LeWeb'13 - Le meilleur de la dernière journée
Publié par François Deschamps le | Mis à jour le
La troisième journée de la conférence LeWeb'13 est lancée, aux Docks de Saint-Denis. Sélection des moment forts.
La troisième et dernière journée de l'événement LeWeb'13 a débuté par une intervention de Bruno Patino, senior vice président des programmes chez France Télévisions, et Kenneth Estenson, senior vice président de CNN.com. Au coeur des échanges, l'avenir de la télévision, pour les dix années à venir. Un exercice de prospective peu évident, dans un contexte ou la télévision est en pleine mutation, concurrencée par le digital.
La télévision peut-elle regagner des parts de marché sur l'Internet ? Selon Bruno Patino, la question ne se pose pas vraiment en ces termes. " Ce qui est rassurant, c'est que la vidéo n'a jamais été aussi présente, elle est partout ". Un postulat bien intégré par France Télévisions qui s'inscrit dans la volonté " d'embrasser la logique ATAWAD (Anytime, Anywhere, Anydevice), ainsi que les logiques de partage sur les médias sociaux notamment ".
Chez CNN, il y a une conscience très forte de la rupture créée par le digital et les supports, avec la télévision. " Notre compte Twitter compte 14,5 millions de followers, et notre compte Facebook en recense 7,7 millions. Ces publics sont très différents, c'est pourquoi nous publions un contenu différent selon la plateforme sociale, un contenu adapté aux deux types de publics ".
Et cela n'est pas tout. " Selon les moments de la journée, nos téléspectateurs n'utilisent pas le même support pour suivre nos programmes, il faut donc adapter le contenu avec le moment et le contexte, explique Kenneth Estenson. Tous ces éléments nous servent aussi à construire nos programmes ". Par exemple, CNN pourrait envisager de diffuser les actualités entrant dans le cadre des " Breaking News ", en priorité sur le Web, avant la télévision donc.
Une autre évolution concernerait le rôle et l'usage même du second écran au sein des foyers, et Bruno Patino a une idée très précise sur le sujet : " le second écran fournit une expérience individuelle, tandis que le premier écran, la télévision donc, fournit une expérience collective. Le challenge est de réussir à les faire interagir entre eux ". L'exemple des tweets envoyés par les téléspectateurs pendant les programmes politiques du type " Mots Croisés " sur France 2, illustre tout à fait cette idée.
Enfin, le dernier point relève de la manière dont la publicité peut s'intégrer à ces nouveaux usages, et supports de diffusion. " France Télévisions, on le sait bien , est limitée sur l'usage de la publicité, mais les opportunités sur le digital sont très importantes ".
Arnaud Montebourg, chantre de l'innovation à la française
Non prévu au programme initialement, Arnaud Montebourg s'est invité à la table des débats, et n'a pas boudé son plaisir. Il s'est posé en ardent défenseur de l'eco-système économique français, pour l'accueil et l'évolution des startups notamment. Face à Loic Le Meur et à Jeff Clavier, fondateur de SoftTech VC, qui conseillait en octobre 2012 lors du mouvement des pigeons, de quitter l'hexagone, le ministre du Redressement productif a réaffirmé sa volonté de créer les conditions favorables au développement de la net-économie en France.
"L'efficacité économique et l'innvovation en France ne sont pas incompatibles avec le modèle social français", a-t-il martelé à plusieurs reprises. Plutôt sceptiques, ses interlocuteurs ont pointé du doigt une différence fondamentale entre les entreprises anglo-saxonnes et françaises. "Certains entrepreneurs voudraient embaucher plus et licencier davantage, car c'est grâce à cette flexibilité que les startups peuvent grandir rapidement, et s'adapter facilement", explique Loic Le Meur.
Et Arnaud Montebourg de rétorquer : " Mais nous ne sommes pas en Californie. Ici c'est la France, et nous avons pour tradition d'aider les gens et de les protéger. Il faut trouver le bon équilibre, ca doit faire l'objet de discussions. Et cela n'empêche pas la France d'être créative, innovante, et performante". Le tout sous la bannière "Liberté, Egalité, Fraternité".
"Mais n'est-ce pas un peu vieux jeu? La France ne devrait-elle pas revoir cette position?"
A. Montebourg : "Mais tu es Français ou pas? Tu devrais te rappeler ce que la France t'a donné!", lui a-t-il lancé en plaisantant, mais à peine.
Par ailleurs, interpelé par Jeff Clavier sur l'entêtement du gouvernement français à s'opposer à certaines acquisitions de sociétés françaises par des géants étrangers, et notamment au rachat de Dailymotion par Yahoo!, Arnaud Montebourg a justifié sa position : "C'est notre souveraineté de choisir quel deal nous voulons faire ou pas. Nous sommes actionnaires chez Orange (propriétaire de Dailymotion), je vous le rappelle. Par ailleurs, il existait un risque que Yahoo tue dailymotion une fois acquis, car ils l'ont déjà fait dans le passé. Dailymotion est une pépite française, et nous voulions la traiter comme telle. Cela n'empêche pas la France d'être la première destination des investissements américains". Ce à quoi Jeff Clavier a tenu à lui préciser : "Je ne suis pas là pour vous convaincre, je veux juste vous aider à garder vos entrepreneurs".
Enfin, interrogé sur le service de chauffeurs Uber, et l'obligation légale de respecter un délai de 15 minutes avant de prendre un passager afin de ne pas concurrencer les taxis traditionnels, Arnaud Montebourg est apparu plus conciliant.
"Nous sommes conscients des opportunités que peuvent représenter des société comme Uber, en terme de croissance et de création d'emplois. Mais les taxis en majorité sont des personnes qui travaillent seules, avec un statut d'artisan. Là encore, c'est un arbitrage, une quête d'équilibre, et nous devons les accompagner en douceur à travers le changement, afin d'assurer une transition progressive".
Loic Le Meur voit en ce mode de fonctionnement une contradiction : "Les startups sont disruptives par nature. C'est là leur culture et leur manière de grandir. En France, on tient à tout prix à protéger le passé, n'est-ce pas contradictoire?" Mais encore une fois, Arnaud Montebourg maintient son cap :"Les gens 'du passé' ont aussi le droit de vivre, donc nous y allons lentement. C'est une question d'équilibre, de nuances si vous préférez".
Fleur Pellerin rêve d'un Nasdaq européen
Après Arnaud Montebourg, c'est Fleur Pellerin, ministre en charge de l'Économie numérique, qui est passée sur le fauteuil de Loic Le Meur. Moins mesurée que le ministre du Redressement productif, Fleur Pellerin plaide véritablement en faveur d'un coup d'accélérateur pour le soutien au développement des startups en France. "Nous voulons faire de la France une nation de startups". Une ambition forte, armée d'objectifs clairs : "être leader sur la big data, sur l'internet des objets et enfin avoir un Nasdaq européen".
Pour cela, elle sait qu'elle devra contribuer à faire évoluer les mentalités, et construire une culture de l'entreprenariat en France et notamment chez les jeunes. "Et pas seulement à Paris, mais partout en France".
Néanmoins Fleur Pellerin se veut positive : "Il n'est pas rare d'entendre les jeunes exprimer leur envie de créer leur propre entreprise. J'essaye donc de créer un eco-système favorable à cette dynamique, avec les investisseurs, les entreprises, les universités, les jeunes entrepreneurs, etc".
Par ailleurs, Fleur Pellerin a réaffirmé sa volonté de soutenir le Crowdfunding en France : "j'ai beaucoup d'ambition pour ce concept car c'est une grande opportunité pour la France. J'ai d'ailleurs effectué une centaine de propositions allant dans ce sens".