[Tribune] Les perspectives de la logistique pour 2016
Publié par Par Isabelle Badoc, Responsable de l'offre Supply Chain chez Generix Group le - mis à jour à
Isabelle Badoc, Responsable de l'offre Supply Chain chez Generix Group, décrypte les grandes tendances et les perspectives du secteur de la logistique.
Le tracking des commandes, nouvel impératif des commerçants en ligne
A défaut de recevoir instantanément leurs commandes, les consommateurs attendent de l'instantanéité dans les informations relatives à leur suivi. Pour preuve, une étude réalisée l'an dernier par MetaPack indiquait que 83% des Français tiennent à vérifier le suivi de leurs commandes au moins deux fois entre l'achat et la réception ! Aujourd'hui, les leaders du e-commerce sont (quasiment) les seuls à répondre à cette injonction via la systématisation du suivi des marchandises directement depuis leur site. Il y a donc urgence pour les autres - qui n'appartiennent pas à cette " élite " et sont encore nombreux à renvoyer leurs clients vers le site de leur transporteur - à se donner les moyens de tracer le parcours des marchandises commandées. Comment ? En synchronisant des données remontant de l'ensemble des lieux de préparation des commandes et des transporteurs. On peut s'attendre à ce que cette visibilité complète sur leur site marchand s'impose rapidement parmi les services standards des commerçants en ligne. Y compris les plus petits. En effet, le prix des technologies nécessaires s'est démocratisé et l'attente des clients s'accroît. De plus dans un contexte de guerre des prix permanent, ne pas intégrer ce type service c'est prendre le risque de laisser sa clientèle filer vers la concurrence.
Uber Rush et Amazon Flex vont-ils déchanter ?
De l'immédiateté, oui mais pas à n'importe quelle condition. C'est peut-être la réaction à laquelle vont se heurter les services Uber Rush et Amazon Flex s'ils se développent en France. Leur fonctionnement est simple : sous-traiter à des travailleurs intermittents la livraison du dernier kilomètre. Or dans des sociétés où les consommateurs ont érigé la qualité de services en valeur cardinale, ces dispositifs risquent d'être vite confrontés aux questionnements suivants : " alors que les professionnels eux-mêmes ne sont pas toujours exemplaires comment peut-on s'attendre à ce que des amateurs fournissent une qualité de service a minima identique? Comment garantir la sécurité de la livraison ? " Mais loin de moi l'idée de jeter le bébé avec l'eau du bain. L'économie collaborative reste un vivier d'idées fertile pour développer de nouveaux services logistiques à forte valeur pour le client et qui optimisent le coût de revient. Les systèmes de " réseaux palettes " proposés par Astre ou DB Schenker l'illustrent parfaitement.
Amazon sur le chemin de l'omnipotence
En rachetant Colis Privé, Amazon a frappé un grand coup. Faire main basse sur un des leaders français de la livraison du dernier kilomètre, c'est signifier à ses clients finaux que l'on maîtrise l'ensemble de l'offre et de l'exécution. Et donc apparaître comme le démiurge du commerce et de la livraison. Un statut unique qui renforce l'adhésion du client. Fort de l'intégration de Colis Privé, Amazon sera encore un peu plus en mesure de tenir ses engagements logistiques et de proposer une qualité de service optimale. Si le client final a tout à gagner, l'écosystème de la logistique peut trembler. Car l'acquisition de Colis Privé, associée à la location de 20 Boeings 747 et à une licence de transport maritime vont à coup sûr provoquer la disparition de certains transporteurs (les plus fragiles) et créer un manque à gagner pour d'autres (les plus gros). De même, ces grandes manoeuvres vont accroître le fossé entre le groupe de Seattle et les autres commerçants en ligne. En effet, Amazon proposera une offre holistique embrassant la vente, le stockage, la livraison, et offrant un accès facilité à de nombreux marchés dans le monde. Qui pourra en dire autant ?
La vente en vrac, le défi logistique inattendu
Vieille comme le monde la vente en vrac a de nouveau le vent en poupe. Longtemps cantonnée au rayon des fruits et légumes frais, elle s'étend désormais à la majorité des produits alimentaires et rencontre un franc succès auprès des consommateurs désireux d'associer éthique et consommation et de ceux dont le budget est réduit. Les enseignes bio, type Biocoop, ont été les premières à ressusciter ce mode de vente avant d'être suivies par des hypermarchés comme Auchan. Toutefois, ce mode de vente mettant en relation géants de la distribution et petits producteurs pose un véritable défi logistique. En effet, les silos ont une faible volumétrie et les distributeurs restent adeptes du juste à temps. Ce qui suppose des réapprovisionnements dans des délais très courts. Or, ces petits producteurs n'ont pas les moyens de les assurer. Partant, de nouveaux acteurs agiles - tels Qualtrade - émergent. Leurs atouts ? Assurer le référencement, le stockage des produits et leur transport dans des délais très courts, à la faveur d'une gestion efficiente des approvisionnements et un système d'informations ad hoc. Les prochains mois seront révélateurs de l'avenir d'un tel modèle. 2016, enfin l'année de la RFID ? Le cabinet Deloitte a catégorisé la robotisation parmi les innovations les plus matures du secteur. A juste titre. A la manière de Leclerc avec la Scapest, nombreux sont les distributeurs à avoir automatisé une grande partie de leur activité logistique en entrepôt. Derrière l'automatisation, la technologie RFID à tout pour tirer son épingle du jeu dans la logistique cette année. En effet, cette technologie participe de l'amélioration de la traçabilité des marchandises et de la conformité des chargements. Permettant d'acquérir des données plus nombreuses et plus précises, la RFID simplifie le ciblage fin des produits incriminés lors d'opérations de rappel. Bénéficiant de tarifs toujours plus intéressants, cette technologie se rapproche nettement de son seuil de rentabilité pour les entreprises. Pour ne rien gâcher, la RFID permet la réalisation de gains sur les processus de réception, d'antivol et d'inventaire dans les points de ventes. A l'ère de l'immédiateté et de la qualité service, la RFID va-t-elle enfin résonner comme une évidence en 2016 ?