le faire rapidement : " L'Europe est complexe mais accessible à tout le monde. " Il ne faut pas attendre que les politiques prennent des décisions pour agir, au risque d'arriver trop tard ".