« La culture digitale est restée à la porte des grandes entreprises »
Publié par Martine Fuxa le | Mis à jour le
Marie Ekeland, coprésidente de l'association France Digitale et associée chez Elaia Partners, un fonds dédié à l'économie numérique, revient sur les ambitions de France Digitale. Interview.
Qu'est ce que France Digitale?
Une des grandes caractéristiques de l’association France Digitale est que nous mélangeons les investisseurs et les entrepreneurs c’est-à-dire les fonds de capital risque et les start-up. Du coup, nous prêchons une parole assez équilibrée qui va dans le sens de la croissance de l’écosystème au sens large et qui n’est pas corporatiste. Nous avons senti le besoin de passer à l’action en créant France Digitale, car nous pensons que le potentiel économique du secteur est complètement méconnu et sous-estimé par les pouvoirs publics. Nous avons lancé un premier baromètre réalisé par Ernst & Young et rendu public le 2 juillet 2012, en même temps que le lancement de l’association. Il sera réitéré tous les ans.
Quelles sont les principales conclusions du baromètre publié en juillet?
Le baromètre a porté sur 108 start-up issues de l’économie numérique au sens large, allant du e-commerce, aux médias, aux éditeurs de logiciel, etc. Un panel large d’entreprises donc représentant au total 750 M d'euros de CA en 2010 et 1 milliard en 2011, soit une croissance de 33% en annuel. Par les temps qui courent, cette croissance est très rare et cela a beaucoup d’effets vertueux. À ce jour, 40% de ce chiffre d’affaires est réalisé hors de France en exportation. Les entreprises du numérique sont porteuses d’espoir pour l’économie actuelle, qui reste en perte de compétitivité. Dans ce secteur en effet, l’âge moyen est de 32 ans alors que dans les PME, il est de 37 ans en moyenne et dans les grands groupes de 41 ans. L’augmentation des effectifs suit également la croissance puisqu'ils augmentent de 24%. Pas moins de 87% des salariés sont embauchés en CDI. Par ailleurs, nous sommes sur un modèle à contre-courant des autres secteurs. Le salaire moyen des patrons du numérique est 2,3 fois supérieur à celui des salariés, ce qui est bien moindre – en termes d’écart – que dans les autres pans de l’économie. Au sein de l’entreprise, le partage de la valeur est plus équitable dans le secteur du numérique.
Quels sont les objectifs phares de l'association?
Ce qui nous intéresse, c’est que l’on crée en France les conditions nécessaires à ce que les entreprises du numérique puissent croître correctement. Il faut un cadre règlementaire qui permette aux sociétés de s’épanouir. Nous nous posons la question des freins à la croissance persistant au niveau des entreprises. Par exemple, nous constatons qu’il existe un problème de formation. Les entreprises peinent à recruter et vont chercher certains profils à l’étranger. Pour certains nouveaux métiers, il n’existe pas encore assez de formations. En fait, la culture digitale est restée à la porte des grandes entreprises.
Au moment de la préparation de la loi de Finances 2013, cruciale pour l'avenir de l'économie française, les entrepreneurs numériques et capitaux-risqueurs rassemblés au sein de France Digitale proposent quatre mesures phares, indispensables au redressement de la France: étendre la notion d'innovation de la R&D à la conception et concentrer l'effort public sur les entreprises à fort potentiel, mobiliser l'épargne longue vers les PME innovantes. Mais aussi, renforcer les liens entre grands groupes et PME innovantes en rénovant le crédit impôt recherche et pérenniser le financement de l'innovation numérique par les investisseurs particuliers. L’association compte une centaine de membres dont 35 membres fondateurs…