[Logistique] "La crise ouvre des perspectives en termes de flexibilité et de solidarité", Armand Chaigne, DS Smith
Publié par Stéphanie Marius le - mis à jour à
Mobilisation des fonctions support, standardisation des packagings, transfert de la production... Armand Chaigne, head of industrial market France et head of marketing & communication France, fait le point sur l'adaptation de DS Smith, groupe spécialisé dans la fabrication d'emballages.
Quelles sont les mesures prises pour assurer la sécurité de vos collaborateurs?
La garantie sanitaire de nos employés est notre première priorité. La deuxième est de continuer à servir nos clients, notamment dans les secteurs agroalimentaire et pharmaceutique. Nous avons fermé nos locaux collectifs sur chacun de nos 30 sites. De plus 100% de nos opérateurs portent désormais des masques. Nous avons également modifié les flux de passage pour éviter que les collaborateurs ne se croisent trop. Le rappel des mesures et gestes sanitaires a été effectué et tous nos sites sont désinfectés chaque semaine. Enfin, nous avons mis en place une cellule de crise dans tous nos sites.
Avez-vous pu déployer le télétravail?
Pour permettre le travail à distance des fonctions support (design, bureau des méthodes, administration des ventes, planning), le département informatique a travaillé une semaine durant, week-end compris, et a transféré les postes informatiques (parfois encombrants) au domicile des salariés. Cela a demandé une certaine adaptabilité de la part des collaborateurs, parfois vivant dans de petites surfaces. Plus de 300 personnes bénéficient du télétravail chez DS Smith en France. Cela ouvre des perspectives pour la sortie de crise, en termes de flexibilité du travail.
Quels nouveaux outils et canaux de communication avez-vous mis en place?
Chaque jour, la cellule de crise se réunit. Les informations sont rassemblées au sein du réseau intranet et nous avons mis en place l'envoi hebdomadaire d'une newsletter à destination de l'ensemble des salariés français: elle rappelles les gestes fondamentaux, contient un message du directeur général et relaie les belles victoires dans différentes villes. Nous lançons, par exemple, une opération pour distribuer des jouets en carton aux enfants. Chacun peut également poser des questions à la cellule de crise.
Comment l'organisation s'adapte-t-elle?
Il a fallu nous adapter rapidement: chaque jour, les directeurs de sites comptent les personnes présentes pour savoir quelles sont les capacités, car les personnes malades ou contraintes de rester chez elles pour garder leurs enfants ne pouvaient prévenir en avance. Il a fallu déterminer les priorités de nos clients, les machines les plus productives, les compétences de chacun.
Pouvez-vous revenir sur les actes de solidarité de vos salariés?
Il existe une solidarité entre salariés mais également une aide de la part des clients, voire entre les clients. Dans l'Est de la France, dans la ville de Kunheim, nous avons reçu une palette entière de pâtes de la part d'un industriel à qui nous avons permis de ne pas se trouver en rupture de stock. En effet, nous étions confrontés à un sous-effectif très important pour la fabrication de palettes en carton, très utilisées par les acteurs de l'agroalimentaire et des produits d'hygiène. Ces entreprises ont été confrontées à une croissance située entre 10 et 30% et ne pouvaient utiliser d'autres modèles de palettes. Afin de ne pas arrêter leur production, quatre collaborations ayant une fonction support (commerciaux, designers, bureau des méthodes) ont décidé d'aller en production depuis deux semaines au sein de l'usine.
De même, la grande majorité des clients se sont montré prêts à banaliser leurs produits, enlever des couleurs, les standardiser afin d'étendre leurs usages. Ces concessions permettent de produire plus en économisant des réglages de machines et aide à servir le plus grand nombre. A court terme, il s'agit de belles victoire. Cependant, il ne faut pas oublier que nous sommes dans une logique de crise, entraînant de grands moment de solidarité. Il faudra étudier si ces gestes sont poursuivis à moyen terme. Nous allons en tout cas travailler sur ces partenariats forts.
Avez-vous été sollicités par les acteurs de la santé?
Nous travaillons avec des acteurs pharmaceutiques: fabrication de médicaments envoyés en pharmacie, de composants pharmaceutiques, de poches de sang, de respirateurs, fabricants français de masques. Le pourcentage de notre chiffre d'affaires lié à ces clients est important. Pour notre client producteur de respirateurs, basé dans l'Est, la production a été transférée en Seine Maritime. Il s'agit d'un autre axe d'ouverture à l'issue de la crise: au-delà de la nécessité d'un écosystème de proximité, la possibilité de faire des "back-up" est importante. Le concept "big is beautiful" (structures importantes), décrié, s'avère finalement opérant en période de crise. Nous avons transféré des millions d'unités en agroalimentaire et produits pharmaceutiques en tout pour maintenir la production et avons même utilisé notre réseau international, notamment en Allemagne.