[Tribune] Taux de conversion et SEO: au-delà du confort, les raisons business d'accélérer son site web
Publié par Stéphane Rios (Fasterize) le - mis à jour à
Alors qu'il apparaît crucial pour un e-commerçant d'afficher ses pages en moins de trois à cinq secondes, y compris sur mobile, il importe d'optimiser son frontend et de se situer dans son écosystème.
De bons temps de chargement sont essentiels pour l'expérience utilisateur. En effet, plus le chargement est rapide, plus les internautes sont à même de rester sur un site web, visiter un grand nombre de pages, et finaliser leurs achats, au lieu de le quitter par frustration. Au-delà du confort de navigation, la vitesse est aussi un enjeu pour le chiffre d'affaires et le SEO. C'est pourquoi il faut savoir l'évaluer, mais aussi se comparer à son propre écosystème pour en tirer les enseignements nécessaires.
Un site rapide pour une meilleure expérience utilisateur
Avec des pages web rapides, l'attention des utilisateurs est maintenue. Ils sont entraînés dans un "flow", leur concentration et leur engagement sont au maximum. En termes de perception, une étude de Google révèle que pour l'affichage des pages:
< 200 millisecondes donnent une impression d'instantanéité
< 1 seconde donne une impression de fluidité
< 5 secondes restent acceptables pour maintenir le "flow"
< 8 secondes entraînent une perte d'attention.
Dans un contexte où les sollicitations sont multiples et où notre capacité d'attention baisse, la vitesse d'affichage est indispensable. En effet, c'est même l'exigence UX numéro un des mobinautes, devant les aspects esthétiques d'une interface. Il suffit de trois secondes d'attente pour que 53% des mobinautes quittent une page si elle n'est pas chargée. Une fois partis, ces visiteurs ne reviendront pas, et il y a même de fortes chances pour qu'ils se rendent chez un concurrent.
Aussi, la vitesse des pages web compte à chaque étape du tunnel d'achat, jusqu'à la validation du panier. Une étude ComScore datant de 2018 révèle que les abandons de panier sont liés dans 20% des cas à des difficultés de navigation -soit des opportunités de vente perdues alors que le client a quasiment atteint son but. En termes d'impact direct sur les conversions, selon une autre étude relayée par Google et TrackAd, une seconde de temps de chargement en plus sur mobile représente: +8,3% de taux de rebond, -3,5% de taux de conversion, -9,4 % de pages vues. Naturellement, les effets d'un site ralenti -ou pire, s'il ne répond pas parce qu'il est surchargé- peuvent être encore plus dommageables pendant les périodes de promotions.
Par ailleurs, les internautes ne sont pas seuls à attendre d'un site qu'il soit rapide. Google prend également ce critère en compte dans son algorithme, et dans des proportions encore un peu plus importantes avec les Core Web Vitals. Ce sont des métriques qui évaluent la qualité de l'UX en observant la vitesse de chargement des pages.
Vitesse des pages et SEO: les Core Web Vitals au centre de l'attention
Dans la communauté SEO comme dans la communauté webperf, les Core Web Vitals agitent les esprits depuis le printemps 2020. Il s'agit des trois indicateurs suivants, centrés utilisateur, que Google intègre aux signaux dont il tient compte pour le ranking à partir de sa mise à jour Page Experience courant 2021: le Largest Contentful Paint (pour évaluer la vitesse d'affichage), le Cumulative Layout Shift (pour évaluer la stabilité visuelle) et le First Input Delay (pour évaluer l'interactivité).
Bien que l'impact de la vitesse de chargement sur le classement dans les SERP soit toujours sujet à débat, elle présente un avantage indiscutable dans un contexte concurrentiel. En effet, plus des pages sont rapides, plus Google peut en indexer un grand nombre en un minimum de temps, plus elles ont de chances d'être mieux classées que des pages qui seraient plus lentes.
En somme, pour favoriser le SEO, outre le temps de réponse serveur qu'il est possible de surveiller grâce à un indicateur appelé Time To First Byte, il faut optimiser également le Frontend. En effet, la compression des images, la réduction du poids et du nombre des requêtes (optimisation des fichiers CSS, JS, HTML...) -et la réduction du poids des pages en général- sont importants à la fois pour l'expérience utilisateur et pour les robots des moteurs de recherche.
C'est d'autant plus vrai que depuis septembre 2020, Google est passé à l'indexation mobile first. Tout comme les visiteurs d'un site, le moteur de recherche tient à ce que les pages se chargent rapidement sur mobile, un device pourtant plus difficile à optimiser.
L'importance d'accélérer un site et de le rendre mobile first
La vitesse des pages web dépend bien entendu de la façon dont elles sont conçues, mais il y a malheureusement des paramètres impossibles à maîtriser: la puissance du processeur du téléphone mobile des visiteurs, et la qualité du réseau. C'est pour cette raison qu'un site mobile est plus difficile à optimiser qu'un site desktop, dont les processeurs sont plus puissants et la connexion généralement plus stable. De ce fait, pour des optimisations efficaces sur mobile, il faut penser à tous les utilisateurs, même les moins bien lotis.
A mesure que l'usage du mobile se développe (75% des Français possèdent un smartphone en 2018), la puissance des réseaux et des processeurs augmente, mais les pages web, elles, ne sont pas plus légères pour autant. En octobre 2000, le poids moyen d'une page web était de 89 Ko, images et scripts compris, alors qu'aujourd'hui, une page moyenne pèse 2 Mo (les images constituent en moyenne 50% de leur poids). C'est une multiplication par presque 30 en 20 ans! Et cela peut sembler contradictoire, sachant que pour certaines verticales du retail, le mobile peut représenter une part écrasante des visites et des transactions.
Pour satisfaire et fidéliser des clients, et faciliter le travail de Google, voici quelques points méthodologiques pour un site mobile first. Il faut pour cela fixer un budget performance, autrement dit, définir des seuils de performance à ne pas dépasser, ou des scores à atteindre (poids maximum des pages, speed index, time to interactive, score PageSpeed...). Il est également nécessaire d'effectuer des tests sur des mobiles moyens ou entrée de gamme, en considérant qu'une audience n'est pas toujours majoritairement équipée de modèles récents ou puissants. Enfin, il faut effectuer des tests en tenant compte des limites de réseau, car un site mobile est peut-être rapide en Wi-Fi ou en 4G, mais il faut aussi tenir compte de la latence pour des utilisateurs connectés en 3G ou Edge. Des outils gratuits en ligne permettent de tester la vitesse des pages web sur mobile, tels que Web Page Test, Test My Site de Google, PageSpeed Insights....
La vitesse des pages web est bénéfique pour la satisfaction client, le référencement, et l'indexation mobile. Et ce n'est pas tout: c'est aussi un atout pour absorber le poids des third parties.
Des pages rapides pour mieux absorber les third parties
Publicité, A/B test, trackers, fonctionnalités de recherche ou det chat... En 2019, près de 94% des pages web sur desktop comportent au moins une ressource tierce, selon une étude HTTP Archive. Ces tiers apportent de la valeur à un site web, ils sont souvent incontournables pour le marketing et ils peuvent constituer une source de revenu à part entière (la publicité pour les médias, par exemple). Mais ils peuvent doubler, voire tripler le temps d'accès à certaines fonctionnalités.
Toutefois, il est important de noter que selon la façon dont ils sont implémentés, les scripts tiers ne dégradent pas forcément les temps de chargement. Pour profiter de leurs avantages sans détériorer la vitesse et l'UX, l'optimisation du frontend est primordiale. Les pages doivent être légères et les scripts priorisés et ce, afin d'absorber le poids et l'impact de ces third parties. Ces services à valeur ajoutée pourront ainsi être intégrés sans créer d'expérience frustrante pour les utilisateurs.
Enfin, pour savoir si un site est assez rapide, il faut aussi le comparer à son propre écosystème, car selon les secteurs d'activité, les sites n'ont pas la même complexité. C'est un point de repère important pour savoir comment se situer, et ce qui reste à mettre en pratique pour améliorer les performances.
Vitesse de chargement: comment se situer par rapport à son écosystème
En matière de vitesse, tous les marchés n'en sont pas au même point, et n'ont pas les mêmes contraintes. Par exemple, les revenus publicitaires sont vitaux pour les sites médias, les sites e-commerce ont besoin de proposer des contenus personnalisés qui répondent aux besoins de leurs clients... Les options et les leviers pour accélérer un site peuvent être différents selon le contexte. C'est pourquoi, pour savoir si un site est assez rapide, il faut pouvoir le comparer à ceux des concurrents.
Dans le secteur du retail, pour les sites les plus visités en France, le Speed Index moyen sur mobile (qui mesure la vitesse d'affichage des éléments au-dessus de la ligne de flottaison) va de 4520 millisecondes pour le prêt-à-porter à 3077 millisecondes dans la high-tech. Il atteint même 2063 millisecondes sur desktop pour le secteur de la grande distribution. Dans la santé pharma, les sites web ont un time to interactive (qui mesure l'interactivité) en moyenne deux fois plus élevé, et un speed index en moyenne 39% plus élevé que ceux des 50 sites français les plus visités.
Enfin, dans la banque-assurance, le temps de réaction entre une action de l'internaute et le traitement de cette action par le navigateur (ce que mesure l'indicateur appelé first input delay, qui fait partie des Core Web Vitals) est d'environ 0,5 seconde, alors que Google recommande que ce temps soit inférieur à 0,1 seconde. Ces KPI donnent un aperçu de la réalité de chaque secteur, pour pouvoir comparer des performances en tenant compte de la réalité d'un marché et des contraintes métier qui lui sont propres.
Pour conclure, la vitesse de chargement est un sujet à la croisée des chemins entre UX, technique, SEO et business. C'est la raison pour laquelle elle doit être au coeur des priorités de toutes les équipes, et faire l'objet d'une attention et d'un travail continus.
L'auteur
Stéphane Rios est le CEO de Fasterize. Pendant dix ans, Stéphane Rios a été CTO de RueDuCommerce.com. Il a ensuite créé Fasterize, start-up éditrice d'une solution SaaS qui permet d'automatiser l'application des techniques d'optimisation pour la performance des sites web.