www.voyages-sncf.com/Neuf ans d'Internet pour faire préférer le voyage
Rétrospective L'émergence d'Internet aura permis à la SNCF de vivre sa deuxième révolution historique et de muer de société nationale à start-up ultraperformante, n° 1 de sa catégorie. Neuf ans d'audace couronnés de succès.
Je m'abonnePremier site e-commerce, premier voyagiste en ligne et bientôt premier canal de distribution de la SNCF, Voyages-sncf collectionne les bonnes notes. Un modèle de réussite. Une fleur à la boutonnière de l'industrie du commerce électronique made in France… le tableau est idyllique, les résultats, presque insolents. Et tout cela en à peine neuf ans d'exercice. Hommage à la précocité de ce bon élève qui, dès 1997, avait posé ses jalons sur le worldwideweb sans se douter, à l'époque, que ce simple canal virtuel allait transformer l'entreprise publique en première start-up de France.
Carnet de voyages
Depuis, bien des progrès ont été accomplis et des paris remportés, la métamorphose est presque achevée, mais nombreuses ont été les étapes qui ont conduit notre Compagnie nationale des chemins de fer à sa transformation en première agence de voyages en ligne de l'Hexagone. L'embryon se forme en 1997, dans l'éprouvette d'un groupe d'informaticiens de la SNCF. Passionnés d'Internet, nos gaillards imaginent de dupliquer les services accessibles sur Minitel en les adaptant aux technologies du Web. Horaires des trains et informations générales pour les voyageurs sont, dès lors, consultables sur sncf.com, première version de l'actuel Voyages-sncf. Un an plus tard, les voyageurs peuvent effectuer des réservations sur les trains grandes lignes et obtenir l'envoi gratuit des billets à domicile. Le premier pas vers l'e-commerce est franchi. Le deuxième, accompli en 1999, consacre la nature marchande de sncf.com qui ajoute une plate-forme sécurisée pour le paiement des billets par CB. Les retours sont significatifs : l'exercice 1999 est bouclé avec 23 ME de CA dégagés des ventes sur Internet. De quoi convaincre les dirigeants de la SNCF qu'il est temps d'aller encore plus loin.
Naissance d'une filiale
C'est en 2000 que le projet d'informaticiens prend des allures de projet industriel classé prioritaire par la SNCF. Bien résolue à occuper le terrain du on line, elle décide alors “d'autonomiser” la structure dédiée à Internet. Une filiale 100 % qui doit donner tout son élan à la montée en puissance du commerce électronique est créée : voyages-sncf.com est née. Et le mot “voyages” en dit long sur les intentions de la SNCF dans ce domaine. Car pourquoi se contenter de vendre du train en ligne quand on peut vendre de l'avion, avec une même structure sous une même marque ? La SNCF n'en fait pas mystère. Son objectif avoué : transformer son site en portail de voyages proposant du train, bien sûr, mais aussi toute sorte de produits et services complémentaires. Entre septembre et décembre de la même année, l'idée prend forme, le portail se structure au sein de GL e-commerce, une holding créée pour scruter toute opportunité de développement sur le Net par l'analyse des comportements des internautes. Ainsi, une étude consacre définitivement la pertinence des projets e-commerce. Pour couronner le tout, les résultats tirés du on line, en 2000, sont quatre fois plus élevés qu'en 1999. Le chiffre d'affaires atteint 91 millions d'euros. Il est temps de passer à la vitesse supérieure.
Voyages, gloire et nouveautés
Plus tourmenté, très médiatisé, l'exercice 2001 est sans doute celui qui restera gravé dans les mémoires. Pour bâtir son offre de voyages, la holding GL e-commerce recherche un partenaire. Mais pas n'importe lequel. Le candidat doit maîtriser à la fois l'univers du tourisme et celui des technologies Internet. Un appel d'offres est alors organisé. Les candidats nationaux se bousculent au portillon mais c'est l'américain Expedia, filiale de Microsoft et leader du voyage en ligne aux Etats-Unis qui remporte la mise. Dédaigner le marché national pour ouvrir la voie royale à la concurrence américaine ? Le marché français ne cache pas sa déception : on comprend mal qu'une entreprise d'Etat déroule le tapis rouge à un concurrent étranger. Certains médias vont jusqu'à soupçonner la SNCF d'organiser le démantèlement des services publics en détournant progressivement les flux de voyageurs des canaux traditionnels, téléphone et guichet, vers celui moins coûteux et jugé destructeur d'emplois qu'est Internet. Le choix d'un partenaire bien franchouillard aurait-il permis d'éviter ce scénario supposé ? Impavide, la SNCF fait valoir les hautes compétences technologiques de son partenaire, ses accords stratégiques avec des acteurs clés du tourisme tant à l'échelle européenne que mondiale. De cette alliance naît alors le joint-venture entre SNCF GL e-commerce (53 % des parts) et Expedia Inc. (47 %), symboliquement baptisé GL-Expedia. Dès sa première année d'exercice, les résultats de GL-Expedia stoppent net la contestation ambiante : fin 2001, le CA en ligne atteint 162 ME (+ 80 % vs 2000) et, dès 2002, l'équilibre est atteint. La métamorphose en véritable agence de voyages est achevée. Pour soutenir cette croissance et capter un maximum de parts de marché du voyage en ligne, Voyages-sncf amorce une intense phase de diversification. A ce titre, l'exercice 2002 est placé sous le signe de l'audace. Les campagnes de recrutement s'enchaînent, les voies de l'e-mailing marketing sont explorées de long en large, les internautes croulent sous les newsletters farcies d'offres de voyages en tout genre qui font la joie des bases de données d'un Voyages-sncf aux prises avec la mise au point de sa stratégie marketing. Les pépites de cette époque ? Les offres Prem's, Dernière Minute et le billet électronique dont le succès ne cesse de croître. Fil rouge de ces grands chamboulements, la croissance qui double d'année en année pour atteindre 784 ME fin 2004 (+ 70 % vs 2003) et 9,5 ME de résultat net. Mieux, si la vente de billets de trains sous la marque SNCF demeure locomotive de cette croissance, l'activité voyages n'est pas en reste. Elle représente près de 20 % du total qui pèse, lui, 12,2 % de l'activité de la SNCF. Bref, tout va bien dans le meilleur des mondes. La très forte démocratisation du haut débit entraînant une explosion des ventes de l'Internet marchand, Voyages-sncf profite plus que d'autres des forces cumulées de sa marque et de la montée en flèche du e-commerce.
Une ombre au tableau
Deux événements successifs, entre juin et juillet 2004, jetteront pourtant une ombre à ce beau tableau. En juin, Expedia annonce son intention de se hisser à la première place du marché de l'e-tourisme français à l'horizon 2010. Un portail de produits de voyages, qui vont du vol sec à l'hôtel, en passant par la location de voiture, le séjour packagé et le billet de train, est inauguré sous la marque Expedia. Les deux partenaires deviennent concurrents. L'annonce ne surprend qu'à moitié le marché qui avait toujours entrevu dans cette alliance une sorte de stratégie troyenne. Ce qui étonne plus, c'est le silence de voyages-sncf qui, poussé dans ses retranchements par les médias, se fendra d'une simple analyse positive de la situation. Dans la foulée, un deuxième épisode politiquement incorrect : un dépôt de plainte pour abus de position dominante. L'initiative émane de Lastminute France, filiale du groupe britannique éponyme. En cause, l'illicité supposée du partenariat entre GL e-commerce et Expedia, ses effets anticoncurrentiels, les pratiques discriminatoires visant à favoriser les activités de sa filiale en ligne et de son partenaire privé, Expedia… La liste est longue. Les mesures conservatoires demandées par Lastminute seront rejetées par le Conseil de la concurrence qui décidera d'étudier au fond le dossier, encore en cours d'examen. Impact de ce méli-mélo ? Nul, pour l'heure. Les activités du voyagiste vont bon train dans un contexte porteur où l'e-tourisme hexagonal est estimé à 2,5 MdE en 2005. Fort de ses 30 % de parts de marché (2004), Voyages-sncf devrait s'octroyer la plus grosse tranche du gros gâteau. Discrète sur ses résultats 2005, l'agence confie avoir franchi le seuil symbolique du milliard d'euros de volume d'affaires. Autre prouesse, l'audience du site qui revendique 7,5 millions de visites mensuelles, contre 6 millions un an plus tôt. Et pour 2006 ? Des wagons de projets pour, toujours, garder un train d'avance sur le marché.
1997
La SNCF crée un site géré par une équipe d'informaticiens forts de l'expérience Minitel. A l'époque, le site n'est qu'un canal d'information pour les clients.
1998
www.sncf.com devient un site de commerce. La réservation des billets de trains grandes lignes est mise en place et complétée de rubriques d'actualités commerciales.
1999
Les services e-commerce et le paiement en ligne font leur apparition. Sncf.com devient n° 1 du e-commerce français. Internet devient prioritaire pour la SNCF.
2000
Pour soutenir le développement du projet internet, la SNCF rapatrie son site au sein de la filiale dédiée, Voyages-sncf SA, projet de portail de voyage hébergé au sein de la holding GL e-commerce.
2001
Un appel d'offres est lancé pour construire l'offre agence de voyages. L'américain Expedia remporte la mise. Le partenariat qui se noue est un joint-venture, GL Expedia.
2003
Lancement des offres Prem's, Dernière Minute, Billet imprimé
2004
De nouveaux services apparaissent (Alerte Résa, SMS + et Loisirs). C'est aussi l'année du lancement de iDTGV par SNCF, dont la distribution est confiée à Voyages-sncf.
2005
Innovation à tous les étages : le calendrier des meilleurs prix, les campagnes de communication très décalées comme Transatlantys.com qui recueille 1 million de visites.
Interview Rachel Picard > DGA de voyages-sncf.com« L'Internet aujourd'hui, c'est toute la croissance de la SNCF »
Quel bilan faites-vous des activités de Voyages-sncf en 2005 ? Quels ont été les faits marquants de cette année écoulée ?
Nos activités ont continué à progresser en 2005, en phase avec la croissance globale du marché du e-commerce, soit autour de 50 % par rapport à 2004. Parmi les faits marquants, nous avons constaté la montée en puissance de l'activité voyages qui a enregistré 35 % de croissance, tirée, à notre grande surprise, par la vente de vols secs. Ce qui s'explique par notre politique de segmentation des frais de réservation de vols, plus avantageux sur Internet que sur les autres canaux. Elle a fini par produire ses effets mais, ce que nous n'avions pas prévu, c'est qu'utiliser les frais de réservation comme variable marketing nous aurait apporté une telle proportion de nouveaux clients qui ne seraient pas venus chez nous par le biais du train. C'est la première bonne surprise de l'année. La deuxième vient du Pack Train, notre offre de train + hôtel en France et en Europe qui a connu 150 % de croissance. C'est le résultat de deux effets : l'élargissement de l'offre d'hôtels en France et en Europe, associé à une offre de trains déployés vers ces nouvelles destinations. C'est l'héritage du savoir-faire d'Expedia en matière de packages, conjugué à l'expertise SNCF dans le domaine du train.
En 2006, quelles seront les priorités de Voyages-sncf ?
Après le développement du site et le marketing des ventes, nous allons nous attaquer aux services autour de la vente qui aideront l'internaute à choisir le meilleur produit au meilleur prix grâce à quelques prouesses technologiques qui seront bientôt dévoilées au public. A titre d'exemple, nous avons développé un calendrier des meilleurs prix de trains. Ils s'afficheront avec leurs tarifs jusqu'à huit jours avant la date de départ et jusqu'à quinze jours après. C'est un véritable atout, en particulier pour le tourisme B to B où il est plus pertinent d'organiser son départ en fonction de son horaire d'arrivée. D'ailleurs, autre projet 2006, nous avons l'intention de pousser davantage notre offre B to B qui représente 15 % de nos ventes actuelles. Autre nouveauté côté séjours : le site sera doté d'un comparateur qui permettra, outre la comparaison des offres sur plusieurs critères, la mise en mémoire de plusieurs sélections. Enfin, nous inaugurerons prochainement l'arrivée de Lea, un agent intelligent qui viendra enrichir et accompagner l'expérience utilisateur. Nous misons sur elle pour en faire à la fois l'ambassadeur de la marque Voyages-sncf et un super vendeur en ligne.
Diriez-vous qu'Internet contribue au développement des activités de la SNCF ou, finalement, s'agit-il plutôt d'un transfert d'activités d'un canal vers un autre, plus rentable et moins coûteux ?
Ce que je peux vous dire, c'est que l'Internet représente aujourd'hui 20 % des ventes de la SNCF. Sa contribution ne se mesure pas uniquement en termes de développement. Pour autant, Internet n'a pas fait diminuer les ventes en guichet, même si nous constatons bien une érosion du téléphone au profit du Web. Mais, ce qui est certain, c'est que les ventes en ligne correspondent à la croissance de la SNCF. Ou, mieux, que l'Internet aujourd'hui, c'est toute la croissance de la SNCF. La preuve ? Jamais nous n'avions écrit à quatre millions de clients, jamais nous n'avions proposé du train le week-end à Londres, jamais nous n'avions négocié des tarifs en vue d'optimiser les taux de remplissage des trains. Et c'est bien le développement sur Internet qui nous a conduit à imaginer tout cela.
Chiffres clés
Sncf.com CA 1999 : 23 ME. CA 2000 : 91 ME. CA 2001 : 162 ME (Voyages-sncf devient agence de voyages en décembre de cet exercice). Voyages-sncf : activité agence de voyages VA* 2002 : 272 ME (+ 68 % vs 2001). Résultat net : 1,3 ME. Part dans le VA SNCF : 5,7 %. VA 2003 : 467 ME (+ 72 % vs 2002). Résultat net : 4,2 ME. Part dans le VA SNCF : 7,5 %. VA 2004 : 784 ME - 11,1 millions de transactions (+ 63 % vs 2003). Résultat net : 9,5 ME. Part dans le VA SNCF : 12,2 % . VA 2005 : 1,1 MdE (+ 48 % vs 2004). *VA : Volume d'affaires