Grégoire Borgoltz, Picnic : "Nous sommes capables de livrer 1 600 000 foyers."
Publié par Lisa Henry le | Mis à jour le
L'enseigne de supermarché en ligne Picnic a posé ses cartons en France en avril 2021, avec un premier hub dans la banlieue de Valenciennes. Depuis, la marque a ouvert 14 entrepôts dans l'Hexagone, s'offrant ainsi la capacité de livrer 1 600 000 foyers. Rencontre avec Grégoire Borgoltz, directeur des opérations de Picnic France, qui détaille la stratégie de cette enseigne du quick commerce pas comme les autres.
Vous êtes arrivé en France en même temps que la vague du quick commerce (Gorillas, Flink, Getir...). Aujourd'hui presque toutes ces entreprises sont en faillite, mais pas vous. En quoi avez-vous réussi à vous différencier de ces acteurs ?
Lorsque nous nous sommes lancés sur le marché français, certaines personnes nous qualifiaient de "slow commerce". En effet, nous proposions déjà une livraison à j + 1 contre en quelques minutes pour des acteurs comme Gorillas. De plus, notre expansion a été bien plus lente, après six mois d'implantation, nous n'avions toujours qu'un entrepôt, quand les autres acteurs en avaient une vingtaine. Je pense que sur le long terme, tout ça a joué en notre faveur. Nous avons pris le temps d'évaluer le marché, de réfléchir à comment nous étendre, créer notre supply chain de toutes pièces, ainsi qu'une offre qui a du sens.
Sur l'offre, justement, nous ne proposions pas vraiment la même chose que ces acteurs. Eux se positionnent principalement sur des courses d'appoint, avec des paniers moyens de 15,20 euros. Nous, nous proposons près de 10 000 produits, un assortiment complet, donc pour de vraies courses de début de mois, nos paniers moyens tournent plus autour des 40 euros.
Nous ne ciblions pas vraiment les mêmes populations. La preuve, nous avons implanté notre premier hub à en banlieue de Valenciennes, quand les autres acteurs se sont tous rués sur le centre parisien. Je pense qu'en ciblant les familles qui se font livrer leurs courses hebdomadaires ou mensuelles, nous avons pu fonctionner sur le long terme. C'est en prenant notre temps sur la réflexion de cette stratégie que nous avons réussi à tirer notre épingle du jeu selon moi.
Quels types de foyers composent votre clientèle ?
En France, notre clientèle est composée à 65 % de familles, un petit tiers est composé de couples, puis le reste de personnes vivant seules (moins de 10 %). Si nous livrons surtout des familles, c'est principalement lié au créneau fixé à l'avance. Quand on a deux enfants qui rentrent de l'école à une heure précise, il est plus simple de planifier une livraison.
Se faire livrer ses courses est entré dans les moeurs lors de la crise sanitaire, mais reste une tendance peu répandue. Comment "convertissez-vous" de nouveaux clients ?
Au moment de notre implantation, nous avons bénéficié du travail d'évangélisation du drive, bien installé dans les foyers français depuis 15 ans. Cependant, nous avons aussi hérité de sa mauvaise réputation. Les nouveaux clients de notre enseigne ont du mal à passer le cap de l'achat de produits frais ou fragiles. Nous avons donc pour mission de leur redonner confiance. Au bout de quelque temps, quand les commandes se passent bien, nous observons que les clients commencent à acheter une tomate, puis, si tout s'est bien passé lors de la livraison, des oeufs etc. C'est un travail de longue haleine qui nous demande un service client irréprochable.
Car, avec 4 000 livraisons par jour, il y a toujours des erreurs possibles. Notre approche dans ce cas est de proposer un service client type Amazon, où le client est roi. Nous proposons de faire une réclamation sur l'application directement, en cas de produit manquant ou abîmé. Le client peut alors choisir d'être remboursé ou bien le produit est rajouté gratuitement à ses prochaines courses. Nous ne posons pas plus de questions lors des réclamations, pour éviter les processus longs et irritants pour les clients. De notre côté, on va commencer à vérifier la véracité des réclamations si elles sont trop fréquentes, ou sur des montants élevés.
En plus de la qualité du service client, nous nous engageons à remonter à la source de chaque erreur afin qu'elle ne se reproduise pas.
Comment fonctionnent les livraisons en j + 1 ?
Notre système de livraison ressemble un peu à une tournée de la poste. Nous proposons deux créneaux horaires le lendemain de la commande, ce qui nous permet de créer une densité de livraison optimisée. Nous livrons en moyenne 12 clients par tournée de 1h30, dans un rayon de 11 km ou 30 minutes du hub où les commandes sont préparées.
Qu'est-ce qui différencie votre supply chain de celle d'autres acteurs ?
Une de nos forces, peut-être une de nos faiblesses aussi, est que nous faisons tout nous-même. De la gestion des entrepôts à la flotte, nous avons tout créé et nous gérons tout. Nous avons une flotte de 350 véhicules électriques, nos livreurs sont en contrat chez nous. Même au premier jour, nous n'avons jamais fait appel à des auto-entrepreneurs, ce qui nous a évité d'être concernés par toutes les problématiques rencontrées par Deliveroo et Frichti notamment. Cela nous permet plus de liberté et de flexibilité.
Aujourd'hui, nous avons 14 hubs d'environ 1 500 m2. Nous nous faisons livrer par nos fournisseurs dans nos centres de préparation de commande (nous en possédons un dans le Nord et un en région parisienne). C'est ensuite dans ces espaces de près de 20 000 m2 que les commandes sont préparées tous les matins avant d'être expédiées vers les hubs qui les chargent dans nos véhicules électriques pour les livrer aux clients.
Quels sont les futurs projets de Picnic en France ?
Nous cherchons actuellement à ouvrir un hub en petite couronne, mais nous ne trouvons pas d'endroit qui nous convienne et ce, malgré 10 mois de recherche, déjà.