«Aujourd'hui, nous offrons dans nos magasins tous les services omnicanaux», Nathalie Lecleire (IKKS)
Publié par Propos recueillis par Martine Fuxa le | Mis à jour le
Changement d'organisation des flux logistiques, appels d'offres sur l'organisation des transports, grands projets autour de la RSE, Nathalie Lecleire, directrice Achats, Supply Chain et RSE d'IKKS et mentor logistique de de Paris Retail Week, détaille ses grands chantiers du moment.
Comment avez-vous géré la crise d'un point de vue logistique, et quels ont été les principaux impacts?
La supply chain a été mise sur le devant de la scène pendant cette période. Nous nous sommes retrouvés en première ligne sur beaucoup de sujets. Lorsque la Chine a commencé à fermer ses frontières, nous avons essayé de relocaliser nos productions dans de nouvelles zones. Cela nous a demandé beaucoup d'agilité et d'opportunisme dans la manière de gérer notre sourcing. L'autre grand sujet a porté sur la gestion des stocks. Dans les métiers du retail, la tendance est d'acheter en début de saison. De ce fait, nous avons trouvé des solutions pour annuler ou décaler les volumes de fabrication qui pouvaient l'être, avec pour objectif de terminer avec des stocks résiduels les plus sains possible. Cela nécessite beaucoup d'agilité et de flexibilité des équipes, qui ont été fortement sollicitées pendant cette période. Nous en avons tiré des enseignements en nous disant par exemple qu'il fallait réduire nos achats de début de saison. L'objectif est de "dérisquer" et d'essayer d'avoir des productions qui soient mieux réparties dans nos différents pays pour limiter les risques, en fabriquant moins en début de saison, en lançant des "refabrications" en cours de saison, en rapprochant la production des zones de vente et en réduisant nos délais. De fait, nous allons essayer de travailler différemment.
Quels sont vos défis en termes de supply chain?
Il y a un défi qui est celui de la RSE. Cette crise le met en évidence avec une prise de conscience particulière au niveau des consommateurs. La façon dont les gens travaillent est également en train de changer. Certains métiers sur lesquels il n'y avait pas de télétravail, comme les métiers techniques, ont basculé en télétravail pendant la période de confinement et nous nous sommes rendu compte que cela était possible. Nous avons vécu une grande aventure humaine avec des équipes très impliquées. L'être humain est capable d'une grande faculté d'adaptation et de remise en cause quand cela est nécessaire.
Vous êtes directrice de la supply chain et RSE du groupe IKKS. Cela reste assez original de cumuler ces deux fonctions, est-ce une volonté de l'entreprise?
L'industrie textile est la deuxième industrie la plus polluante au monde. Tout le cycle de vie des produits est concerné. De ce fait, intégrer le sujet RSE à la supply chain est, selon moi, la meilleure solution pour évoluer vite et faire changer les processus pour avoir in fine une entreprise plus respectueuse de l'environnement.
Comment êtes-vous organisés sur vos différents pays d'implantation? Quelles sont les spécificités de la France?
Nous livrons environ 10 millions de pièces par an, que nous commercialisons dans nos différentes boutiques. Notre activité est encore largement localisée en France et l'international reste l'un de nos axes de progrès. Nous avons des magasins en Espagne, au Benelux et dans quelques pays du Moyen-Orient. Notre entrepôt central se situe dans la région de Cholet où se trouve également notre siège. Historiquement, nous appartenions au groupe Zanier et nous avions six entrepôts répartis en France. Il y a deux ans, nous avons fait le choix d'opter pour un entrepôt centralisé avec notre prestataire historique Logtex qui est issu de la logistique du groupe Zanier. Nous organisons mieux nos flux de transport car nous avons de nombreux magasins mixtes qui gèrent les différentes marques, femme, homme et enfant; ainsi que nos deux autres marques, One Step et I.Code.
Son parcours
1987: Sortie de l'Edhec, Nathalie Lecleire entame sa carrière qui sera quasiment entièrement effectuée dans le retail, avec une forte orientation Supply Chain et projets.
1994: Rejoint Vivarte, où elle reste 11 ans, d'abord dans la logistique, puis en tant que directrice de projets. Elle est ensuite nommée au poste de direction de la Supply Chain chez Caroll pendant 7 ans.
2007: Retour chez Etam pour mettre en place la logistique du e-commerce puis en tant que directrice Supply Chain du prêt-à-porter.
Depuis 3 ans,elle occupe le poste de directrice Achats et Supply Chain chez IKKS, en charge du sourcing, des achats, de la production, de la qualité, de la logistique et de la gestion des stocks, ainsi que de la politique RSE du groupe, un gros enjeu pour l'entreprise.
De quelle manière gérez-vous l'omnicanalité entre e-commerce et retail en boutique?
Aujourd'hui, nous offrons dans nos magasins tous les services omnicanaux: la e-dispo, la e-reservation, le click and collect, etc. Notre gros projet dans le cadre de l'omnicanalité est de mettre en place un stock unifié. L'objectif est de ne jamais dire non à une cliente. Si la pièce n'est pas disponible, on doit pouvoir la réserver en ligne ou dans un autre magasin et lui livrer chez elle ou dans le magasin de son choix. Nous avons mis en place des services de livraison en 2 heures avec Stuart à Paris et en région parisienne, cela pourrait être également développé dans les principales grandes villes. Le projet omnicanalité est en cours avec un objectif de lancement en septembre 2020. Nous avons établi un cahier des charges et rencontré plusieurs prestataires. Nous travaillons déjà avec So Cloz pour le "ship from store" et avec Proximis, pour la e-reservation. L'idée serait de retenir un partenaire unique qui adresse l'ensemble de l'omnicanalité. Parallèlement, nous changeons notre système d'information magasin avec un nouveau système d'encaissement. Nous avons choisi la solution de Proximis qui sera connectée à notre système d'encaissement magasin sous Oracle. Au-delà de ces nombreux projets, nous avons également un appel d'offres en cours sur l'organisation du transport puisque nous voulons pouvoir expédier de l'express, livrer en 2 heures, et parfois mixer avec des délais de livraison plus longs... L'enjeu est de trouver la façon la plus efficace d'organiser tous ces mouvements de marchandise entre nos clients, nos magasins et l'entrepôt.
Comment évaluez-vous la performance de votre supply chain?
Nous mesurons les KPI au niveau de l'entrepôt, le temps de traitement d'une commande de mise en place ou de réassort. Nos partenaires utilisent également des tableaux de bord de performance que nous analysons. Enfin, nous réalisons des études clients et des mesures de satisfaction sur le parcours client et la qualité de nos produits.
Quid de la mécanisation de vos entrepôts, avez-vous des projets sur ces sujets?
Nous y réfléchissons, notamment pour le traitement des retours mais il faut atteindre une taille critique pour amortir ces technologies souvent coûteuses.
Quelle est votre vision des grands enjeux supply chain de votre industrie?
En premier lieu, les enjeux RSE sont cruciaux. Mais également les stocks représentent un gros sujet de rentabilité pour les entreprises. Il y a également parfois des enjeux liés au recrutement des bonnes compétences. Sur la région de Cholet qui est historiquement un gros bassin d'emploi dans le textile, il y a une pénurie de main-d'oeuvre sur les métiers de la logistique.
Dates clés IKKS
1987 : Libre et innovante. C'est ainsi que Gérard Le Goff entrevoit la marque de vêtements pour enfants qu'il lance en 1987 sous le nom IKKS. Rapidement, le label s'affranchit des codes de la mode enfantine pour imaginer un nouveau vocabulaire, dans lequel l'enfant gagne en liberté d'expression. Inspiré de la mode adulte, le vestiaire décalé IKKS Junior supprime les contraintes et ose les associations rock, les imprimés visuels et une palette de couleurs nobles. Chez IKKS, la mode est envisagée comme partie prenante du "Lifestyle" de sa communauté d'aventuriers urbains. Un propos moderne et avant-gardiste qui fera date dans l'histoire de la mode pour enfants et se prolongera sur des vestiaires homme et femme.
1999 : IKKS Women voit le jour. À l'instar du vestiaire pour kids, celui de la femme ne s'embarrasse surtout pas de contraintes. L'allure est moderne, fraîche, vive et intemporelle. Facile à vivre, le dressing féminin d'IKKS s'adresse aux femmes bien dans leur vie, bien dans leur époque. Articulée autour des trois piliers stylistiques fondateurs de l'esprit IKKS -le Denim, l'Urban Rock et le Military-, l'attitude est décomplexée, rafraîchissante.
2003 : Fort de son succès, IKKS Men est lancé en 2003, répondant avec exactitude aux exigences des hommes urbains et créatifs avec, toujours, ces trois piliers incontournables.
2012 : la gamme de maroquinerie s'étoffe pour s'inscrire dans une réelle continuité des collections de prêt-à-porter. IKKS relève alors le pari original d'une ligne aux inspirations Workwear, aussi abordable que désirable...
2020 : Aujourd'hui présent dans 45 pays, IKKS a inscrit durablement sa philosophie dans l'époque. Portée par une équipe de passionnés réunis autour de son p-dg Pierre-André Cauche, la marque compte plus de 1800 collaborateurs à travers le monde et dispose aujourd'hui de 3600 points de vente (retail, franchises, pure player). Le label est également présent sur Internet et fut d'ailleurs l'un des premiers à proposer son e-shop ikks.com, dès 2007.