[Tribune] La crise actuelle remet-elle en question le durable en magasins ?
Publié par Valentina Candeloro, directrice marketing international de Mood Media le | Mis à jour le
Alors que le 6 octobre dernier le gouvernement français et les entreprises annonçaient un plan de sobriété énergétique pour éviter les coupures d'électricité, aujourd'hui les Français semblent avoir pris la mesure du sujet. En effet, la consommation énergétique poursuit sa baisse avec -6,5 %(1) d'énergie en moyenne en France le mois dernier. Serait-ce les premiers effets des protocoles de sobriété ou d'autres facteurs peuvent-ils l'expliquer ?
Une chose est sûre, les commerces font preuve de bonne volonté en matière de durabilité. Cependant les consommateurs français veulent plus, ils ont des attentes bien particulières envers leurs enseignes et souhaitent, qu'au-delà de la crise actuelle, les pratiques évoluent dans le temps.
Comment devenir un bon élève en sobriété énergétique ?
Les préoccupations des consommateurs français sur l'énergie sont si fortes que 90 % (2) d'entre eux annoncent vouloir faire attention et modifier leur comportement pour moins consommer cet hiver. De façon réciproque, une grande majorité attend du commerçant qu'il soit attentif à ses consommations énergétiques en adoptant de bons gestes. Cela commence par l'installation des portes des réfrigérateurs et des congélateurs, comme l'oblige la loi, une action essentielle pour 62 % (3) des Français. Un exemple ? Picard, certifiée ISO 50001, l'enseigne a mis en place des modules de formation pour sensibiliser ses collaborateurs aux économies d'énergie et a multiplié par trois ses investissements dans le matériel. Les efforts paient : 20 % d'électricité ont été économisées grâce au renouvellement des bacs à surgelés, 10 % encore d'économie avec le remplacement progressif des systèmes de climatisation et de chambres froides.
Autre mesure, l'éclairage des vitrines, des luminaires et des écrans allumés pour lesquels 62 % (3) des Français souhaiteraient voir éteints dès la fermeture du magasin. C'est le cas de Valentino, qui commence à éteindre les lumières de ses magasins à l'échelle mondiale plus tôt dans la nuit pour économiser l'énergie et donner un signal de sensibilisation à l'environnement.
Mais si des efforts sont faits pour repenser les habitudes et le matériel utilisé, certaines marques vont plus loin. La nouvelle tendance, un magasin entièrement responsable, à l'image des Ateliers Gaîté, de Clarins et de Foot Locker avec son magasin durable sur la côte ouest des États-Unis. Cette installation inclut en effet l'eau récupérée, un éclairage LED et des matériaux recyclés. Ces quelques mesures énoncées ne sont qu'une partie infime de tout ce qui a été fait par les retailers. Et ils ont raison, ceux qui adopteront des pratiques durables verront leur point de vente certainement bien plus fréquentés, puisque 60 % (3) des consommateurs français affirment que cela les rendraient plus susceptibles d'acheter.
Plus de pratiques éco-responsables en magasins
Les consommateurs Français sont particulièrement sensibles à l'engagement écologique et ont pris conscience qu'il était temps de changer leurs habitudes de vie et de consommation. À tel point que 70 % (3) d'entre eux souhaiteraient avoir accès à des pratiques durables en magasins. Comme le fait très bien Lush avec la mise en place d'ateliers pour confectionner soi-même ses produits de beauté : c'est ludique, c'est joli et c'est fait maison avec des ingrédients sains ou Mr. Bricolage qui réalise, en partenariat avec PEFC, des ateliers DIY (Do it Yourself) en magasin pour sensibiliser sur la gestion responsable des ressources forestières.
Et qui dit pratiques durables, dit aussi services durables. Avec notamment les services de locations de vêtements comme ceux lancés récemment par Gemo et Selfridges ce qui permet de réduire l'empreinte carbone de l'industrie de la mode. Mais aussi Monoprix, qui depuis quelques mois propose la location gratuite de tout type d'objets avec son programme « Je m'appelle reviens ».
Finalement, grâce à ces dispositifs, les marques apprennent aux consommateurs à devenir responsable.
Par ailleurs, le tri et le recyclage font aussi partie des axes prioritaires pour 66 % (3) des acheteurs français qui s'attendent à trouver dans les magasins des points de recyclage pour les emballages ou les vêtements usagés. À l'image du nouveau magasin H & M à Islington, dans lequel est proposé un service de collecte et de recyclage de vêtements. Cela permet aux clients de faire don de vêtements de toutes marques lors de leurs achats en magasin.
Enfin, un dernier élément qui s'intègre dans cette approche servicielle et durable : la réparation des vêtements. C'est un point important pour 65 % des consommateurs français qui apprécient trouver des studios de réparation dans les magasins. C'est Uniqlo situé sur Regent Street à Londres qui en fait profiter ses clients avec son atelier RE.UNIQLO, ou Timberland qui a intégré depuis toujours ce service dans ses magasins. Et même Décathlon en Belgique a récemment lancé son propre service de réparation de vêtements et de sacs pour lutter contre le gaspillage. Le but étant de ne pas jeter dès que nos produits sont abîmés mais bien de les faire réparer pour leur offrir une seconde vie.
Avec 70 % des consommateurs français qui veulent une pratique plus durable en magasins, les commerçants ont tout intérêt à prendre en considération leurs attentes du magasin au produit, en passant par les emballages.
D'ailleurs, 64 % (3) des Français demandent désormais du vrac et des produits sans emballages afin de réduire leur empreinte écologique et de privilégier une consommation plus responsable.
Lidl est notamment en train de tester dans deux de ses magasins au Royaume-Uni, du vrac automatisé grâce à une recharge intelligente pour les détergents à lessive. Alors que le suremballage et l'utilisation du plastique sont de véritables fléaux dans l'industrie agroalimentaire, le vrac est une réponse pour réduire cet impact et offre une expérience écologique et économique qui conquiert de nombreux consommateurs. D'ailleurs, le sujet s'applique aussi au retail avec la limitation du recours aux cintres en plastique et jetables par exemple. La palette des actions durables est infinie, chaque retailer peut y prendre sa part.
(1) RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité français
(2) Le Médiateur de l'énergie
(3) Étude de Mood Media "Baromètre des tendances en magasin"